L'ancien patron des services de renseignement, le général-major Bachir Tartag a été condamné, jeudi, par le tribunal militaire de Blida à une peine de 6 ans de prison ferme. Il est accusé de "mauvaise utilisation de la fonction" dans une affaire liée à la fraude électorale lors des élections législatives de juin 2017. Trois autres anciens officiers supérieurs – un général et deux colonels – ont, pour leur part, écopé d'une peine de 5 ans d'emprisonnement. Les faits remontent au printemps 2017. L'Algérie s'apprête à organiser des élections législatives. La confection des listes électorales fait courir de nombreux citoyens, qui voient dans la fonction de député un ascenseur social à moindres frais. Au sein des partis du pouvoir, les places coûtent cher, particulièrement au FLN. Dans ce parti que présidait alors Abdelaziz Bouteflika, le secrétaire général, Djamel Ould-Abbès, "distribue" les places. Pendant qu'il s'isole dans un hôtel d'Alger avec des proches, ses enfants se chargent de "marchander" les candidatures. Ces pratiques colportées n'étaient que des rumeurs, à l'époque. Mais à la chute d'Abdelaziz Bouteflika, les langues ont se sont déliées. L'ancien député d'Annaba, Bahaeddine Tliba, a, par exemple, accusé publiquement l'ancien secrétaire général du FLN de lui avoir demandé de l'argent, via ses enfants, en contrepartie de sa candidature sur la liste FLN d'Annaba. Pour dénoncer ce qu'il avait considéré comme "un mépris", il a dit avoir saisi le chef de l'Etat et "les services de sécurité". "J'ai remis le dossier à Bachir Tartag", avait relaté le sulfureux député. Or, le chef des Services a mis le dossier dans un tiroir. Ses proches évoquent une "instruction verbale" du chef de l'Etat de l'époque qui aurait demandé de "calmer les choses" en attendant que les élections passent. Pis encore, les enfants d'Ould Abbès, qui avaient été interpellés, ont été relâchés rapidement sans aucune poursuite. Des faits que Tartag connaissait, mais qu'il n'avait jamais transmis à la justice. L'autre dossier que reproche la justice à Bachir Tartag est celui de "madame Maya", du nom de cette mystérieuse dame qui se présentait comme la "fille cachée d'Abdelaziz Bouteflika". Là aussi, le général Tartag est accusé de ne pas avoir transmis à la justice les documents et objets saisis lors des perquisitions effectuées par des enquêteurs dans la maison de cette dame à Moretti (Staouéli). Pour se justifier, l'ancien coordinateur des services de renseignement a accusé Saïd Bouteflika de l'avoir empêché de faire son travail. "Après avoir demandé une enquête, il m'a instruit de gérer le dossier de manière discrète, parce qu'il s'agissait d'une affaire qui concerne le Président. Lors des perquisitions, des sommes importantes en dinars et en devises ont été saisies. Elles ne devaient pas rester à la caserne. Elles ont été déposées à la Banque d'Algérie et les documents afférents à ces dépôts existent", a notamment déclaré Tartag lors de l'instruction, selon les propos révélés par El Watan. Contacté hier, Khaled Bourgheul, l'avocat du général Tartag, a indiqué que lui et son mandant vont faire appel de ce jugement.