Le porte-parole du HCDH a appelé, hier lors d'une conférence de presse, les autorités algériennes à cesser la violence contre des manifestants pacifiques. Deux mois après avoir exprimé sa préoccupation devant la détérioration de la situation des droits de l'Homme en Algérie, l'ONU revient à la charge pour interpeller de nouveau le gouvernement algérien sur la violation continue des droits fondamentaux et la répression infligée aux hirakistes. "Nous demandons instamment aux autorités algériennes de cesser de recourir à la violence pour disperser les manifestations pacifiques et de mettre fin aux arrestations arbitraires et détention de personnes ayant exercé leurs droits à la liberté d'opinion, d'expression et de réunion pacifique", a ainsi exhorté Rupert Colville, porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme, lors d'un point de presse animé hier à Genève. Le porte-parole du HCDH a indiqué que depuis la reprise des marches du Hirak en février dernier l'instance onusienne a reçu des rapports "faisant état de l'usage inutile et disproportionné de la force contre des manifestants pacifiques, ainsi que d'arrestations continues". Ruppert Colville a relevé qu'entre avril et mai des marches d'étudiants ont été empêchées à quatre reprises et des centaines de manifestants – ou toute personne suspectée de participer au mouvement – ont été arbitrairement arrêtés. "Certains manifestants auraient été détenus puis relâchés après avoir été contraints de signer un document promettant de ne plus participer aux manifestations", a encore souligné le porte-parole du HCDH, en déplorant que "(...) des militants, des défenseurs des droits humains, des étudiants, des journalistes, des blogueurs et de simples citoyens exprimant pacifiquement leur désaccord ont continué à faire l'objet de poursuites pénales", même après l'annonce d'une "grâce présidentielle" en février. Ruppert Colville a ainsi appelé les autorités algériennes à cesser la violence contre des manifestants pacifiques, mais également à mener des "enquêtes rapides, impartiales et efficaces" sur toutes les allégations de violations de droits de l'Homme et à garantir aux victimes présumées un recours. Les inquiétudes de l'ONU font écho à l'appel lancé, début mai, par quelque 300 personnalités, militants et ONG, dénonçant "l'offensive sécuritaire et judiciaire" contre des citoyens pacifiques, qui prend des allures de "guerre déclarée contre le peuple algérien". Les signataires, qui ont relevé que la répression s'est accrue à l'approche des élections législatives controversées de juin prochain, avertissent contre "la criminalisation du Hirak" qui "risque de conduire sur une pente vers les crimes d'Etat" et réclament la libération des prisonniers politiques, l'arrêt des poursuites judiciaires contre les opposants et les activistes du Hirak et le rétablissement des libertés constitutionnelles. La sortie du Haut-Commissariat de l'ONU intervient alors que le ministère de l'Intérieur tente de soumettre l'organisation des marches populaires à une déclaration auprès des autorités. L'identité des organisateurs (d'un mouvement sans leaders identifiés), les horaires des marches, l'itinéraire prévu et les slogans devront désormais être communiqués aux structures compétentes sous peine d'interdiction, a en effet averti le ministère dans un communiqué rendu public dimanche dernier. Une nouvelle preuve, selon de très nombreux hirakistes, de la volonté des autorités algériennes, affichée dès l'hiver 2019, d'en finir avec le mouvement du 22 février.