Washington est passé à une manœuvre d'encerclement du régime iranien. Avant le rapport du secrétaire général de l'Agence internationale à l'énergie atomique (AIEA) au Conseil de sécurité de l'ONU début mars, Condoleezza Rice, la secrétaire d'Etat américaine, effectue depuis hier une tournée au Proche-Orient. Bush, au plus bas dans les sondages chez lui et qui vient d'essuyer une gifle de la part de l'ONU qui exige de lui la fermeture de son goulag de Guantanamo, veut élargir la coalition internationale contre la nucléarisation de l'Iran en y englobant les pays arabes voisins. En Egypte, en Arabie Saoudite et dans les Emirats arabes unis, le chef de la diplomatie américaine est chargé de faire pression en mettant l'accent sur les risques de déstabilisation qu'encourrait toute la région si Téhéran possédait la bombe atomique. Elle va, cependant, affronter une opinion encline à considérer les prétentions atomiques de l'Iran comme légitimes face à la puissance nucléaire israélienne. L'argument de Washington est de mettre l'accent sur la nature de Téhéran qui soutient des groupes terroristes ou extrémistes tels que le Hezbollah au Liban, le Hamas en Palestine, ou certaines milices chiites en Irak. Les caricatures danoises amalgamant islam et terrorisme n'arrangent, cependant, pas les choses pour Condoleezza. Loin s'en faut. L'islamophobie gagne du terrain en Occident et les réactions de la rue arabe sont mises en avant par les régimes arabes pour défendre mieux que jamais le principe de l'exception civilisationnel qui leur a permis de renvoyer aux calendes grecques la démocratisation dans le monde arabo-musulman. La confirmation de l'Iran comme pivot de “l'axe du mal” vise, aux yeux de Bush, à renforcer le consensus international en faveur de sanctions contre Téhéran. Le président américain, qui a obtenu de sa Chambre des représentants une résolution qui dénie aux Iraniens “le droit de développer” une filière nucléaire civile faute de transparence sur leur programme, se dit prêt à se passer de l'appui de ses alliés dans la région. Condoleezza Rice n'a pas exclu de contourner l'ONU en s'appuyant sur une coalition occidentale. “Si nous ne pouvons pas obtenir l'accord de tous, il y a des mesures que certains pays peuvent décider de prendre et qui auront un effet significatif sur l'économie iranienne”, devait-elle déclarer en ouvrant son périple. Washington semble ne pas vouloir croiser le fer avec Téhéran, privilégiant l'assistance à la dissidence iranienne. 85 millions de dollars pour soutenir les défenseurs des droits de l'Homme. Le succès n'est pas garanti, les citoyens courtisés par Washington se retrouveront victimes de représailles. D. Bouatta