Les attentats du World Trade Center ont complètement modifié la perception de l'islamisme par l'Occident. Paris n'a fait que se plier à cette logique. La victoire du FIS aux législatives avortées du 26 décembre 1991 avait été à l'origine de la dégradation des relations entre Alger et Paris. Le soutien de l'Elysée au parti dissous avait été officiellement exprimé au lendemain de l'interruption du processus électoral, il “faut respecter la volonté du peuple”. Cette sortie de François Mitterrand avait créé une véritable crise qui allait durer tout au long des années 1990. Et l'apparition de la violence islamiste n'avait pas changé cette situation. Bien au contraire, le gouvernement français a maintenu son soutien au FIS et qualifié les terroristes de “groupes d'opposition armée”, un terme qui était partagé à l'époque par plusieurs capitales occidentales dont Londres et Washington, qui avaient tous misé sur l'effondrement de l'Etat algérien et l'arrivée des islamistes au pouvoir. L'enlèvement des fonctionnaires français au Télemly et le détournement de l'avion d'Air France survenu, en décembre 1994, avaient aggravé l'état des relations entre l'Algérie et la France. Cependant, les attentats du métro parisien en été 1995 avaient donné à réfléchir aux officiels français même si, dans le fond, l'évolution n'était pas encore notable. Si, en effet, plusieurs réseaux de soutien et d'acheminement d'armes vers l'Algérie avaient été démantelés, il n'en demeure pas moins que la France officielle a continué à apporter son soutien aux partis islamistes et à la réconciliation nationale. Sur le plan de la coopération sécuritaire, Paris avait maintenu son embargo, notamment sur la vente d'armes en direction d'Alger. L'épisode de New York, en 1995, où l'ancien président Liamine Zeroual avait refusé de rencontrer son homologue Jacques Chirac, en marge de l'Assemblée générale de l'ONU ayant été largement commenté à Paris. La presse française s'en est prise à l'Algérie, déterrant de nouveau le fameux “qui tue qui ?” et l'incapacité de l'Etat à faire face au terrorisme. L'élection présidentielle de novembre 1998, censée régler le problème de la légitimité des institutions n'a rien changé de la mauvaise image de marque du pouvoir algérien. Si du côté d'Alger, le dossier du FIS était définitivement clos, en France, la chose n'était pas perçue de la sorte. La gauche a persisté dans l'option islamiste même si plusieurs massacres contre des populations civiles avaient été perpétrés durant les années 1987-1998-1999. L'arrivée de Abdelaziz Bouteflika à la présidence de la République en avril 1999 avait suscité quelques espoirs de voir les relations se normaliser, surtout avec la visite du chef de l'Etat à Paris en juin 2000. Peu de choses avaient été arrachées à l'issue de ce déplacement puisque, sur le plan économique, la venue des investisseurs français n'était pas acquise. Même la loi sur la concorde civile n'avait pas changé grand-chose. Il aura fallu les attentats du 11 septembre 2001 pour que le monde modifie sa vision à l'égard de l'Algérie et de l'islamisme. Paris n'a fait que suivre cette nouvelle logique mondiale qui a fait de l'islamisme politique l'ennemi à abattre. S. T.