S'il est encore tôt pour s'avancer sur l'évolution de la crise sanitaire deux années après son apparition, plusieurs indices montrent que la Covid s'est considérablement affaiblie, ouvrant la voie à un retour à la vie normale. Cela fait plusieurs semaines que le nombre de contaminations par la Covid-19 enregistre une baisse significative, au point que les chiffres rendus publics quotidiennement par le ministère de la Santé sont, ces derniers jours, dérisoires. Mardi, le ministère de la Santé, de la Population et des Réformes hospitalières a annoncé que les différents établissements hospitaliers du pays n'ont enregistré que 26 nouvelles contaminations, un seul décès, 28 guérisons, alors que 14 patients étaient en réanimation. Des chiffres rassurants par rapport à ceux enregistrés il y a quelques mois, et qui faisaient froid dans le dos. L'évolution de la pandémie a soulagé les hôpitaux, auparavant saturés. Se dirige-t-on vers la fin de la pandémie, comme prévu par de nombreux spécialistes ? S'il est encore tôt pour s'avancer sur une telle prévision, plusieurs indices montrent que la pandémie s'est considérablement affaiblie à travers la planète. Cela a, d'ailleurs, amené de nombreux pays à alléger les mesures restrictives appliquées lorsque la pandémie était au plus haut. Ce qu'il faut retenir, en tout cas pour le moment, c'est l'évolution positive de la situation sanitaire. Pour le Pr Kamel Djenouhat, président de la Société algérienne d'immunologie et chef du service du laboratoire central de l'EPH Rouiba, la situation est on ne peut plus rassurante : "C'est un record en matière de nouveaux cas de contamination. La situation sanitaire en Algérie figure parmi les meilleures dans le monde, car à ma connaissance, aucun pays n'a atteint ces chiffres de 30 ou 26 cas par jour. Je pense que la vague est derrière nous. L'éventualité d'avoir une nouvelle vague est minime, du moins dans les quatre à cinq mois à venir. Il y a une partie des experts qui prédisent une disparition totale de la pandémie. Nous devons être optimistes tout en restant vigilants." Pour ce qui est de l'augmentation du nombre de vols d'Air Algérie, le scientifique estime qu'"il n'y a aucun risque car la plupart des Algériens ont déjà fait l'infection en même temps, et tous les pays sont en train de connaître cette décrue, et il n'y a pas un autre variant menaçant". Cependant, il a rappelé que la vaccination ne s'est jamais arrêtée et que l'on continue à vacciner les sujets vulnérables, dont les personnes âgées et les patients souffrant de maladies chroniques. Et le Pr Djenouhat d'indiquer que 80 à 90% des Algériens ont été atteints par la Covid-19 et qu'il est conseillé par l'OMS et par le ministère de la Santé de ne pas vacciner les personnes qui viennent d'être infectées, car l'infection naturelle est l'équivalent d'un vaccin. "Il faut rester vigilants car la fin de la quatrième vague ne signifie en aucun cas la fin de la pandémie. On peut dire qu'on a gagné une bataille, mais pas la guerre. L'avenir nous en dira davantage. La baisse des chiffres n'est, en aucun cas, une raison pour baisser la garde. En attendant, nous devons veiller à maintenir le respect des mesures barrières et des gestes de prévention, tout en respectant les protocoles sanitaires", a confié à Liberté le Pr Kamel Kadri, du service de médecine interne de l'établissement public hospitalier Djilali-Belkhenchir de Birtraria (Alger) qui, sur un ton d'espoir et d'optimisme, a ajouté qu'on peut enregistrer une situation comme celle du Sars en 2002, qui a disparu de lui-même, tout en soulignant que personne ne pourra dire si c'est la fin de la pandémie ou seulement la disparition de la quatrième vague. Pour ce qui est de l'augmentation des vols de la compagnie nationale Air Algérie, le scientifique estime que "cela ne constitue pas de danger car, outre le fait que la vie normale doit reprendre avec le ralentissement économique de la compagnie et de l'économie nationale, il y a des précautions à prendre et des mesures à faire respecter, à l'instar des autres compagnies dans le monde, à savoir la PCR et les tests et contrôle établis avant le vol". Même son de cloche chez le Pr Mohamed Hamadouche, chef du service de médecine du travail du CHU Saadna-Abdennour de Sétif, qui voit qu'il faut, d'ores et déjà, préparer les armes pour une éventuelle nouvelle bataille. "Nous ne sommes pas à l'abri d'une nouvelle vague ou de l'émergence d'un nouveau variant. Durant cette période d'accalmie, il est conseillé de profiter pour booster la campagne de vaccination et s'occuper davantage des patients souffrant de maladies chroniques pour les équilibrer et, du coup, booster leur immunité car s'ils ne sont pas bien pris en charge maintenant, ils seront très vulnérables en cas de nouvelle vague", souligne le Pr Hamadouche. Et de renchérir : "Nous avons aussi des patients nécessitant des interventions chirurgicales qui ont été reportées à cause de la saturation des services réservés aux cas Covid-19. Je pense qu'il est temps de les programmer en fonction des capacités de chaque service et de chaque établissement." Pour les personnels de la santé, le chef de file des praticiens de médecine du travail conseille à ses confrères de profiter de ces moments pour prendre leurs congés afin de se préparer à affronter une autre vague, car le danger est toujours imminent et aucun spécialiste ne peut prédire que la pandémie est terminée. "Nous devons aussi préparer les structures, les équipements, les matériels et tout ce qui est logistique." La quatrième vague a été légère en Algérie La quatrième vague n'a pas été aussi virulente que la précédente. En Algérie comme dans nombre de pays voisins, le nombre des contaminations a été moins important que sous d'autres cieux aux quatre coins du pays. Le Dr Yahia Mekki, spécialiste en virologie à l'université Claude-Bernard à Lyon, expert auprès du ministère de la Santé (République française) et expert auprès de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), nous livre les facteurs qui seraient derrière la virulence des atteintes par le virus Covid-19. "Le facteur génétique n'est pas à négliger. Cela nous indique la cartographie de notre système immunitaire. En effet, la composition du système HLA (antigènes des leucocytes humains) pourrait différer d'un peuple à l'autre, dont les peuples arabes et africains par rapport aux peuples caucasiens, européens ou américains qui seraient plus sensibles à ces virus et à cette pandémie, d'où le nombre très élevé de contaminations et de morts qui est de plus de 1,3 million de morts en Europe, plus d'un million de morts aux états-Unis, 400 000 en Inde et pas moins de 450 000 morts au Brésil", explique-t-il. Le Dr Mekki s'interroge, par ailleurs, sur ce qui apparaît comme une spécificité africaine à propos du nombre de contaminations limitées enregistrées. "Comment expliquer qu'en Afrique qui est la moins vaccinée, où les infrastructures hospitalières sont très faibles et où le niveau de vie est très bas, il y a moins d'atteintes et moins de décès", relève-t-il, avant de rappeler que dans toute l'Afrique, depuis le début de la pandémie et jusqu'à ce jour, "le nombre de morts est inférieur à celui de la Grande-Bretagne". "Tous ces points doivent être minutieusement étudiés pour en tirer les conclusions", recommande notre interlocuteur.