Que le roi Abdallah d'Arabie saoudite dénonce l'extrémisme islamiste et appelle les musulmans à faire valoir la modération, à l'ouverture du sommet extraordinaire de l'OCI, est en soi significatif de l'état d'esprit qui règne désormais chez tous les régimes musulmans, de l'Atlantique à l'Afghanistan, dos au mur face à ce phénomène qu'ils ont couvé, jadis, et qui a fini par se retourner contre eux. Le souverain saoudien, dont le wahhabisme a enfanté l'islamisme radical et le terrorisme islamiste, son avatar, même s'il n'est pas allé jusqu'à faire le procès de la genèse d'Al Qaïda, fondée par un fils de l'establishment saoudien, Ben Laden, ni celle des confréries qui l'ont précédé, tels les Frères musulmans de Hassan Al Banna ou encore leurs métastases au Maghreb et ailleurs, a du moins utilisé la langue de bois pour fustiger les tenants de l'islamisme qu'il a dénoncés sous le vocables - passe-partout - de “déviants” devant les dirigeants des 57 membres de l'Organisation de la conférence islamique. Il reste qu'un wahabite s'en prend publiquement à la pensée et aux actions djihadistes, en prônant l'esprit de “tolérance” et de “modération” dans le monde musulman. Abdallah a, dans ce contexte, souligné qu'une révision des systèmes scolaires dans les pays islamiques, dénoncés comme à l'origine de la montée intégriste, est “une demande essentielle” pour former chez le musulman une personnalité tolérante et, partant, créer une société qui refuse l'enfermement et l'isolement, qui soit en harmonie avec l'humanité. Impensable, il y a peu, dans la bouche d'une dynastie qui aura été responsable de l'essaimage de l'islamisme radical partout dans le monde, là ou vit une communauté musulmane. L'Arabie saoudite, qui a été fortement secouée par les attentats contre les Etats-Unis en 2001, et qui a été rattrapée par ses propres islamistes, admet aussi que c'est l'injustice et la pauvreté qui ont fait le lit de l'islam radical. C'est révolutionnaire de la part d'un régime qui, jusqu'ici, n'avait cesse de crier le contraire, en décrétant l'acceptation de la pauvreté comme une volonté divine. Convoqué à l'initiative de Riyad, le sommet de deux jours est placé sous le signe de la défense de l'islam, confronté, selon le palais royal, à une offensive féroce. À l'ordre du jour de la rencontre figurent deux documents : la “Déclaration de La Mecque” et le “plan d'action de dix ans pour relever les défis du 21e siècle”. Le premier document appelle les pays islamiques à faire “un sincère examen de conscience” et à lutter sans merci contre le terrorisme. D. Bouatta