La préparation d'un festival de cinéma consacré à la ville d'Alger a révélé que les copies des films algériens, réalisés depuis l'Indépendance, sont en mauvais état. Ces productions risquent d'être perdues si aucune mesure n'est prise. La ville d'Alger, telle qu'elle apparaît à travers le cinéma algérien, sera le thème de la 17e édition du festival Travelling, qui se déroulera à Rennes (France) du 4 au 14 mars prochain. Les animateurs de ce festival français du cinéma ont, pour cette édition, jeté leur dévolu sur la capitale algérienne comme ils l'ont déjà fait pour d'autres villes du monde, comme Tokyo, Rome, Helsinki, Marseille, Téhéran… Si l'on ignore les raisons qui ont présidé au choix de ces métropoles, l'on sait que pour Alger “parce que l'Algérie est, en France, au cœur d'une actualité mouvementée, liée également à un passé douloureux”, comme l'a souligné Anne Le Henaf, coordinatrice artistique du festival, lors de la conférence de presse, hier, au musée du cinéma d'Alger. Alger et l'Algérie ne cessant d'alimenter l'actualité, il n'y a en soi rien de nouveau. Cependant, et pour préparer ce festival, les animateurs proposent de visionner un maximum de films algériens réalisés depuis l'Indépendance. Pour y parvenir, Guillaume Fournier, Mirabelle Freville et Anne Le Henaf sont à Alger depuis une semaine et, grâce à la cinémathèque algérienne, ils ont pu voir “des films que l'on ne connaissait pas et que le public français n'a jamais vus comme, par exemple, Décembre, de Mohamed Lakhdar Hamina. “Nous n'avons pas la prétention d'offrir un regard exhaustif, on voudrait seulement, à partir de la ville d'Alger, faire une présentation de la filmographie algérienne. “Tahia Ya Didou” reste pour nous un film phare sur la ville d'Alger.” Mais, pour visionner les films algériens, il faudrait que les copies existent et, surtout qu'elles soient en bon état. Et là, se pose un sérieux problème, comme le reconnaît Aziz Boukrouni, du service de la programmation de la cinémathèque algérienne. “Les copies sont en très mauvais état. Si rien n'est fait, et rapidement, certains films risquent d'être perdus à tout jamais. Les copies de la cinémathèque sont stockées dans un appartement à Debussy (centre d'Alger) et sont livrés à eux-mêmes. Depuis le temps que l'on entend parler de la restauration de ces copies… mais, rien n'a été entrepris jusqu'à présent. D'un autre côté, on demande que soient rapatriés les films qui ont été projetés à l'occasion de l'année de l'Algérie en France. Il y en a trente, et ils se trouvent encore à l'ambassade d'Algérie en France.” Et à la conférencière de citer des cas, pour certains films, où des bobines manquent à l'appel. Qu'importent les films dont la projection ne sera pas possible du moment qu'Alger “là où se construit l'identité nationale” sera l'invitée de Rennes, la Bretonne. Il sera rendu hommage aux cinéastes Merzak Allouache, Mohamed Chouikh et Mohamed Lakhdar Hamina. Il sera également fait un clin d'œil aux femmes “face et derrière la caméra” et au jeune cinéma algérien. Programmées dans treize salles rennaises, ces projections donneront évidemment lieu à des débats. Et vu l'actualité, qu'il s'agisse des émeutes des banlieues françaises ou de la loi du 23 février taillée sur mesure pour les nostalgiques de Pépé le Moko, les débats promettent bien des échanges houleux. SAMIR BENMALEK