Nicolas Sarkozy est reparti comme il est arrivé : avec la promesse d'une procédure écourtée de demande de visa. Le reste était dans la symbolique : recueillement au monument aux martyrs de la Révolution, visite d'un cimetière chrétien et pèlerinage au monastère de Tibhirine. Circulez, il n'y a rien à signer. Et pas grand-chose à déclarer. “L'amitié, ça ne se décrète pas ; ça se vit.” La spontanéité parcimonieuse du peut-être futur président de la République française contraste avec l'expansion calculée de l'actuel locataire de l'Elysée. À tel point que bien malin qui nous dira s'il s'agit de la visite du ministre de l'Intérieur, du président de l'UMP ou du candidat à l'élection présidentielle française de 2007. Le ministre semble, dans cette annonce d'aménagements consulaires, avoir servi le candidat. Peut-être même que des électeurs d'origine algérienne retiendront, au moment de la candidature de Sarkozy, que le ministre de l'Intérieur qu'il fut leur aura facilité l'accueil de leurs proches. Le quidam national n'en demandait pas plus ; c'est bien plus parlant que la promesse d'une refondation documentaire de la relation algéro-française et les témoignages élogieux sur la réalité de notre démocratie et sur les progrès d'une poussive coopération industrielle auxquels Chirac nous a habitués. Contraint d'annuler la conférence de presse qui devait clôturer son séjour de moins de vingt-quatre heures, Sarkozy aura laissé derrière lui un goût de procédure expédiée. Le voyage ne pouvait point prendre l'allure d'une visite de travail, peut-être parce qu'il n'y a pas de projets communs à concrétiser, mais sûrement parce qu'il fallait éviter les sujets de possibles divergences, comme l'approche de la question de la mémoire partagée ou le problème de l'immigration clandestine. Disons qu'il fut question d'une simple visite de courtoisie par laquelle Sarkozy semblait s'adresser plus aux opinions respectives qu'à ses interlocuteurs officiels. Ce faisant, il nous prend déjà à témoin sur ce que sont les relations qu'il souhaite établir entre les deux pays, au cas où… Des relations faites de pragmatisme qui ne s'embarrasseront pas des préalables de repentir que les Algériens exigent. Nous voilà avertis. Pour n'avoir pas été fructueuse, en termes de signatures et de serments, la visite de Sarkozy aura été tout de même instructive sur une possible France de demain, faite d'un sens franc de son intérêt national et qui privilégie les modestes réalisations aux grands desseins sans lendemain. Si cette impression est conforme aux intentions de Sarkozy, il faut croire qu'il prend le contre-pied d'une démarche qui, jusqu'ici, a cultivé le paradoxe de l'abondance de résolutions et du défaut d'initiatives. C'est de cela que pâtissent les relations algéro-françaises. Si ces quelques enseignements et les préoccupations électorales de Sarkozy ne suffisent pas à justifier sa venue, il reste à constater que l'activité internationale constitue une permanente occupation de politique intérieure. L'usage médiatique qui en est fait légitime ces échanges pour eux-mêmes. D'ailleurs, Sarkozy n'était pas parti qu'on attendait déjà Prodi. M. H. [email protected]