En détention préventive depuis le 4 novembre 2019, l'ex-ministre de la Culture, Khalida Toumi, estime que son maintien en prison est "illégal". Le collectif de défense de l'ancienne ministre de la Culture a rendu publique, hier, la lettre adressée au chef de l'Etat, Abdelmadjid Tebboune, le 29 août dernier, l'appelant à préserver les droits de la prisonnière, après épuisement de toutes les voies de recours judiciaire. Pour rappel, celle qui a géré le portefeuille de la Culture de 2002 à 2014, sous la présidence d'Abdelaziz Bouteflika, est accusée de "dilapidation volontaire de deniers publics", "attribution volontaire d'avantages injustifiés lors de passation de marchés publics" et "abus de fonction en accomplissant un acte en violation de la loi et des règlements" dans le cadre de l'organisation des manifestations "le Festival panafricain en 2009" et "Tlemcen, capitale de la culture islamique en 2011". Autant de griefs qui entrent, selon le code de procédure pénale, dans le cadre d'un délit dont la détention préventive ne doit pas excéder 8 mois, affirme sa défense qui appelle à sa libération. "Il est regrettable que le conseiller instructeur de la Cour suprême ait agi en violation de l'article 125 du code de procédure pénale. Il aurait dû gérer et clôturer le dossier dans les délais prescrits. En cas d'impossibilité pour motifs sérieux, il aurait été dans l'obligation de libérer Khalida Toumi et de recourir aux alternatives ouvertes par le code de procédure pénale, notamment la mise sous contrôle judiciaire. À moins qu'elle ne soit détenue pour un motif autre que celui pour lequel elle a été mise en détention provisoire", lit-on dans la requête d'arbitrage, dans laquelle il est rappelé que l'ancienne ministre est en détention abusive depuis le 4 juillet dernier, sans être entendue dans le fond de l'affaire. La défense de Khalida Toumi tente d'expliciter, au mieux, sa démarche en ces termes : "Nous sollicitons votre intervention pour garantir son droit à la libération. Cette intervention ne saurait en aucun cas être interprétée comme une interférence dans le fonctionnement de la justice, car elle ne touche pas le fond de l'instruction, ni sur les accusations portées, mais concerne le respect de la loi et la concrétisation de la crédibilité des actes de l'administration de la justice." Concernant le contenu du dossier, le collectif de défense de l'ex-ministre composé de Mes Boudjema Ghechir, Miloud Brahimi, Fatiha Chelouch et Anouar Tassabasset demande au chef de l'Etat de prendre en compte le contexte et les circonstances sociales et politiques de l'époque. "Vous n'ignoriez sans doute pas monsieur le Président que les manifestations d'Alger, capitale de la culture arabe, le Festival panafricain et Tlemcen, capitale de la culture islamique ne sont pas des événements ordinaires et que les aspects politiques, de propagande de l'image de marque de l'Etat sont prédominants. En conséquence, les voies et moyens de réalisation et concrétisation de ces éléments diffèrent de la gestion ordinaire." Et de préciser : "Les enquêteurs de la Police judiciaire ainsi que certaines structures chargées du contrôle financier n'ont pas assimilé cette donnée et cette particularité fondamentale. Le Premier ministre est même intervenu pour dépasser les écueils administratifs qui bloquaient la réalisation de ces manifestations." Dans leur plaidoyer, les avocats de l'ex-ministre de la Culture n'omettent pas de charger le président déchu Abdelaziz Bouteflika. "Le dossier de Khalida Toumi est vide de toute accusation, de détournement, de corruption, d'enrichissement illicite ou d'octroi d'avantages au profit des parents. Les faits reprochés concernent la gestion d'événements ayant un aspect spécifique, se déroulant sous l'égide et le parrainage du président de la République qui a une méthode particulière de gestion et de gouvernance", précisent ses avocats. Selon eux, les irrégularités constatées lors de l'organisation des trois événements culturels, objets d'investigations judiciaires, "ont été enregistrées au niveau des institutions chargées de l'exécution des activités". "Ces institutions étaient, certes, en relation avec le ministère de la Culture, mais étaient, néanmoins, indépendantes et avaient leurs structures de contrôle. C'est, d'ailleurs, ce qui est précisé dans leurs statuts et règlements", argumente-t-on.