Comme Illizi, Tindouf ou encore Saïda, Tamanrasset vivait, ce vendredi, son dernier jour de confinement. Mais il faut "rester encore vigilants" rappelle Imad, pharmacien qui ressent plus d'appréhension quant à cette remise en mouvement qui risque, selon lui, d'exposer la capitale de l'Ahaggar à une flambée de l'épidémie de coronavirus. C'est d'ailleurs un avis partagé avec de nombreux concitoyens qui estiment avoir atteint l'apogée de l'incohérence en accordant plus de liberté de circuler à une wilaya promise aux mille et un périls. Cette tonalité ne s'oppose guère aux inquiétudes de Mustapha, activiste de la société civile, qui estime, à son tour, que le déconfinement est un non-événement à Tamanrasset. "À dire vrai, il n'y a pas eu de confinement pour parler de sa levée. C'était juste une formalité. Pendant 57 jours de confinement partiel, la vie était normale, comme si de rien n'était. Les gens circulaient librement même la nuit, notamment durant le mois de Ramadhan. D'aucuns se sont même permis de faire discrètement leurs prières surérogatoires sans qu'ils soient inquiétés par les sirènes des patrouilles de police qui sillonnaient leurs quartiers", a-t-il ajouté. Toutefois, les statistiques sécuritaires faisant état de la mise en fourrière de 341 véhicules et 42 motocyclettes et l'arrestation de 523 contrevenants durant les 20 premiers jours suivant la mise en œuvre du confinement partiel, se proposent comme un démenti à ces allégations. Sauf que les déclarations faites par de nombreuses personnes interrogées à cet effet convergent avec la version de notre activiste qui se veut alarmiste quant à la menace sanitaire qui pèse sur la région. Pour Ouksem Melloul, membre du bureau local de l'académie de la société civile, le pire est à craindre. "Eu égard aux scènes de cohue et d'incivisme enregistrées quotidiennement dans les différents marchés et lieux publics, on risque de retourner à la case départ", s'alarme-t-il, en faisant savoir qu'il a été procédé récemment à l'affectation de quatre volontaires dans chaque bureau de poste pour tenter de sensibiliser et d'organiser les flux de clients d'Algérie Poste, en vain. "Ils ne respectent ni les mesures de distanciation ni le port de masques pourtant obligatoires. Céans, les gens ignorent royalement les mesures sanitaires » regrette-t-il. Lui emboîtant le pas, son collègue, Moussa précise que leur action, ciblant les personnes vulnérables dont les retraités et les handicapés, leur a permis d'arrêter un constat qui en dit long sur la défaillance des autorités en matière de sensibilisation et de prévention, mais surtout sur l'insouciance de citoyens par manque de civisme et de responsabilité. Au sujet du déconfinement qui a pris effet, hier samedi, notre interlocuteur estime que "la décision est en parfaite contradiction avec la donne sanitaire à Tamanrasset. Le déconfinement a été annoncé sur fond de crainte que la courbe épidémiologique liée au Covid-19 reprenne son ascension dans la wilaya. Les statistiques n'augurent rien de bon. Les cas confirmés qui étaient de 5 ont doublé cette semaine pour atteindre 10 au total. Ce n'est pas la levée d'un confinement jamais respecté qui va donc nous rassurer". Au marché communal du centre-ville, il nous a été donné de constater un samedi qui n'a rien de particulier comparativement aux précédents jours de la semaine. L'affluence excessive allant jusqu'aux bousculades est l'image qui s'offre aux yeux des citoyens qui s'y rendent. À première vue, ces derniers semblent plutôt préoccupés par la mercuriale qui s'affole davantage que par le port d'une bavette dont le prix est deux fois plus cher que celui d'un kilogramme de pomme de terre, ironise un marchand qui, grâce à son sens de l'humour, a réussi à détourner notre question sur le déconfinement pour parler des commerçants sinistrés et s'interroger de leur triste sort en cette période de crise qui risque de durer encore dans le temps. À ce propos le wali, Djilali Doumi, était clair. Il a déclaré hier à la presse que "la levée du confinement concerne uniquement le mouvement des personnes et des véhicules pour le moment. Les dispositions relatives au gel de certaines activités commerciales et la fermeture des lieux de culte sont toujours en vigueur et applicables jusqu'à nouvel ordre". RABAH KARECHE