Sarkozy entamera demain une visite politique, dit-on, en Algérie. Politique intérieure d'abord, puisque le visiteur est aussi très probable candidat à l'élection présidentielle 2007 ; politique bilatérale aussi, puisque le plausible prochain chef d'Etat français annoncera certainement sa conception des relations franco-algériennes. Il est possible que le président de l'UMP se rende à Alger avec d'éventuelles arrière-pensées de campagne. Mais il est difficile de mesurer le bénéfice électoral d'un tel déplacement, la sensibilité de la communauté des Français d'origine algérienne à l'annonce prévue d'un raccourcissement des délais d'étude des demandes de visas n'étant pas évidente. Elle serait certainement plus réceptive à des déclarations d'ordre symbolique qu'à des faveurs consulaires. Celles-ci ne concernent, en fait, que les nationaux résidents et pourraient affecter une population qui a une réelle conscience de la dimension historique de sa condition. Au plan des rapports d'Etat à Etat, le voyage de Sarkozy survient à un moment charnière : après une longue lune de miel aussi sonore que stérile, les relations algéro-françaises connaissent un réel reflux qui dure depuis près de deux ans. Malgré l'intervention de Chirac pour faire invalider son article 4, la loi de février 2005 a remis en cause la promesse de refondation des rapports entre les deux pays. D'abord polémique, le recul se fait silencieux. Un silence trop perceptible, parce que le rapprochement se résumait durant des années aux promesses de retrouvailles, ardentes et répétées, des deux chefs d'Etat. La déception et la dépression qui entourent aujourd'hui la relation transméditerranéenne sont d'autant plus marquées qu'elle ne reposait sur presque rien d'autre qui, dans d'autres domaines, puisse témoigner d'une relance de la coopération bilatérale. Depuis dix-huit mois que Bouteflika et Chirac ne se sont plus rencontrés, la communication entre les deux pays semble comme en stand-by. L'exigence algérienne de repentance, qui s'est surtout manifestée après février 2005, est venue tardivement confirmer que dans cette affaire de traité d'amitié, l'effet d'annonce a été privilégié par rapport à l'effort de préparation qu'exige ce genre de projets. Décidé avant la mise à plat des contentieux, il a vécu ce que vivent les bonnes résolutions spontanément prises dans les instants d'enthousiasme. Sarkozy fait-il la visite de l'après-Chirac ? Ce qui voudrait dire que le mirage du traité d'amitié aura vécu et qu'une époque d'un pragmatique échange s'ouvre. De ce point de vue, et comme par un hasard de calendrier, on peut noter qu'elle survient à l'heure d'un changement d'ambassadeur de France à Alger. Et puisqu'il est question de mémoire, c'est le moment de rappeler que le représentant du Quai d'Orsay a exprimé, à Sétif, une des plus grandes avancées faites par un officiel français sur la question du passé colonial en Algérie en déclarant, à propos des massacres du 8 mai 1945, qu'il s'agissait d'“une tragédie inexcusable”. Les relations entre les deux pays restent peut-être à être refondées. Probablement sont-elles en attente de la coïncidence hypothétique de deux régimes qui en seraient à la hauteur. M. H. [email protected]