Deux mois après sa remise en liberté provisoire, Karim Tabbou, figure emblématique du mouvement populaire, se retrouve aujourd'hui devant le prétoire du tribunal de Koléa, ville sise à une cinquantaine de kilomètres à l'ouest d'Alger, pour comparaître dans une autre affaire dans laquelle il avait été arrêté le 11 septembre 2019 avant d'être libéré deux semaines plus tard. Dans cette affaire, Karim Tabbou est poursuivi, selon l'ordonnance de renvoi, en vertu des articles 74 et 79 du code pénal. "Est puni de réclusion à temps, de cinq à dix ans, quiconque, en temps de paix, en vue de nuire à la défense nationale, a entravé la circulation de matériel militaire ou a, par quelque moyen que ce soit, provoqué, facilité ou organisé une action violente ou concertée ayant ces entraves pour but ou pour résultat", dispose l'article 74, tandis que l'article 79 stipule que "quiconque (...) a entrepris, par quelque moyen que ce soit, de porter atteinte à l'intégrité du territoire national, est puni d'un emprisonnement d'un à dix ans et d'une amende de 3 000 à 70 000 DA. Il peut en outre être privé des droits visés à l'article 14 (droits civiques et politiques et exclusion de tout emploi supérieur, du parti ou de l'Etat, etc.". En d'autres termes, le responsable de l'UDS (parti non encore agréé) est poursuivi pour "atteinte au moral de l'armée" et "atteinte à l'intégrité du territoire", des griefs liés à des déclarations qu'il aurait tenues le 8 mai 2019, lors d'un meeting populaire à Kherrata, petite ville située à une soixantaine de kilomètres au sud-est de Béjaïa. Arrêté près de son domicile à Douéra, sur les hauteurs d'Alger, la veille de la convocation du corps électoral pour l'élection présidentielle que le défunt chef d'état-major avait évoqué quelques jours plus tôt, Karim Tabbou est placé en détention provisoire sur ordonnance du juge d'instruction au terme d'une garde à vue de 24 heures. Mais la chambre d'accusation de la Cour de Tipasa décide, à la surprise générale, d'annuler deux semaines plus tard la décision du juge d'instruction et de le remettre en liberté. Mais pour une courte durée, puisque le lendemain, il sera arrêté de nouveau et emprisonné. Condamné à une année de prison dont six mois fermes lors d'un procès le 11 mars dernier, Karim Tabbou voit sa peine aggravée lors d'un procès en appel le 24 mars, soit la veille de sa libération, que d'aucuns avaient qualifié alors de "scandaleux". Mais début juillet, à la veille de la célébration de la Fête de l'indépendance, il sera remis en liberté à la demande de ses avocats. Du reste, selon certains avocats, le procès prévu aujourd'hui risque d'être reporté. Compte tenu des chefs d'inculpation retenus contre lui, Karim Tabbou encourt jusqu'à dix ans de prison et risque d'être déchu de ses droits politiques et civiques pour une période ne dépassant pas cinq ans. La veille de ce procès, son frère a dénoncé sur son compte Facebook le "harcèlement" qui vise un militant des libertés.