Résumé : Samir tente de se justifier auprès de son amie. Il ne voulait pas la blesser, mais les circonstances de son mariage étaient si complexes qu'il n'avait pu se dérober. Ilhem accuse Hasna d'avoir comploté cette union, afin de l'éloigner de lui. Le jeune homme défend sa mère et conseille à Ilhem de songer à faire sa vie. Elle hoche la tête. - C'est ce qu'on me dit pour éviter la litanie de mes plaintes. Elle secoue la tête. - Tu ne peux pas comprendre, Samir. Depuis que tu m'as quittée, aucun homme n'a pu m'attirer ou compter pour moi. Tu es le seul, l'unique amour de ma vie, et tu le resteras jusqu'à la fin de mes jours. Il reprend son déjeuner avant de répondre : - Tu es encore jeune, belle et ambitieuse, Ilhem. Ne gâche pas ta vie. Il ne faut surtout pas que tu regrettes un jour ce que tu viens de dire. - Non. Je ne pourrais regretter une réalité aussi limpide, Samir. Tu es le seul homme qui compte pour moi. Tant pis si je dois rester célibataire et finir mes jours vieille fille, mais je ne pourrais même pas penser qu'un jour un autre prendra ta place dans mon cœur. Il soupire. - Je ne veux pas que tu gâches ta vie. Elle hausse les épaules et lève les yeux vers lui. Il remarque alors les larmes qui y brillent et détourne son regard. Il a mal dans sa chair et dans son âme et ne supporte pas la souffrance de cette femme qui a longtemps compté pour lui. Il lui prend la main et lui dit : - Je n'aimerais pas te savoir malheureuse, crois-moi. Je vais te raconter toute la vérité sur mon mariage. Peut-être que cela t'aidera à mieux comprendre les choses. Comme elle garde le silence, il boit une gorgée d'eau et entame son récit : - Cela a commencé entre deux ivrognes devant une partie de poker. Il y avait Aïssa, mon père, et Ahmed, mon beau-père. Tous les deux avaient déjà vidé leur bouteille et leur poche dans les bars, avant de s'attabler devant une partie de cartes et de miser sur leurs enfants. Stupéfaite, Ilhem allait l'interrompre, mais il lève la main. - Non. Je continue mon récit, Ilhem. Ne m'interromps pas. Ce que je te raconte là est la pure vérité, alors, s'il te plaît, écoute-moi jusqu'à la fin. Il reprend son récit devant l'air ébahi de son amie. Au fur et à mesure qu'il avançait dans les détails, Ilhem sent une boule se former sur son plexus. Elle écarquille les yeux et met une main sur sa bouche lorsqu'il aborde le sujet de la tache de vin sur la joue de Mordjana et les chirurgies qu'elle a dû subir pour s'en débarrasser, puis les formations qu'elle a suivies et les efforts qu'il a déployés pour l'aider à reprendre pied et à se débarrasser de ses complexes, etc. La journée avance, mais Samir ne s'arrête pas. Il tient à ce qu'Ilhem sache toute la vérité sur lui. Bien loin de là, Mordjana passe une nuit agitée. Elle repense à sa mère et aux révélations de sa grand-mère au sujet de ses parents. Avaient-ils réellement étaient amoureux ? Elle a encore du mal à le croire. Une douleur dans son ventre la réveille à chaque fois qu'elle tente de s'endormir. La vieille matrone, malgré le poids de l'âge, n'y a pas été de main morte avec elle. Elle se surprend à vouloir retourner chez elle dès le petit matin, pour lui demander de recommencer ses massages. L'assurance de cette "guérisseuse" lui a rendu quelque peu l'espoir de retrouver un jour la joie de vivre. Il fait à peine jour lorsqu'elle quitte sa couche pour se rendre dans la cuisine et préparer le petit-déjeuner. La maison est encore plongée dans le silence. Elle entend son grand-père sortir pour se rendre à la mosquée, mais Mimouna sa grand-mère dort encore. Elle lui a semblé un peu fatiguée ces derniers temps. Cela se comprend aussi. C'est elle qui s'occupe de la maison, fait les courses, prépare les repas et trouve même le temps de tisser des couvertures. Mordjana admire l'habilité de ses doigts qui glissent à travers les fils tendus sur le métier à tisser et sous lesquels prennent forme les multiples motifs que son aïeule crée au fur à mesure que le travail avance. Elle a le don de choisir les couleurs et de rehausser leur éclat pour donner à son œuvre l'exclusivité de sa créativité. La jeune femme rajoute deux cuillères à café dans la cafetière qui bouillonne sur la cuisinière et prend de la semoule pour préparer une galette. Elle fait ensuite bouillir le lait et dépose quelques tasses sur la table de la cuisine, afin de servir Ameur, son grand-père, dès son retour de la mosquée. Le grincement de la porte d'entrée l'annonce justement, et c'est d'un pas sûr qu'il la rejoint dans la cuisine. Il sourit à la vue de Mordjana. - Bonjour, ma fille. Je vois que tu es déjà levée.
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