Ali Yahia Abdenour plaide plutôt pour une conférence nationale sur la paix. La direction de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (Laddh) rejette le principe de paix sans justice tel que défendu par le président de la République à travers sa charte pour la réconciliation nationale et la paix. Dans une conférence de presse, animée hier matin au siège de son organisation, Ali Yahia Abdenour a déclaré que “les droits de l'Homme et la paix sans indissociables. Si on les sépare, on n'arrive à aucun résultat probant. C'est ce qui se passe actuellement”. En clair, pour le président de la Laddh, le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, met la charrue avant les bœufs, en ce sens qu'il escompte restaurer la paix en décrétant une amnistie au profit des terroristes, alors que cette démarche devrait intervenir comme un prolongement du retour au calme et à la sérénité sociale. “Le président de la République propose une solution sécuritaire que nous avons déjà expérimentée avec la loi sur la rahma et celle sur la concorde civile”, a précisé le porte-parole de la Conférence de Sant'Egidio (1997). Il a rappelé que des auteurs avérés d'attentats ont été lavés de leurs crimes en vertu des dispositions du décret présidentiel portant grâce amnistiante. “Que nous propose-t-on donc de nouveau aujourd'hui ?” s'est-il interrogé tout en soulignant que des initiatives similaires ont déjà montré leurs failles. À ce titre, le conférencier a affirmé que chaque année, depuis l'expiration du délai de mise en vigueur de la loi portant rétablissement de la concorde civile le 13 janvier 2000, entre 850 et 1 250 Algériens meurent, chaque année, des causes du terrorisme. Ali Yahia Abdenour reproche surtout au premier magistrat du pays de donner l'impression de prêcher la parole suprême et surtout de fermer le champ de l'expression aux opposants à sa démarche. “Le pouvoir considère les Algériens comme des mineurs qui n'ont pas le droit de suivre un débat contradictoire à la télévision.” Il a saisi l'occasion pour attirer l'attention ses les dangers du référendum du 29 septembre prochain, apparenté, de son avis, à un plébiscite. “Un référendum, organisé par des démocrates pour un objectif démocratique, consolide la cohésion sociale. Un plébiscite ne résout rien, à part donner plus de pouvoir au pouvoir.” Sur un ton virulent, il a critiqué le matraquage du peuple par des discours qu'il a qualifiés de “violents”. “Les déclarations du président Bouteflika (lors de la campagne référendaire, ndlr) constituent une offense aux droits de l'Homme”, a-t-il asséné. Le président de la Laddh a expliqué qu'il n'est nullement contre la paix ni contre la réconciliation nationale. Il a estimé, néanmoins, que l'Algérie ne peut faire le deuil du drame qu'elle a vécu sans se plier, au préalable, au devoir de vérité et de justice. “Tous ceux qui ont commis des crimes, y compris les militaires, les gendarmes, les policiers et les éléments des GLD doivent payer pour ce qu'ils ont fait.” Il a soutenu, en outre, que la réconciliation nationale est un processus de longue haleine. Elle doit se réaliser dans un environnement approprié. Il a plaidé alors pour la levée de l'état d'urgence, la réforme de l'Etat et du système politique et évidemment le respect absolu des droits humains. Pour les responsables de la Laddh, les autorités devraient organiser “une conférence nationale sur la paix”, à laquelle participeront tous les acteurs politiques et sociaux. La direction de la Laddh a annoncé, lors de la conférence de presse, la tenue de son congrès les 22 et 23 septembre prochain à Boumerdès. S. H.