Dans une déclaration rendue publique, hier, la délégation de l'interwilayas a qualifié les propos du chef de l'Etat de “déclarations provocatrices, calomnieuses et semant la division”. Tout en interpellant le Président sur cette “volte-face”, les archs exigent le respect de l'accord global signé avec le Chef du gouvernement en janvier dernier. Le discours prononcé, jeudi dernier, à Constantine par Bouteflika qui a déclaré que “dans l'intérêt de l'Algérie, l'arabe demeurera la seule langue officielle”, faisant allusion à la non-officialisation de tamazight, n'a pas laissé indifférents les délégués des archs dialoguistes qui ont rendu publique, hier, une déclaration à travers laquelle ils interpellent le chef de l'Etat sur ce qu'ils qualifient “d'une insensée volte-face qui est de nature même à miner les fondements de la nation et à hypothéquer son avenir”. La coordination de l'interwilayas des archs, qui a convoqué une réunion extraordinaire, hier, à Alger, ne voit dans le discours du chef de l'Etat à Constantine que “de graves déclarations provocatrices, calomnieuses et semant la division et la haine”. “Le jamais récurrent du chef de l'Etat quant à l'officialisation de tamazight est non seulement en violation des engagements de l'Etat du 15 janvier 2005, mais, plus grave encore, il met en péril l'unité de la nation algérienne”, lit-on encore dans ce document. L'argumentaire sur lequel s'est appuyé le chef de l'Etat qui a déclaré qu'“il n'y aucun pays au monde possédant deux langues officielles, et il ne sera donc jamais le cas de l'Algérie où la seule langue officielle est l'arabe” est, selon la délégation du mouvement citoyen, “insensé et truffé de contrevérités”. Pour contredire le chef de l'Etat sur ce point, les membres de la délégation citent comme exemple édifiant “l'Afrique du Sud avec ses onze langues officielles”. Dans leur déclaration, les membres de cette délégation qui a entamé les négociations avec le Chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, depuis janvier 2005, ajoutent également que “l'amazighité est un ciment pour l'unité nationale et non un facteur de division” et que, contrairement à ce qu'a déclaré Bouteflika, “son officialisation sert les intérêts de l'Algérie plurielle et démocratique et renforce le pays dans sa sphère géostratégique authentique et naturelle”. Les archs qui attendaient, presque sûrs, l'annonce de la décision historique de l'officialisation de tamazight s'interrogent à présent “à quel type de pressions obéit ce revirement ?” Et aussi “si l'intérêt de l'Algérie réside dans la reconnaissance de la réalité de la nation ou dans le reniement de tamazight déjà constitutionnalisé au prix de hautes luttes et de lourds sacrifices”. Et la question cruciale reste sans doute celle de la suite qui sera réservée au dialogue entre les archs et le Chef du gouvernement maintenant que toute éventualité de voir satisfaite cette revendication phare de la Kabylie est écartée. En tout cas, si l'on se réfère aux discours connus, pour les archs, il reste peu de chance au dialogue car pour eux, la satisfaction des autres revendications contenues dans la plate-forme d'El-Kseur ne vaut rien sans la satisfaction du point 8, à savoir l'officialisation de tamazight. Mais pour le moment, les archs se contentent de réaffirmer leur détermination à faire aboutir pacifiquement les revendications et ne pas céder sur cette revendication portée par plusieurs générations. Tout en rappelant les efforts fournis pour le règlement définitif de la crise de Kabylie, les archs exigent le respect de l'accord global signé le 15 janvier 2005 tout en prenant à témoin l'opinion nationale et internationale quant à un éventuel retour à la protestation. À travers les déclarations des uns et des autres, il ressort clairement que la réconciliation entre le pouvoir et la Kabylie n'est pas pour demain. La lumière aussi. SAMIR LESLOUS