Dans un livre faisant le point sur le situation des relations hispano-marocaines, signé par le journaliste espagnol Ignacio Cembrero, l'ex-Premier ministre ibérique n'hésite pas à parler du rôle du renseignement marocain dans les attentats du 11 mars 2004 à Madrid. En réponse à une question sur les informations faisant état de l'implication des services secrets marocains dans les explosions de la capitale espagnole en guise de revanche après la crise de l'îlot Persil, José Maria Aznar a déclaré : “Je suis convaincu qu'en dépit de l'intérêt des uns et des autres, nous connaîtrons toute la vérité sur les attentats du 11 mars.” Quant à l'enquête sur les attentats, l'ancien chef du gouvernement espagnol reproche à la justice de son pays de ne pas avoir approfondi ses recherches, notamment en direction de la “piste marocaine”. À travers ses réponses ambiguës, Aznar donne du crédit aux accusations portées contre le Maroc. Cette position est d'une importance significative surtout qu'elle émane d'une personnalité qui dirigeait l'Espagne lorsque les attentats ont été commis. Dans ce livre qui retrace l'historique des relations hispano-marocaines, l'ancien membre du Parti populaire espagnol revient sur la crise de l'îlot Persil et reconnaît qu'il a redouté après l'envoi de soldats marocains sur cette île, que le royaume chérifien n'entreprenne une action similaire dans les enclaves de Ceuta et Melilla et les revendique ouvertement. Selon l'auteur de l'ouvrage, citant des ministres marocains de l'époque, Madrid était déterminé à recourir à l'usage de la force pour faire partir les militaires marocains si Mohammed VI n'avait pas ordonné leur retrait à l'aube du 17 juillet 2002. De longues tractations avaient eu lieu entre les deux parties avec le concours de l'ambassadrice des Etats-Unis au Maroc, avant que le souverain alaouite fasse machine arrière. Dans cette affaire, José Maria Aznar semble certain que c'est le président français qui était derrière la décision marocaine d'envoyer des soldats sur l'îlot Persil dans le but de le mettre devant le fait accompli. Il justifie cela en affirmant : “Chirac m'a proposé personnellement, lorsque je l'ai contacté, de restituer au Maroc toutes les îles espagnoles au large des côtes marocaines, y compris les enclaves de Ceuta et Melilla.” L'ancien Premier ministre espagnol indique avoir été conforté par la suite dans sa pensée car “occuper l'îlot Persil n'était pas une action entièrement marocaine, mais il y avait un autre Etat derrière. La vérité est que Chirac a soutenu le Maroc lorsque ses forces ont pénétré dans l'île dans la perspective de restreindre l'influence espagnole et pour voir quelle serait notre réaction en cas d'incidents plus graves. Il voulait tester la réaction de l'Espagne en cas de revendication des enclaves de Ceuta et Melilla. Ils étaient assurés que l'Espagne n'allait pas réagir. Mais moi, je leur ai démontré qu'ils étaient dans l'erreur et que l'Espagne va réagir.” “Ce ne fut pas une surprise pour moi, parce que Chirac avait conseillé en 2000 au Maroc de ne pas signer l'accord de pêche avec l'Union européenne”, ajoute Aznar. Concernant le conflit du Sahara Occidental, Ignacio Cembrero affirme être convaincu que c'est José Maria Aznar qui était derrière la non-adoption en 2001 par le Conseil de sécurité de l'ONU du plan d'autonomie préconisé par le Maroc et que c'est lui également qui a évité à Rabat une véritable défaite en empêchant l'application du plan de paix de James Baker en juillet 2003. K. ABDELKAMEL