Pour le 3e jour du procès d'Ouyahia et de Sellal, poursuivis dans l'affaire des usines de montage automobile et du financement occulte de la campagne électorale du 5e mandat avorté de Bouteflika, ce sont Ali Haddad, patron de l'ETRHB, Mohamed Baïri, patron d'Ival, Hamoud Chaïd, financier de la campagne qui ont été auditionnés. Appelé à la barre, Ali Haddad a nié avoir pris attache avec quiconque pour le convaincre de financer la campagne du 5e mandat. "Je n'ai appelé personne et ce n'est pas, à chaque fois que quelqu'un a un mal de tête, qu'il doit dire que c'est Haddad", a-t-il dit au juge. Ce dernier l'interrompt et l'interroge sur ses déclarations devant le juge du tribunal de première instance. Haddad nie encore une fois et précise qu'il a été, pour ce faire, contacté par Saïd Bouteflika. "Il voulait un comptable et je l'ai orienté vers mon neveu pour aider Chaïd", a-t-il répondu, estimant que les 19 milliards qu'il a transférés, par le biais de son chef de cabinet, vers son siège à Dar El-Beïda, il l'avait fait "sur demande de Saïd Bouteflika". Le juge l'interroge sur la "légalité" de ce geste. Haddad considère qu'il n'a pas commis d'infraction, puisqu'il a rendu service "à un ami". "L'argent était en sécurité dans mon bureau", a-t-il ajouté. Interrogé, par ailleurs, sur son rôle dans l'opération de collecte de fonds pour la campagne électorale de Bouteflika, Haddad a rappelé qu'il n'a appelé personne. "Je n'ai jamais demandé un dinar à Baïri en contrepartie de l'aide pour alimenter son usine en gaz et en électricité", s'est-il encore défendu. Concernant les 39 milliards de Mazouz, Haddad a affirmé que "Mazouz a ramené un sac d'argent au siège du FCE, et que lui et Baïri ont refusé de le déposer au siège de campagne, et je l'ai fait parce que je devais passer par là". Le procureur l'interroge ensuite sur ses relations avec Metidji et ses financements de la campagne. L'ancien président du FCE a "juré" qu'il ne le connaissait pas. "J'ai eu vent de cette histoire lors de l'instruction et lors de son arrestation", a-t-il dit. Quant à Chaïd Hamoud, Ali Haddad a nié l'avoir contacté pour intégrer le staff de campagne. "Il a fait la guerre avec Bouteflika et il fait partie depuis 20 ans du tiers présidentiel au Sénat. Comment pourrais-je l'intégrer dans le staff de campagne de Bouteflika ?", a-t-il répondu. Appelé à la barre, Hamoud Chaïd a indiqué que c'est Saïd Bouteflika qui l'a désigné, cette fois-ci, au poste de directeur financier de la campagne et qu'ils ont récolté 75 milliards de centimes. Il a reconnu avoir ouvert deux comptes pour ces fonds. "J'ai retiré 18 milliards pour les besoins logistiques de la campagne", s'est défendu Chaïd, avant que le juge ne l'interroge sur la somme restante. "Vous avez décidé de la distribuer aux citoyens ?", a répliqué le juge, ajoutant qu'ils ont reçu de l'argent liquide. Chaïd a nié avoir eu connaissance de la somme reçue. Il a avoué ne pas avoir été informé des 19 milliards transférés du siège de la campagne vers la direction de l'ETRHB à Dar El-Beïda. Malek Hadj-Saïd, chef de cabinet d'Ali Haddad, a été interrogé, quant à lui, sur l'identité de celui qui l'avait chargé de transférer les 19 milliards. Hadj-Saïd a affirmé que c'était Ali Haddad. Le système imposé par Bouchouareb Concernant le volet des indus avantages acquis dans le cadre des usines de montage automobiles, toutes les auditions ont montré l'étendue du système de gabegie et de passe-droits instauré par Abdesselam Bouchouareb. Amine Terra, ancien cadre du ministère de l'Industrie, est considéré comme "la pièce maîtresse" du système Bouchouareb. Amine Terra a été membre de la commission technique. Son audition qui a duré plus d'une heure a suscité un débat houleux tant le personnage était très proche de l'ancien ministre de l'Industrie, en fuite. "Je l'ai connu lorsque j'enseignais dans un institut où son fils suivait ses études", a-t-il dit. À travers son argumentaire, Terra n'a pas laissé de marbre l'auditoire, y compris les avocats de la défense qui l'ont interrogé sur son vrai rôle dans ce système imposé par Bouchouareb. Me Laïfa Ouyahia s'est interrogé sur la capacité d'un chargé d'études et de synthèse à concentrer autant de pouvoirs entre ses mains. Le procureur également n'a pas laissé passer les arguments de Terra. "Tu as remis le cahier des charges à certains et pas à tout le monde", lui a-t-il rappelé, avant que Terra n'informe que le cahier des charges en question a été imprimé 60 fois. Interrogé sur les résultats de la commission technique, il s'est défendu d'avoir eu un quelconque pouvoir de décision. "Elle était présidée par la secrétaire générale du ministère", répondit-il, avant que le procureur ne l'interroge sur son refus d'accuser réception du dossier d'Abderrahmane Achaïbou. "On a reçu des directives dans ce sens". Sellami Djelloul, appelé à la barre en tant que témoin, a rappelé que les services du ministère de l'Industrie ont refusé, effectivement, d'accuser réception du dossier d'Achaïbou. Djelloul, agent d'Achaïbou, a annoncé qu'il a été informé que "Bouchouareb aurait déclaré que tous les dossiers déposés auront une réponse favorable sauf Achaïbou". Plusieurs autres accusés ont été auditionnés. Aujourd'hui, ce sera au tour des personnes morales et des parties civiles d'être entendues. Le réquisitoire est attendu pour demain avant les plaidoiries.