Les résultats de la visite à partir de demain en irak de Blix et d'El-Baradei et le rapport qu'ils présenteront le 14 février seront déterminants dans l'usage de la force contre Bagdad. Après avoir tenu en haleine le monde entier, avec l'annonce de preuves compromettant indéniablement le régime de Saddam Hussein, les Etats-unis se retrouvent pratiquement au même point à la suite du plaidoyer de quatre-vingt trois minutes de Colin Powell devant le conseil de sécurité mercredi dernier. Les positions sont restées inchangées au sein de cet organe des Nations unies. La France, la Russie et la Chine ainsi que d'autres membres non permanents du conseil continuent à soutenir la poursuite des inspections des techniciens de l'ONU, estimant que pour l'instant rien ne justifie le déclenchement d'une guerre contre l'Irak. Devant cette situation, George Bush ne modifie pas sa politique irakienne en réaffirmant, jeudi soir dans une déclaration à la presse improvisée sa détermination à attaquer l'Irak même sans l'aval de l'ONU. Cette sortie médiatique confirme que la décision de faire la guerre est déjà prise, particulièrement après l'ordre donnée à la cent-et-unième division aéroportée, la plus importante de l'armée américaine, de se déployer dans la région du Golfe. Il ne reste plus maintenant que la formalisation de cette décision. En attendant l'administration Bush, qui a besoin de huit voix en plus de la sienne au conseil de sécurité pour obtenir le feu vert l'autorisant à désarmer Saddam par la force, n'a pas réussi à rallier à sa cause les membres du conseil de sécurité réticents. La seule satisfaction du président américain est l'annonce de dix pays de l'Europe de l'est de leur rangement aux côtés des états-unis. Les dirigeants de la Bulgarie, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie, l'Albanie, la Croatie, la Macédoine, la Lettonie, la Lituanie et l'Estonie, beaucoup plus attirés par l'aide économique de Washington que convaincus par l'argumentation du chef de la diplomatie américaine, trouvent que “le danger présent et évident représenté par le régime de Saddam Hussein nécessite une réponse conjointe de la communauté des pays démocratiques” . Cela porte à dix-huit le nombre des Etats européens, dont cinq de l'UE, qui se sont alignés sur les Etats-unis. En attendant, toute la responsabilité repose dorénavant sur les épaules des inspecteurs de l'ONU. La visite de deux jours qu'effectueront à partir de demain en Irak Hans Blix et de Mohammed El-Baradei sera très importante dans la prise de décision pour l'usage de la force contre Bagdad comme l'exige avec insistance George Bush. S'ils parviennent à obtenir une coopération maximale des autorités irakiennes dans le déroulement des inspections, un solide argument américain tombera à l'eau, ce qui handicapera sérieusement la position de Washington devant les partisans de la solution pacifique pour désarmer Saddam Hussein. L'Irak est appelé donc à répondre favorablement à toutes les demandes des inspecteurs pour couper l'herbe sous les pieds du locataire de la maison-Blanche et lui enlever toute excuse pouvant être considérée comme une violation de la résolution 1441 et justifier le recours à la guerre. Le rapport que présenteront les deux responsables des inspections onusiennes, le 14 février prochain, sera déterminant pour l'avenir immédiat de l'Irak. Les autorités de Bagdad en sont conscientes et devraient profiter de l'opinion favorables à la poursuite des opérations de contrôle de Hans Blix, qui avait affirmé récemment qu'il n'avait rien vu en Irak pouvant justifier le déclenchement d'une guerre. K. A. Le Parlement turc opte pour la guerre Le parlement turc a "appuyé sur le bouton" de la guerre en votant jeudi pour le déploiement d'un premier contingent de spécialistes américains, chargés notamment de rénover les terrains d'aviation en vue d'un éventuel conflit en Irak, estimait vendredi dernier la presse turque. Les journaux fustigeaient le fait que le vote ait eu lieu à huis clos, une contradiction avec la politique de “transparence” prônée par le gouvernement. “Le parlement fuit son peuple”, écrivait en gros titres le journal libéral Radikal, estimant que les députés ont ignoré l'opinion publique, fortement hostile à une guerre, en se rangeant du côté des Etats-Unis. Selon l'éditorialiste de ce quotidien, le gouvernement du parti de la Justice et du Développement (AKP, issu de la mouvance islamiste), hostile au départ à une intervention militaire contre Bagdad “a quitté le monde des rêves pour celui des réalités”. Un éditorialiste du journal à gros tirage Hurriyet regrettait que la Turquie n'ait pas déterminé dans les semaines passées une position plus claire concernant son engagement dans une possible guerre. Blix : “L'Irak semble faire un effort” L'Irak “semble faire un effort” pour coopérer avec les inspecteurs en désarmement de l'Onu qui ont pu interroger en privé, jeudi dernier, un chercheur irakien, a déclaré, hier à Vienne, le chef des inspecteurs, Hans Blix. “ll semble qu'ils (les Irakiens) fassent un effort”, a déclaré aux journalistes Blix, chef de la Commission de contrôle, de vérification et d'inspection des Nations unies (Cocovinu). En Irak, un biologiste irakien a été interrogé durant plus de trois heures, jeudi dernier, dans la soirée, par des experts de l'Onu en l'absence d'officiels irakiens, la première rencontre du genre, a indiqué hier l'Onu à Bagdad.