Même si la tendance baissière des décès se confirme, la situation sanitaire est loin d'être totalement rassurante. Le bilan des contaminations communiqué quotidiennement montre que durant ce mois de Ramadhan, la pandémie se propage malgré le dispositif de confinement mis en place. Chaque jour, en effet, on enregistre une moyenne de 180 nouveau cas. Les décomptes dévoilés depuis le début du Ramadhan montrent que le virus continue de se propager dans plusieurs régions du pays. Les cas positifs enregistrés depuis le début du Ramadan dépassent de loin ceux enregistrés durant les deux premiers mois de l'épidémie. Sur les 7 019 cas testés positifs, 3 892 ont été recensés depuis le premier jour du Ramadhan, soit le 24 avril. Autrement dit, plus de 3 127 porteurs du virus ont été testés positifs en deux mois, soit depuis le 25 février, date d'apparition du cas zéro en Algérie. Ces données épidémiologiques établies durant ces 25 premiers jours du Ramadhan montrent que les foyers de transmission ne sont pas circonscrits aux seules wilayas de Blida et d'Alger. À présent, le nombre de "réservoirs" régionaux de contamination ne cesse d'augmenter. Pour preuve, la circulation du virus est désormais nationale. Même la wilaya de Tindouf, qui a résisté pendant plus de deux mois, a recensé ses premiers cas de Covid-19. Pour le Pr Soufiane Ali Halassa, pneumologue au CHU Issad-Hassani de Beni Messous, le renforcement du dispositif de confinement durant les deux jours de fête de l'Aïd s'avère plus qu'urgent. "Au vu des bilans enregistrés, il est nécessaire de procéder au renforcement de la mesure de confinement durant les jours de l'Aïd. Les derniers chiffres de contagion confirment qu'on n'arrive pas à infléchir la tendance. On continue à avoir des cas. L'Aïd se veut une occasion de retrouvailles entre les familles, d'où le risque des contamination", alertera le Pr Ali Halassa. L'autre indicateur qui plaide pour le passage au couvre-feu national durant l'Aïd est le bilan des personnes mises sous traitement spécifique. Jusqu'à hier, le nombre de patients ayant bénéficié du traitement à base d'hydroxychloroquine associée à l'antibiotique azithromycine, s'élevait à 11 472, soit 4 651 cas de plus par rapport au décompte des cas confirmés par PCR. Ce décalage s'explique par l'urgence de prendre en charge les patients suspects sans attendre la confirmation par PCR, puisque leur tableau clinique plaide pour la prescription du traitement spécifique. Les médecins rappellent d'ailleurs que le taux de fiabilité par test biologique ne dépasse guère les 70%, autrement dit 30% des patients contrôlés par PCR sont des faux négatifs. C'est ainsi que les autorités sanitaires ont introduit la méthode de confirmation par scanner. Pour le Pr Targhit-Mahi Samia, chef de service des maladies respiratoires au CHU Mustapha-Pacha, "le renforcement du dispositif du confinement durant l'Aïd est l'unique rempart possible pour empêcher l'accélération du virus en ces moments de grandes retrouvailles familiales. Le confinement total est plus que nécessaire pour justement étaler le nombre de malades dans le temps. La mise en quarantaine totale va nous éviter que les hôpitaux soient débordés après la fête où l'épidémie risque de connaître une flambée". Même si le ministère des Affaires religieuses alerte sur la base d'une fetwa promulguée par la commission compétente, qu'il "n'est pas permis de faire des visites familiales durant l'Aïd el-Fitr tout en privilégiant les moyens de communication pour échanger les vœux". Un "couvre-feu national" dûment décrété par les hautes autorités du pays semble être le seul rempart possible contre le Covid-19 durant cette fête religieuse. Hanafi H.