Un choix de cible qui ne serait pas fortuit, selon eux, mais qui obéirait plutôt "à une volonté qui consiste à vider le Hirak de ses forces organisées de ses cadres et des corps intermédiaires". Réagissant à la dernière vague d'arrestations des activistes du Hirak depuis le début de ce mois d'avril, des collectifs d'universitaires et d'intellectuels et les comités de défense des droits humains et des libertés lancent un appel à la mobilisation pour la libération de tous les détenus d'opinion. Dans une déclaration rendue publique ce lundi, la Coordination nationale des universitaires algériens pour le changement (Cnuac), le Comité national pour la libération des détenus (CNLD), le Comité algérien contre la torture et les conditions carcérales inhumaines (CACTCCI) et le Collectif pour la libération des détenus d'opinion et le respect des libertés démocratiques (Coldorel) ont estimé que "seule la mobilisation paye" et qu'à ce titre il s'agira de "faire barrage à la politique périlleuse et aventureuse du régime visant à réprimer tous azimuts, en particulier les jeunes des quartiers, et à détacher les élites du mouvement populaire". Sous l'intitulé "Basta ! Cessez la répression et libérez les détenus !", ces derniers ont estimé que "le régime s'enfonce dans son aveuglement à vouloir en finir avec le mouvement populaire, le Hirak. Il redouble de férocité en ciblant ces derniers jours les éléments actifs du Hirak parmi les universitaires et les cadres du milieu associatif". En ce sens, le cas de l'universitaire Mahana Abdesselam, professeur de physique nucléaire à l'USTHB et membre du Cnuac, arrêté vendredi passé à Alger alors qu'il prenait part à la marche hebdomadaire du Hirak, est mis en avant par les signataires de la déclaration : "L'universitaire Mahana Abdesselam, le militant engagé de la démocratie et le scientifique rigoureux, devrait être présenté ce lundi 19 avril devant le procureur, mais sa comparution est reportée à une date ultérieure." Et il en est de même pour d'autres : "La vague d'arrestations arbitraires s'est étendue pour toucher Nacer Meghnine, président de l'association SOS Bab El-Oued, Karim Athmane et son ami youtubeur Bilal Chache, connu sous le nom de Bilal Nouni, ainsi que Kamel Derriche et Mourad Khoudja. Ces cinq interpellés ont vu leur garde à vue prolongée pour être présentés aujourd'hui devant le procureur de Sidi M'hamed." Un choix de cible qui ne serait pas fortuit, selon eux, mais qui obéirait plutôt "à une volonté qui consiste à vider le Hirak de ses forces organisées de ses cadres et des corps intermédiaires". Ils y décèlent aussi des tentatives de vouloir dévier le Hirak de l'un de ses principes cardinaux, sa "silmiya" (son caractère pacifique, ndlr). Les signataires de la déclaration vont plus loin en estimant que le dernier communiqué du Haut-Conseil de sécurité (HCS) a donné les contours de cette ligne stratégique qui consisterait "à désigner le Hirak comme ennemi, 'sous l'emprise à la fois des séparatistes et des terroristes'. Cette stratégie du pire a déjà échoué". Et, hasard du calendrier, ils estiment enfin qu'en recourant aux interpellations intempestives, "le régime veut attirer le Hirak sur son terrain favori, celui de l'affrontement, de l'émeute et de la culture de la violence. N'oublions pas Massinissa Guermah, assassiné le 18 avril 2001, et les 128 victimes du Printemps noir. Cette répression qui perdure est une forme de chantage que ce régime tente d'exercer sur la société pour passer son coup de force et imposer ses élections législatives le 12 juin prochain". Kamel Ghimouze