La résorption de la majeure partie des besoins nécessitera la réalisation de 250 000 unités annuellement. “C'est une approche strictement sociale de la problématique du logement qui a prévalu dans les politiques publiques suivies à ce jour, sans que celles-ci ne débouchent sur un débat ou une amorce de règlement de ce qui est toujours désigné comme la crise du logement. Les pouvoirs publics, de même que les citoyens, ont intégré l'idée que l'accès au logement est un droit et qu'il appartient à l'Etat de le satisfaire. C'est ce qui explique qu'à une demande bien réelle, encore souvent exagérée, la réponse apportée a été mécanique, volontariste, superficielle, c'est-à-dire, en fin de compte, politicienne.” C'est ce qu'affirme le forum des chefs d'entreprise dans un document, “pour une dynamique nouvelle en matière de construction de logements”, remis récemment au gouvernement dont Liberté a pu avoir une copie. Les propositions du Forum s'articulent autour de deux volets. D'une part, il est proposé un programme concret de construction de logements, avec tous les détails y afférents en termes de consistance physique, de typologie, de coûts estimés et de financements. D'autre part, une présentation est faite des contraintes jugées les plus lourdes qui pénalisent l'activité de construction de logements dans notre pays. Le forum des chefs d'entreprise pose, dans l'introduction du document, les termes du débat. Selon l'organisation que dirige Omar Ramdane, le parc immobilier algérien se compose aujourd'hui de quelque 5,5 millions de logements, dont près de 2 millions datant de la période coloniale sont dans un état de vétusté plus ou moins avancé. Le déficit actuel est estimé à quelque 800 000 logements et la demande annuelle à environ 100 000 logements. Dans ces conditions, souligne le Forum, “il est nécessaire de se fixer comme objectif à atteindre rapidement un rythme de livraison de 250 000 logements par an”. Un rythme qu'il faudrait surtout maintenir sur une période de six ans. Alors que seulement 150 000 logements par an sont réalisés au cours des dernières années, le forum des chefs d'entreprise propose un programme concret, réaliste, diversifié à même, progressivement, d'assurer la résorption du déficit et de faire face à la demande nouvelle. Sur un programme annuel de 250 000 logements, 200 000 impliqueront, selon les cas, la participation financière “totale ou partielle, définitive ou temporaire” de l'Etat. Il s'agit surtout du logement social incessible (60 000 unités), du logement promotionnel social de type location-vente (60 000 unités), du logement urbain aidé (40 000 unités) et, enfin, du logement rural aidé (40 000 unités). Les 50 000 autres (autoconstruction : 30 000 unités et promotion libre : 20 000 unités) seront réalisés dans le cadre de la promotion immobilière publique ou privé ou par les particuliers et seront donc financés en totalité par leurs futurs propriétaires. Le programme location-vente lui-même s'autofinance normalement sur une période de 16 à 18 ans, précise le Forum. En d'autres termes, le Trésor public commence, dès la livraison des programmes, à récupérer progressivement ses fonds. Très détaillé, le document du Forum donne même l'évaluation du coût financier de la participation de l'Etat pour chaque type de logement. Concernant le logement social incessible, le Forum suggère la construction de 36 000 F3 (superficie du logement 60 m2) et de 24 000 F2 (superficie du logement 45 m2). Soit un total de 60 000 logements sociaux incessibles d'une superficie moyenne de 54 m2 le logement. Le coût moyen de l'unité est estimé à 972000 dinars (construction 864 000 dinars, viabilité 108 000 dinars et le terrain gratuit). L'effort financier de l'Etat serait alors de 58,32 milliards de dinars pour le logement promotionnel de type location-vente. L'organisation que préside Omar Ramdane suggère des F2 de 50 m2 (6 000 logements), des F3 de 70 m2 (18 000 logements), des F4 de 85 m2 (24 000 logements) et des F5 de 100 m2 (12 000 logements). Soit un total de 60 000 logements d'une superficie moyenne de 80 m2 le logement. Le coût par logement est estimé à 1 876 000 dinars (la construction 1 440 000 dinars, viabilité 180 000 dinars et le terrain 256 000 dinars). Pour ce type de logement, le Forum estime que l'effort financier annuel que l'Etat supporterait serait de 112,56 milliards de dinars pour la première année et 84,42 milliards de dinars pour les années suivantes. Quant aux logements aidés, la dépense annuelle pour l'Etat est évaluée à 28 milliards de dinars. L'impact total financier annuel pour le trésor public serait alors de 170,74 milliards de dinars. Soit quasiment le double des ressources financières mobilisées par l'Etat en faveur des programmes de logement entre 1997 et 2000. en termes de poids pour la trésorerie devise du pays, avec un taux d'intégration moyen de 60% du coût global total du programme estimé à 270 milliards de dinars (170 milliards financés par l'Etat et 100 milliards de dinars par les particuliers en entrant dans une promotion immobilière) et avec un taux de change de 80 dinars pour un dollars, le coût transférable serait de 108 milliards de dinars, soit l'équivalent de 1,35 milliard de dollars. Un tel volume de réalisation, 250 000 logements par an, est possible de l'avis même des spécialistes du bâtiment. Mais pour le Forum, il suppose une action énergique dans le but de lever les multiples contraintes qui pèsent lourdement sur la production du logement. En tout état de cause, le Forum estime “opportun que les pouvoirs publics prennent l'initiative d'organiser un atelier de travail qui sera chargé d'évaluer ces propositions”. M. R. Les contraintes à lever Le foncier En l'absence d'un marché foncier organisé et transparent, le programme de construction proposé ne pourra pas être lancé faute de terrains d'assiette. La contrainte étant tout à la fois celle de la disponibilité des terrains et celle de leurs coûts prohibitifs. Le crédit immobilier et les revenus Tous les pays qui ont pu préconiser et mettre en application des solutions efficaces aux problèmes du logement ne l'ont fait qu'en s'appuyant sur une politique de crédit immobilier stimulante et soutenue. Cette politique fait défaut en Algérie. Force est de constater que, malgré les bons résultats atteints en matière de diminution des coûts du logement social, le coût du m2 habitable (16 000 dinars) est le double du SNMG. En d'autres termes, le niveau de revenu actuel des salariés reste très insuffisant pour leur permettre de faire face décemment aux charges requises pour les besoins du logement. Le Forum propose l'allongement de la durée de remboursement jusqu'à 25 ans et l'aménagement d'un taux d'intérêt plus favorable, 5% au maximum, de sorte à rendre éligible au crédit immobilier tous les demandeurs de logements dont le salaire mensuel est supérieur à 15 000 dinars. M. R.