Pour l'ex-Premier ministre, il y a un sérieux problème de productivité en Algérie. “Il faut rechercher une synergie dans la restructuration des banques et des entreprises publiques”. C'est ce qu'a souligné Ahmed Benbitour jeudi lors du Ve Symposium d'El-Oued, organisé par le Club Excellence Management, sur les relations banque-entreprise. L'ex-Chef du gouvernement estime que “la réhabilitation des banques veut dire une plus grande autonomie de gestion, des capacité de gestion en harmonie et adaptées au nouvel environnement actuel. Un redressement appuyé par la situation financière de leurs clients principaux qui sont des entreprises publiques, avec une intervention de l'Etat”. Pour Ahmed Benbitour, cette vision est celle de l'architecte, en d'autres termes celui qui a le temps de concevoir et de mettre en œuvre. Il se trouve qu'il y a aussi l'appel au pompier face à l'urgence. M. Benbitour constate aujourd'hui une aisance financière d'une ampleur telle qu'elle permet de financer les défaillances de gestion, les coûts des réformes et des transferts sociaux et aussi les investissements élevés dans les infrastructures et dans le secteur productif. “C'est une aisance financière inespérée, avec des réserves qui représentent actuellement quatre fois le stock de la dette, et dix fois en 2009, des réserves qui dépassent trois années d'importation”, explique-t-il. L'épargne tourne autour de 45%, avec un taux d'investissement bien inférieur qui laisse un espace au moins de 10% du Produit intérieur brut que l'Algérie pourrait affecter dans le secteur productif. L'ex-Chef du gouvernement parle de la nécessité de compléter les investissements dans les infrastructures par des investissements dans les secteurs productifs. Il relève le besoin de développer de nouveaux modes de financement pour les investissements productifs : capital risque, banques d'affaires, fonds d'investissement et coopératives financières. “Si on veut aider les petites et moyennes entreprises à se lancer, je ne pense pas qu'on puisse compter sur les banques actuelles. Il faut d'autres institutions et de nouveaux instruments dédiés à ce type d'investissement”, lance-t-il. À côté de la vision de l'architecte et celle du pompier, Benbitour évoque la vision du politique “qui voit que les réformes sont en panne, et qui voit qu'il y a une mauvaise qualité de la croissance”. Entre 2001 et 2005, argumente-t-il, le taux de croissance économique est de 5,2% et celui de l'emploi est 6,6%. “Où se trouve la productivité où se trouve la productivité générale des facteurs, seul instrument capable d'assurer un développement soutenu à moyen et long terme”, s'interroge Ahmed Benbitour. L'ex-Chef du gouvernement rappelle les classements, pas réjouissants, de l'Algérie par rapport à un certain nombre d'indicateurs, de corruption, ouverture économique, climat des affaires suggérant “la nécessité de construire des institutions politique, économique, administrative et judiciaire fiables capables de mobiliser la nation”. Du coup, il propose “de créer un réseau de patriotes économiques, d'entrepreneurs économiques qui prennent en charge la mise en œuvre d'une politique bien conçue”. Il faut, de son point de vue, utiliser le surplus budgétaire — il y a un minimum de 8% du PIB qui dort (environ 8 milliards de dollars) — pour financer à crédit les investissements productifs dans le secteur privé. On peut imaginer, dit-il, une institution comme la BAD qui, cette fois-ci, pour ne pas faire l'erreur des années 70, transfère le surplus vers les investissement privés. Pour dépasser la crise actuelle, estime Ahmed Benbitour, “l'Algérie a besoin de gens capables de réunir les trois visions, celle de l'architecte, celle du pompier et celle du politique au niveau des institutions de l'Etat, au niveau du marché c'est-à-dire les entrepreneurs, au niveau de la société civile”. Les ressources sont disponibles, l'Algérie est un exportateur net de richesses. C'est un exportateur net de capitaux financiers. C'est aussi un exportateur net de capital humain. Rappelant son expérience de ministre des Finances en 1996, Ahmed Benbitour affirme avoir proposé au gouvernement de l'époque une restructuration des banques, qui a été rejetée et qui l'a poussé à partir. Ce qu'il avait proposé, c'était de créer à partir des cinq banques, 25 institutions financière, c'est-à-dire dans chaque banque 5 institutions : d'abord un holding chargé de gérer la transition, une banque commerciale totalement assainie, une institution de gestion des actifs non performante, une société de leasing et enfin une société financière des participations. “C'est pour dire que l'Etat peut être le premier frein, comme il peut constituer le premier moteur du changement. Si l'Etat ne veut pas, rien ne se fera”, conclut l'ex-Chef du gouvernement M. R.