La demande de mise en liberté provisoire a été refusée au général à la retraite, en détention préventive depuis vingt mois. Hier pour la troisième fois en un mois, des proches et des partisans d'Ali Ghediri se sont rassemblés devant la cour d'appel d'Alger, guettant des nouvelles sur le sort réservé par la justice au général à la retraite. Les espoirs, nourris pendant une attente de plusieurs heures, ont été déçus. La chambre d'accusation a tranché dans le dossier, à contresens de ce que suggérait la décision de la Cour suprême rendue le 13 décembre 2020. Elle a, ainsi renvoyé l'affaire devant la chambre criminelle près le tribunal de Dar El-Beïda et a rejeté la demande de mise en liberté conditionnelle. L'ancien directeur des ressources humaines au ministère de la Défense nationale ne quittera donc pas sa cellule de la prison de Koléa. Des membres de son comité de soutien et de sa famille, qui se préparaient à l'accueillir à sa sortie du pénitencier, se disent effondrés. "Nous ne comprenons rien à ce qui arrive", s'exclame, consterné, Yazid Rebouh, un de ses proches collaborateurs. L'entourage autant que les avocats envisageaient effectivement une issue de la procédure judiciaire nettement différente. Ils pensaient que la chambre d'accusation près la cour d'Alger allait prononcer un non-lieu sur l'unique accusation maintenue dans le dossier, soit la "participation à une entreprise visant la démoralisation des troupes de l'ANP en temps de paix". La décision de la Cour suprême, en faveur du pourvoi en cassation interjeté par le collectif de défense contre l'arrêt de renvoi de la chambre d'accusation près la cour d'Alger, confortait raisonnablement cette hypothèse. La haute juridiction avait estimé que la chambre d'accusation a outrepassé ses prérogatives en portant un jugement sur la culpabilité du prévenu avant le procès. Elle a renvoyé l'affaire, pour réexamen, devant la même instance autrement constituée. Cette dernière a auditionné Ali Ghediri, le 8 février, entendu les plaidoiries des avocats et mis l'affaire en délibéré pour ce 21 février. Le timing a coïncidé, à 72 heures d'intervalle, avec l'exécution de la mesure prise par le chef de l'Etat, en l'occurrence grâce présidentielle en faveur de 33 détenus d'opinion condamnés définitivement et liberté provisoire pour une cinquantaine d'autres dont les jugements définitifs ne sont pas encore prononcés. La libération du journaliste Khaled Drareni et des activistes Rachid Nekkaz, Brahim Laâlami, Dalila Touat... et tant d'autres militants incarcérés pour leurs idées, leurs opinions et parfois dans l'exercice de leur métier, augurait un sort pareil pour le général à la retraite. Il n'en fut rien. "Il n'y a absolument rien pour justifier un procès. Le dossier est vide. L'accusation a été montée sous l'effet d'un règlement de comptes", nous déclare Me Nabila Silmi, membre du collectif de la défense. Une déclaration de l'ancien candidat à l'élection présidentielle avortée du 18 avril 2019 sur le rôle que devrait jouer l'armée pour empêcher le cinquième mandat aurait provoqué l'ire du défunt général de corps d'armée Ahmed Gaïd Salah. Outre l'atteinte au moral des troupes, deux autres chefs d'inculpation sont retenus contre Ali Ghediri : "participation à la fourniture d'informations au profit de pays étrangers en portant atteinte à l'économie nationale" et "faux et usage de faux dans la collecte de parrainages de candidature à la présidentielle". Ces deux charges ont été abandonnées en cours de procédure. Il est en détention préventive depuis vingt mois. Il risque d'y rester jusqu'à septembre ou octobre prochain. Son procès ne pourrait être programmé, nous dit son avocate, avant l'ouverture de la session criminelle d'automne. Elle n'écarte pas non plus la possibilité que son mandant, attaché à la proclamation de son innocence avant le procès, opte pour un pourvoi en cassation de la décision de la chambre d'accusation.