Au premier jour de leur procès, qui s'est ouvert hier au tribunal de Dar El Beïda, Saïd Bouteflika et Tayeb Louh se sont défaussés sur l'ex-ministre de la Justice, Belkacem Zeghmati et dénoncent une "cabale politique". Face au juge, Saïd Bouteflika a défendu la mémoire de son frère et parle d'un président "indulgent". Ayant comparu, hier, devant le tribunal correctionnel de Dar El-Beïda, en tant qu'accusé, aux côtés du patron de l'ETRHB, Ali Haddad, de l'ancien inspecteur général du ministère de la Justice, Taïeb Hachemi, et surtout de l'ancien ministre de la Justice et garde des Sceaux, Tayeb Louh, Saïd Bouteflika s'est montré calme et très sûr de lui en assénant ses vérités, même devant le juge qui l'a entendu. Il a assuré avoir été victime d'une véritable opération de diabolisation durant toutes les années passées au pouvoir aux côtés de son défunt grand frère, Abdelaziz Bouteflika. "On a dit çà et là que Saïd Bouteflika s'est emparé du pouvoir et a fait main basse sur les richesses du pays", a-t-il dit, Mais pourquoi n'a-t-il alors jamais daigné répondre à ces accusations ? Il a dit prendre exemple sur son grand frère, un homme "pacifique" et "indulgent" qui "a subi attaques et insultes pendant 20 ans sans poursuivre personne, ni jeter quelqu'un en prison. À son arrivée au pouvoir en 1999, il a pardonné à tout le monde et réhabilité nombre de personnalités comme Ahmed Ben Bella, Chadli Bendjedid, Tahar Zbiri, etc. Mieux, il a donné des postes de responsabilité à nombre de ses détracteurs, alors qu'on nous a fait vivre, lui et toute notre famille, des moments très difficiles". "Il peut tout pardonner sauf quand on touche à notre mère", a-t-il encore louangé l'ancien président. Aussi, devant cette entreprise de diabolisation qui le visait, il a préféré observer le silence. "Moi, j'ai été élevé aux côtés de grands hommes comme Houari Boumediene, Abdelaziz Bouteflika, Ahmed Medeghri, etc. Si le silence est puni par la loi algérienne, alors je suis coupable. Sinon, je suis innocent de tout", a-t-il asséné. Abordant le dossier Chakib Khelil, Saïd Bouteflika a affirmé : "Le seul homme avec qui mon frère a été élevé et dont nos familles partageaient des relations très denses est Chakib Khelil qui était un frère pour lui. Il faut se demander pourquoi il a pardonné à tout le monde et qu'on a voulu poursuivre Chakib Khelil." "Pis encore, il a été humilié dans le JT de 20 heures lorsque Belkacem Zeghmati, alors procureur général de la cour d'Alger, avec une rare férocité, a annoncé avoir lancé des mandats d'arrêt internationaux contre Chakib Khelil, son épouse et ses deux enfants", a-t-il poursuivi. Par la suite, le même Zeghmati a "envoyé une lettre à mon frère pour lui dire qu'il était en vacances, et c'est Tayeb Louh qui l'avait appelé pour lui demander de lancer les mandats contre Chakib Khelil et sa famille". Etant "un homme politique qui donne du temps au temps", l'ancien président "avait par la suite reçu le ministre de la Justice pour lui demander de réexaminer cette affaire", a indiqué Saïd Bouteflika, et "m'a chargé de suivre cette affaire et beaucoup d'autres". Sur sa relation avec l'ancien ministre de l'Energie, Saïd Bouteflika assume totalement sa proximité avec lui. "C'est un ami de la famille. En plus des discussions téléphoniques, on échangeait des visites familiales. Même quand il étais aux USA, j'étais en contact avec lui", a-t-il soutenu. Pour l'affaire de Beur TV, Saïd Bouteflika a soutenu qu'il ne connaissait pas son ancien patron et celui-ci lui avait envoyé un SMS qu'il a transmis tel quel au ministre Tayeb Louh et au patron de l'ETRHB, Ali Haddad. "Depuis, et à ce jour, aucun d'eux n'a répondu à ce SMS", a-t-il insisté. Pour sa part, l'ancien ministre de la Justice Tayeb Louh, très déçu par le sort qui lui a été réservé, a assuré être victime d'une cabale politique, non sans accuser l'ancien chef de l'Etat Abdelkader Bensalah et l'ancien ministre de la Justice Belkacem Zeghmati d'avoir obéi à des instructions pour le mettre en mandat de dépôt. "Mon incarcération s'est faite pendant la période de l'ancien chef de l'Etat, qui n'a pas été élu par le peuple et qui a désigné, de manière illégitime et hors Constitution, l'ex-ministre de la Justice. Il n'a pas cette prérogative, mais il en a usé en obéissant à des instructions de l'ancien vice-ministre de la Défense pour procéder ensuite à mon incarcération pour des considérations politiques", a-t-il asséné. "Cette affaire est une première dans l'histoire de la justice algérienne, voire dans toutes les institutions judiciaires du monde entier. C'est un précédent grave", s'est-il écrié, non sans lancer : "Il y a la justice divine !"