Pourtant, Bush avait tout fait au Nicaragua pour empêcher le retour au pouvoir d'un ennemi de la guerre froide, des pressions sur les rivaux d'Ortega pour qu'ils s'unissent face aux menaces ouvertes sur les relations bilatérales en cas de victoire de l'ex-sandiniste. Avec la victoire de l'ex-sandiniste, Daniel Ortega, à l'élection présidentielle au Nicaragua, le président américain se retrouve pratiquement sans amis dans l'hémisphère sud des Amériques. Les voisins de l'Oncle Sam sont retombés dans l'escarcelle de la social-démocratie, tournant le dos au néolibéralisme américain qui n'a fait qu'exploser la pauvreté dans le sous-continent. La Bolivie a rejoint l'axe antiaméricain de La Havane et de Caracas. Les victoires de Lula au Brésil ou de Michelle Bachelet au Chili portent le label de la nouvelle gauche latino-américaine, mais ne s'inscrivent pas dans l'anti-américanisme virulent. Bush subit un revers face à son homologue vénézuélien dans leur lutte d'influence en Amérique latine, même si la Colombie et le Costa Rica ont préféré rester dans le giron américain. Le président américain a pu empêcher l'accès du Venezuela au Conseil de sécurité, en imposant un pays latino encore sous sa main, mais Chavez promet de lui rendre la pareille au Nicaragua d'Ortega, qu'il va aider à sortir des griffes américaines. Chavez a promis à Ortega du pétrole à bas prix, comme il l'a fait avec tous les pays de la région qui ont pris des distances avec Washington. Le Conseil américain pour les affaires de l'hémisphère sud, basé à Washington, ne se fait plus d'illusions : les relations des Etats-Unis avec l'Amérique latine sont à leur point le plus bas depuis un siècle. Pourtant, Bush avait tout fait au Nicaragua pour empêcher le retour au pouvoir d'un ennemi de la guerre froide, des pressions sur les rivaux d'Ortega pour qu'ils s'unissent aux menaces ouvertes sur les relations bilatérales en cas de victoire de l'ex-sandiniste. Selon des proches d'Ortega, le futur gouvernement du Nicaragua va s'intégrer dans le projet d'unité régionale, le projet bolivarien qui a ressurgi ces dernières années en Amérique latine et dont le Mercosur préfigure le marché économique qui se veut à l'opposé des accords qui lient les Latinos aux Etats-Unis. Le vieux rêve bolivarien a été repris et actualisé par Hugo Chavez qui lui a inclus un volet économique soutenu par le pétrole vénézuelien. Le pétrole vénézuelien est devenu le cauchemar de la Maison Blanche. Washington ne s'est pas pour autant déclaré vaincu. Le département d'Etat doit certainement plancher pour que ce pays n'entre pas totalement dans l'orbite vénézuelienne. L'industrie textile nicaraguayenne (50% de l'économie) travaille exclusivement pour la grande distribution américaine. Paul Trivelli, ambassadeur des Etats-Unis à Managua, même s'il estime que la victoire d'Ortega mènera directement à l'instauration à Managua du modèle Chavez, pense que le retour à des relations de guerre froide est inimaginable, convaincu que Chavez ne cherchera pas l'aventure au Nicaragua. La prochaine manche entre Bush et Chavez se jouera en Equateur, au deuxième tour de l'élection présidentielle qui opposera, fin novembre, le magnat de la banane Alvaro Noboa, favori des sondages, au candidat de gauche Rafael Correa, ouvertement pro-Chavez. D. Bouatta