Les avocats n'ont pas hésité à exprimer leur colère contre ce qu'ils qualifient "d'accusations standard et récurrentes contre les activistes". Le juge d'instruction près le tribunal de Sidi M'hamed a placé, hier, le journaliste Khaled Drareni sous contrôle judiciaire sans signature au tribunal ou dans un commissariat, mais avec interdiction de quitter le territoire national. Son passeport lui a donc été retiré. Les militants Samir Belarbi — relaxé récemment par le tribunal de Bir-Mourad-Raïs après avoir passé plusieurs mois en détention préventive — et Elyas Hamitouche ont été mis sous mandat de dépôt. Les trois prévenus sont poursuivis pour atteinte à l'unité nationale et incitation à attroupement non armé, conformément aux articles 79 et 100 du code pénal. Les avocats ont rejoint, vers 15h, la foule mobilisée à la rue de la Liberté, derrière le Palais de justice, en colère contre ce qu'ils qualifient "d'accusations standard et récurrentes contre les activistes". "Ces pratiques sont devenues un danger. La justice est au service du citoyen et non contre lui", s'est insurgé Me Tamert. Me Abdelghani Badi a parlé aussi de dossiers vides qui ne justifient nullement ni les chefs d'inculpation ni la détention préventive, ni même la liberté provisoire auquel est assujetti le directeur général de Casbah Tribune. "Khaled Drareni a profité de l'effet de la pression des journalistes et des réactions internationales", a-t-il commenté. Des dizaines de journalistes ont organisé, à partir de dimanche, des rassemblements devant le tribunal d'Alger-Centre, demandant la libération de leur confrère, arrêté samedi alors qu'il couvrait une marche citoyenne — réprimée au demeurant. Ils criaient inlassablement : "Le journalisme n'est pas un crime" ; "La couverture du hirak est un devoir professionnel", "Justice libre, presse indépendante". Toufik Hassani condamné à 6 mois de prison dont 3 fermes L'ancien policier Toufik Hassani, arrêté lors de la marche du vendredi à Alger, a comparu, hier après-midi, en citation immédiate. Un seul chef d'inculpation a été retenu contre lui : incitation à attroupement non armé. Dans son procès, ouvert à 16h, une vingtaine d'avocats se sont constitués pour sa défense. Ils ont requis de la présidente de la section correctionnelle l'examen du dossier dont ils n'avaient encore pas eu connaissance. L'audience a donc été suspendue pour 20 minutes à cet effet. Le procès a repris son cours avec l'audition de Toufik Hassani entré dans le box des accusés avec un œil au beurre noir. Il a récusé les griefs qui lui sont reprochés et a accablé les agents de la police qui l'ont brutalisé lors de son arrestation et lors de son interrogatoire. Il n'a eu le droit d'appeler un proche que durant la deuxième période de la garde à vue. Le procureur de la République a requis une année d'incarcération. Le collectif de défense a plaidé la relaxe. "Comment parler d'incitation à attroupement alors que des milliers d'Algériens sortent manifester spontanément ?", a relevé un avocat. "Sommes-nous dans la nouvelle Algérie lorsqu'un accusé se présente devant un magistrat avec des traces d'agression physique de la police à son encontre ?", a surenchéri Me Yahiaoui. Me Assoul a regretté que le parquet n'ait pas ouvert une enquête sur les violences policières. Me Bouchachi a brocardé les instances judiciaires qui "confisquent avec légèreté la liberté des citoyens. Dans les tribunaux, on n'applique plus la loi, mais on exécute des ordres". Toufik Hassani a finalement été condamné à 6 mois de prison dont 3 fermes, mais sans mandat de dépôt. Il a donc été libéré en attendant de faire appel du jugement.