Au moins 300 fûts contenant des produits chimiques toxiques, entreposés à l'Onapsa, menacent gravement la santé des habitants de la localité Emir-Abdelkader. Le risque d'une catastrophe écologique dont seront victimes des dizaines de citoyens est sur le point de se produire si des mesures urgentes ne sont pas envisagées par les responsables locaux. En effet, au moins 300 fûts, contenant des produits chimiques à haute teneur toxique, sont “entreposés” au niveau de l'Office national d'approvisionnement en produits agricoles (ex-Onapsa), une entreprise phytosanitaire “liquidée” en 1994. Pour attirer l'attention des hauts responsables sur le calvaire qu'ils vivent depuis plus de 25 années, les 500 familles de la localité de l'Emir-Abdelkader (ex-St-Rémy) alertent les pouvoirs publics sur le danger de mort qui les guette à tout moment. “Une toute petite allumette peut effacer de la carte la localité de St-Rémy dans un rayon de plus de 20 km à la ronde”, ne cessent de marteler les habitants comme pour conjurer le sort qui les frappes. Toutes ces déclarations et bien d'autres sont restées lettre morte et “aucun responsable, à quelque niveau que ce soit, n'a réagi à nos appels lancés depuis plus de vingt années”, clament des membres du comité de quartier de St-Rémy. En avançant des griefs particulièrement acerbes, les familles de St-Rémy ont visiblement pris les devants, au cours de la récente visite du ministre de l'Environnement et de l'Aménagement du territoire à Oran, pour dénoncer les répercussions d'une situation bloquée, qui se révèle être, aux dires mêmes des concernés, “une forme de hogra voulue par le laxisme des responsables à tous les niveaux”. Pourtant, des responsables de l'Inspection de l'environnement à Oran et l'ancienne P/APC avaient, dans un premier temps, décidé de transférer les fûts vers une destination qui n'était connue que par eux. Depuis 1977, aucune opération de reconditionnement des fûts abîmés n'a été entreprise, ajoutant à l'inquiétude grandissante des habitants vivant à proximité de l'ex-Onapsa. En octobre 2001, les habitants de St-Rémy sont avertis par les services de l'APC de Sidi Chahmi de “l'imminence” du déplacement des fûts vers un autre dépôt “plus étanche” après la découverte d'une forte concentration de sels minéraux toxiques dans les nappes phréatiques aux alentours de l'entrepôt de l'ex-Onapsa. Dans ce contexte, des dizaines de personnes ont effectivement vu leur état de santé se détériorer. Parmi elles, des hypertendus, des cardiaques, des insuffisants respiratoires, des asthmatiques et des malades chroniques. “Je suis un cardiaque et j'ai été hospitalisé à plusieurs reprises en urgence, à cause des émanations nauséabondes dégagées par les fûts toxiques endommagés”, se plaint ce père de famille demeurant à proximité de l'ex-Onapsa. “Nous sommes esquintés et au bout du rouleau. Comment voulez-vous qu'on vive dans de pareilles conditions, pendant tout ce temps, avec nos enfants en bas âge ?”, nous affirme cet autre père de famille au bord des larmes. “A cause de ces maudits fûts, nos enfants sont tout le temps malades. On nous a pourtant promis leur (les fûts, ndlr) enlèvement ou leur destruction”, s'insurgent les familles de la localité de St-Rémy. “Vous ne trouverez aucune manifestation de joie par ici, nous ne faisons qu'attendre qu'on vienne nous enterrer vivants”, lâchent, excédés, les membres du comité de quartier de St-Rémy. C'est précisément dans ce cycle fait d'incertitudes et d'inquiétudes que les 500 familles tentent de survivre, tout en prenant leur mal en patience. “Depuis plus de vingt ans, nous sommes confrontés à cet épineux problème qui fait des ravages parmi la population”, nous dira le médecin du dispensaire. Situation risible, les citoyens de Haï Emir-Abdelkader ne s'expliquent pas la réticence des responsables locaux face à cet état de fait grave. “La wilaya d'Oran se permet le luxe de dépenser 150 milliards de centimes pour des travaux d'embellissement de la ville alors qu'elle rechigne à débloquer un modeste fonds pour l'acquisition du matériel antipollution constitué de masques, de tenues et de fûts hermétiques afin de diminuer les risques de pollution toxique”, estime-t-on à St-Rémy. Mais, selon des rumeurs qui circulent dans certains milieux à Oran et à Sidi Chahmi, les multiples opérations de déplacement de ces fûts ont été reportées à plusieurs reprises pour des raisons qui restent encore à élucider. Contenant des produits pesticides à haute toxicité, les 300 fûts stockés depuis 1977 dégagent des émanations chimiques qui ont fini par contaminer les eaux des puits désormais interdites à la consommation. Contacté par nos soins, le responsable chargé du service de l'environnement à la DSP a affirmé tout ignorer des tenants et des aboutissants de ce dossier, de même que nos tentatives de contacter le P/APC de Sidi Chahmi ont été vouées à l'échec. Enfin, et en attendant que des mesures urgentes soient prises, les 500 familles de Haï Emir-Abdelkader en appellent au ministère de tutelle afin de “sensibiliser les responsables locaux qui se complaisent dans un silence coupable”. B. G.