Les enquêtes épidémiologiques déclenchées après la fête de l'Aïd dans les wilayas font ressortir le non-respect des règles barrières de prévention et de protection, notamment dans certaines wilayas. Faut-il s'inquiéter de l'augmentation du nombre des contaminations à la Covid-19, enregistrées ces derniers jours en Algérie ? Le Comité scientifique signale avec inquiétude une évolution épidémique à trois chiffres, soit au-dessus de la barre de 100, malgré le fait que la courbe graphique des décès confirme sa tendance baissière à un palier qui ne dépasse guère 10 morts par jour. Les soldats aux blouses blanches sur le front de la lutte avertissent que cette nouvelle situation épidémiologique est une résultante directe du relâchement et du non-respect du confinement notamment durant les deux jours de l'Aïd. La carte épidémiologique des trois derniers jours montre encore que le risque d'un retour à la case départ reste élevé. Le virus invisible continue de circuler "librement" notamment dans les wilayas dites "réservoirs" de contagion. Après avoir baissé au-dessous de la barre de 100 cas par jour, la courbe de contagion repart, semble-t-il, de plus belle en atteignant successivement les 117, 102, 105 et, hier, 109 cas. Ces chiffres sont loin d'être rassurants. L'augmentation "rapide" du nombre de porteurs de coronavirus est signalée dans les dix premières wilayas dont le nombre de contaminations dépasse les 60% du taux national d'atteinte à l'infection. Les wilayas de Blida, d'Alger, de Sétif, d'Oran, de Constantine, d'Aïn Defla, de Tipasa, de Bejaïa, d'Ouargla et de Tlemcen cumulent jusqu'à jeudi soir 6 154 cas positifs, soit plus de la moitié des cas confirmés par PCR à la Covid-19. Ce constat désolant intervient au moment où le pays est en train de déconfiner graduellement depuis une semaine. Pas moins de 25 activités commerciales, de services et de BTPH sont déconfinées depuis dimanche dernier. Selon la feuille de route du gouvernement Djerad, la deuxième phase de sortie de confinement devra intervenir demain dimanche, où les activités encore "mise en pause" devraient être libérées, notamment la restauration et les transports en commun qui nécessitent des protocoles sanitaires un peu plus particuliers. Les enquêtes épidémiologiques déclenchées après la fête de l'Aïd dans des wilayas dites "réservoirs de reproduction de virus" ont fait ressortir l'absence totale d'éducation sanitaire et le non-respect des règles barrières de prévention et de protection. Ces investigations ont conclu aussi que le taux de contamination au coronavirus qui touche des familles entières reste encore important. "Des enquêteurs ont mené, en fait, des investigations dans des wilayas qui recensent un nombre important de contaminations, à l'image de Médéa, de Ghardaïa, d'Oran et d'Ouargla qui talonnent les wilayas de Blida, d'Alger et de Sétif selon le tableau national de répartition des contagions. La wilaya d'Ouargla qui est en 9e position avec plus de 300 cas est en train de pulvériser depuis une semaine le nombre de contamination. Cette région du Sud connaît un flux de va et vient important pour des raisons économiques", affirment nos sources. Non-respect des mesures de prévention Si bien qu'à première vue, les variations du nombre quotidien de porteurs du virus semblent liées à l'augmentation du nombre de tests réalisés après l'amélioration des outils de diagnostic. Mais en observant la réalité de la prévention dans la rue et les espaces publics, il semble que rien n'a été respecté au point ou les patients se bousculent devant les hôpitaux. Selon des sources concordantes, le taux de remplissage des structures hospitalières qui était à moins de 30% à l'échelle nationale avant l'Aïd a atteint le seuil limite "de surcharge" dans certaines wilayas. Le cas de la wilaya de Sétif qui occupe la troisième place avec plus de 700 porteurs de virus confirmés est édifiant. L'hospitalisation de nouveaux cas positifs est devenue difficile, et ce, depuis trois jours. Selon des sources locales, les quatre services dédiés à la Covid-19 au CHU Sâadna-Abdenour de Sétif sont débordés de malades. Des patients confirmés positifs sont renvoyés à la maison faute de place. "Des patients confirmés dont l'atteinte des poumons oscille entre 50 et 80% n'y ont pas été admis faute de lits", nous confient des sources locales à Sétif. Et d'ajouter que "la cellule de consultation Covid-19 a ausculté pas moins de 140 patients de la nuit de jeudi à vendredi. Dix malades confirmés à la Covid-19 par imagerie dont le taux de lésion était de 70% n'ont pas été hospitalisés en raison du manque criard de lits". Pour le Pr Moumeni Abdelhak chef du service de pneumologie au CHU de Sétif, "la situation est alarmante à Sétif. Nous sommes dans le rouge. Les lits réservés à la Covid-19 sont tous pris. Les services sont pleins. On n'arrive plus à répondre aux besoins des patients". Notre interlocuteur ne manquera pas de mettre le doigt sur certaines insuffisances liées aux conditions de travail. "Il y a une pénurie de kits de dépistage. Nous manquons aussi de tenues de protection. Il ne faut pas perdre de vue que la wilaya de Sétif ne dispose pas d'un laboratoire. Les prélèvements sont acheminés à Constantine, Batna et même vers Alger".