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Rêves brisés, fantasmes et répression !
LA PRESSE FRANCAISE :
Publié dans Liberté le 05 - 03 - 2003

Il est vrai que la fièvre est retombée, mais l'effet “Chirac” est là, palpable et, par moment, inquiétant. Du Figaro au Monde en passant par Libération et Le Parisien, que d'éloges à propos de l'Algérie qui sait accueillir et que d'amertumes quant à un pouvoir qui a scellé le grand divorce avec ses “sujets”.
Hier, dans sa livraison du jour, le quotiden Le Figaro a réservé sa deuxième ouverture ainsi que ses deux premières pages à l'événement.
“Emu par la chaleur de l'accueil, Jacques Chirac a fait un rêve devant le Parlement algérien. Il a exposé la vision d'une Algérie ouverte sur le monde, démocratique et prospère, d'une Algérie où régneraient l'état de droit et la justice sociale, d'une Algérie qui œuvrerait avec la France (…) à développer et stabiliser l'espace méditerranéen…”
Dans un autre article, Le Figaro traite de l'autre rêve, des visas, à propos desquels la population algéroise a assailli Jacques Chirac. Le président français a promis, ainsi, plus de facilités dans le traitement des dossiers des demandeurs de visas. Que des facilités, point d'augmentation du nombre le plus demandé en Algérie… encore un rêve.
Mais plus loin, et traitant de la contestation kabyle et du refus des autorités de laisser le représentant du mouvement aller à la rencontre de Jacques Chirac, à Alger, le quotidien, dans un article de notre confère correspondant du Figaro à Alger, Arezki Aït Larbi, dévoile l'autre face du pays qui contrastait avec la liesse des Algérois. Car à quelques centaines de mètres, d'autres Algériens étaient filtrés, refoulés par les forces de l'ordre qui avaient érigé des barrages, bloquant tout accès à la contestation. Le rêve se brise ici. Et ce ne sera pas cheb Mami qui le contredira. Lui qui subitement à cru être à Cannes au lieu d'Alger. Il a été subjugué par la liesse, dira-t-il au quotidien Le Parisien. D'où l'impression d'être à Cannes sur La Croisette. Il est vrai que l'on a les repères qu'on peut.
Dans le quotidien Le Monde, plus de rêve. Seulement des fantasmes. Comme ceux de l'opposion.
Car de Saïd Sadi à Mouloud Hamrouche, en passant par Ali Yahia Abdenour et le secrétaire national du FFS, le constat est le “même rejet du système”. Mais les conclusions quant à la visite de Chirac diffèrent.
“Elle conforte Bouteflika”, selon Djoudi Mameri du FFS.
Saïd Sadi, lui, préfère avoir de l'espoir, “la France reste prudente. Elle n'est pas tombée dans le panneau. J'en veux pour preuve le bon accueil réservé par Paris à la mi-janvier au Premier ministre Ali Benflis”. Sadi soutient-il Ali Benflis ? Non ce n'est pas ce qu'il dit au quotidien Le Monde. L'homme se réjouit à peine que Paris traite Bouteflika et Benflis, deux potentiels candidats, sur un pied d'égalité. Maigre espoir ? Probablement.
Par ailleurs, dans un autre article réservé à la visite de Chirac à Oran, le quotidien Le Monde affirme que l'“accueil des Oranais promettait d'être exceptionnel”. Bien vu. Chirac ne fantasme pas. Il sait que c'est une évidence pas comme les familles des disparus aux-quels le quotidien Libération a consacré un article, dans son édition d'hier.
“Algérie : les disparus sur la route de Chirac”, titre le quotidien.
Il est vrai que la question tient à cœur au quotidien Libération tout comme celle du “qui tue qui”.
Mais là, pour les familles des disparus, le drame est profond, et le sujet est compliqué, notamment pour les autorités algériennes.
L'on retrace le parcours du combattant auquel sont confrontées les familles, surtout les mères des disparus dans leur quête quotidienne d'information à propos d'un fils, d'un mari ou d'un frère. Mais là encore, les rêves risquent de ne plus être permis.
Et elle continue, la presse parisienne, à traiter de la visite de Chirac en Algérie, largement, sobrement, mais non sans nuances. Car la population algérienne n'a pas nuancé son accueil. Pas plus que son divorce avec son pouvoir.
Un pouvoir qui a abandonné la cité, trois jours durant, pour revenir, à nouveau, briser les rêves et semer la répression.
De la Kabylie jusqu'à Oran, les mêmes frustrations, les mêmes désillusions. Ce n'était pas Cannes. Juste un pays qui, l'espace de trois jours, a voulu respirer… la liberté. Mais pour combien de temps encore ?
H. B.


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