À l'optimisme toutefois mesuré de la mission de la Cédéao, les Maliens opposent une appréciation peu reluisante de la transition menée par les militaires, accusés de mettre en place un "régime autocratique". La mission de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), dirigée par l'ancien président nigérian Goodluck Jonathan, a dressé un constat mitigé empreint d'inquiétudes sur la transition au Mali, après deux jours de concertation (lundi et mardi) avec les parties maliennes à Bamako. "La Cédéao est un peu préoccupée par le temps que cela prend" pour mener ce processus, a dit Goodluck Jonathan, notant une "insuffisance" dans les consultations menées par les militaires, à l'origine du putsch contre l'ancien président Ibrahim Boubacar Keïta, le 18 août dernier, sur fond de contestation sociale et politique de l'opposition qui avait duré plus de deux mois. Tout en affichant son optimisme et son "intime conviction que les 14 mois restants suffiront à l'équipe de transition pour accomplir tout ce qui est attendu" d'elle, "la mission de la Cédéao a appelé au respect de la période de transition fixée à 18 mois", soulignant que "le processus de transition devra déboucher sur des élections crédibles et transparentes". M. Jonathan a exigé que le Conseil national de salut du peuple (CNSP) formé par les militaires soit "formellement dissous", selon le communiqué final publié à l'issue de cette mission. Le principal mouvement de contestation contre l'ancien président IBK s'est montré lui aussi très critique vis-à-vis de la junte qui a quasiment fermé le jeu, en s'imposant carrément en acteur principal de cette transition. Il y a une "inacceptable mise en place rampante d'un régime autocratique", a d'ailleurs dénoncé Choguel Kokalla Maïga, un des leaders du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), dirigé par l'influent imam Mahmoud Dicko, regrettant que cette coalition de l'opposition n'ait pas été écoutée par la Cédéao depuis le putsch du 18 août. Pour lui, l'engagement pris par les militaires n'a pas été respecté, affichant ses doutes sur la tenue des élections dans les délais fixés par la Cédéao et quant à leurs transparence et crédibilité. Le M5-RFP n'a pas cessé de critiquer son exclusion par la junte, qui semble vouloir diminuer du poids de ce mouvement, le seul à pouvoir peser dans la rue depuis les législatives du printemps dernier et qui étaient le point de départ des manifestations ayant conduit à la chute d'IBK. C'est que n'a pas manqué de souligner M. Maïga qui affirme qu'un "processus non inclusif de révision de la constitution est en cours". "Pour ce qui nous concerne, nous n'insisterons pas sur ce qui aurait dû se passer pendant les mois écoulés ou sur les manquements par rapport aux engagements pris dans le cadre de la Charte et de la Feuille de route de la transition", a déclaré, pour sa part, Tiébilé Dramé, chef de file du Parti pour la renaissance nationale (Parena), à l'adresse de M. Jonathan, affichant, lui aussi, son inquiétude par rapport au respect par l'armée des délais pour la tenue des élections et de la révision de la Constitution, a rapporté la presse malienne.