La septième mort d'Omar est l'autre titre du roman qui reflète un peu plus cette écriture métaphorique propre à Ayyoub dont Le gardien reste la parfaite illustration. Dans ce nouveau roman, Ayyoub peuple ses pages de cauchemars, de rêves inavoués, d'un fatras de maux et d'une multitude de personnages chaotiques qui apparaissent et disparaissent d'entre les pages comme par enchantement. Si le décor est planté dans cette Barbarie septentrionale qui n'est autre que l'Algérie d'aujourd'hui, le personnage principal, Omar, ne manque pas de souffle car il faut en avoir pour le suivre dans les dédales de ce pays soumis à des lois hors la loi et aux règles du Grand-Commandeur. Omar veut partir, quitter ce pays ; le mythe de l'Australie, accrochés à ses girons d'autres âmes peinées, d'autres gueux, ainsi que la cohorte des enfants de la tempête qui partagent les mêmes rêves que lui. Ce livre a une connotation politique ; tous les ingrédients y sont même si la subtilité de l'écriture et sa force — car il ne faut pas perdre une ligne si l'on veut sortir indemne de ce roman — lui donnent aussi une connotation poétique. Le verbe est la force de Ayyoub qui s'en sert ici d'une manière exceptionnelle pour parler de misère, de soif de justice, de corruption, de torture, d'un pays à la dérive, de l'inanité d'une classe dirigeante. Les enfants de la Tempête est une forte symbolique de ce que sont en réalité les gens du pays : perdus, atrophiés culturellement, usurpés de leur identité, “qui ne possèdent ni passé ni présent, encore moins un avenir, qui n'ont pour seul souci que la pitance quotidienne”. Se rendant compte que ce pays n'a jamais été le leur, ils aspirent ainsi à le quitter. Ayyoub signe ici un roman difficile à décrypter et à classer tant par la réflexion qu'il suscite que par le style corrompu par les allégories. Ceci est la force d'Ayyoub qui, rappelons-le, est le détenteur du 1er prix Mohamed-Dib. Vie et mort d'un citoyen provisoire est sorti aux éditions Barzakh durant le Salon international du livre d'Alger. Il mérite une halte. Nassira Belloula