Symbole de la cause palestinienne, Yasser Arafat représente, deux ans après sa mort, un guide qui fait défaut en ces jours où les querelles politiques et l'impuissance face à la machine de guerre israélienne empoisonnent la vie des Palestiniens. Des milliers de personnes étaient attendues, hier, pour prendre part à la cérémonie prévue devant la tombe d'Arafat, dans la cour de la Mouqataâ, le siège de l'Autorité palestinienne. À cette occasion, Mahmoud Abbas a vivement critiqué la position israélienne en déclarant : “Si Israël veut la paix, il doit appliquer les décisions internationales et se retirer des territoires palestiniens et arabes jusqu'à la ligne verte de 1967, ainsi que reconnaître nos droits nationaux.” Celui-ci insistera sur le fait que “la paix et la sécurité ne se réaliseront pas sous l'occupation, la colonisation et l'annexion de Jérusalem par Israël. Le peuple palestinien n'abandonnera pas un centimètre de sa terre et, avant tout, de Jérusalem”. Il ne manquera pas de rappeler la main tendue des Palestiniens en affirmant : “Nous avons choisi la voie de la paix et des négociations, nous avons initié la trêve unilatérale et nous avons favorablement accueilli un rôle actif du quartette, mais le gouvernement israélien perd une opportunité en fuyant la table des négociations”. L'anniversaire de la mort de Yasser Arafat intervient au moment où la lutte du peuple palestinien pour l'indépendance vit des moments difficiles. Son successeur, Mahmoud Abbas, affaibli par l'arrivée des islamistes du Hamas en mars à la tête d'un gouvernement boycotté par l'Occident et privé de l'aide internationale, ne sait plus à quel saint se vouer pour poursuivre le combat. Cette situation amène les pires détracteurs de Yasser Arafat à le regretter aujourd'hui. Connu pour avoir été l'un de ses plus impitoyables critiques, l'ancien député Abdeljawad Saleh dira : “Si Arafat avait été en vie, la crise que nous traversons n'aurait pas eu lieu.” Il ajoutera : “Il était un fin tacticien capable de se confronter aux crises et y apporter des solutions.” Abdeljawad Saleh justifiera ses critiques envers lui : “Car il avait monopolisé la prise de décision et mis en place un système politique taillé sur mesure afin d'exercer le pouvoir comme bon lui semblait.” Mohammad Hourani, membre de la jeune garde du Fatah et pourfendeur des méthodes autocratiques d'Arafat, admettra lui aussi qu'“Arafat était l'homme-clé dans le règlement des problèmes des Palestiniens. Pragmatique, doté d'un sens politique et stratégique, il pouvait se sortir des pires crises et maintenir la cause palestinienne à flot”. Il avouera : “Nous critiquions Arafat car on voulait qu'il s'appuie sur une institution forte, mais nous nous rendons compte que l'institution a disparu avec lui.” Au sujet de la situation sécuritaire, marquée par des affrontements armés entre factions palestiniennes, Hourani rappellera qu'Arafat avait su sévir quand il fallait contre le mouvement islamiste à l'époque où celui-ci menait des attentats en Israël, compromettant un processus de paix aujourd'hui moribond. À titre comparatif, l'ancien ministre des Finances, Salam Fayyad, fera pour sa part remarquer que les fonctionnaires, pour la plupart en grève depuis septembre pour exiger leurs salaires, recevaient leurs traitements sans interruption sous Arafat, même lorsque celui-ci était assiégé dans son QG à Ramallah par l'armée israélienne et marginalisé par Washington. Ceci étant, la thèse de la mort de Yasser Arafat par empoisonnement est toujours d'actualité dans les territoires palestiniens. K. ABDELKAMEL