Lisbonne prend ainsi ses distances avec sa position traditionnelle dans ce conflit. Cette fois-ci, il se range clairement du côté des résolutions des Nations unies qui classent le dossier dans le registre de décolonisation. La visite effectuée par le Premier ministre portugais, M. Jose Socrates, les 21 et 22 janvier en Algérie, a eu pour première conséquence, sur le plan politique, le repositionnement du Portugal sur la question du Sahara occidental. Le gouvernement de ce pays a vu, ces dernières semaines, sa perception évoluer à l'égard de ce conflit pour aboutir à une position que l'on peut qualifier de juste et équitable et qui tranche fondamentalement avec les déclarations précédentes des dirigeants portugais dans ce dossier. En effet, dans une déclaration commune rendue publique lundi passé à l'issue de la visite de M. Socrates à Alger, l'Algérie et le Portugal se sont prononcés pour le respect de la légalité internationale et du droit à l'autodétermination au Sahara occidental. Si, pour ce qui est de l'appréciation de la question par l'Algérie, les termes de la déclaration correspondent naturellement à sa position traditionnelle dans ce dossier brûlant, pour le Portugal, les convictions semblent avoir subi un remodelage qui ne peut qu'avoir des effets positifs sur la résolution d'un conflit qui perdure. Il y a quelques semaines seulement, lorsque le dossier du Sahara occidental a été débattu au sein de l'Assemblée générale de l'ONU, Lisbonne, comme Paris et Madrid notamment, a préféré s'abstenir lors du vote de la résolution qui a finalement été adoptée à la majorité. En signant la déclaration avec Alger, Lisbonne se détache nettement de l'axe Paris-Madrid qui pérennise un soutien indéfectible pour l'autre partie engagée dans le conflit, en l'occurrence le Maroc, pendant que les résolutions des Nations unies continuent de marteler qu'il s'agit bel et bien d'une question de décolonisation. À travers la déclaration, les deux parties ont réaffirmé leur attachement à “une solution juste, définitive et mutuellement acceptable du conflit, dans le cadre de la légalité internationale et des résolutions pertinentes des Nations unies, qui consacrent le droit à l'autodétermination du peuple sahraoui”. Elles ont également réaffirmé leur volonté de contribuer à la réalisation de cet objectif. Dans un toast à l'occasion du déjeuner offert lundi en l'honneur du Premier ministre portugais, le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, avait, par ailleurs, affirmé que l'Algérie ne pouvait accepter l'amalgame entre la construction maghrébine et la question du Sahara occidental qui est une question de décolonisation à parachever. “Nous ne pouvons pas accepter quelque amalgame que ce soit entre la construction maghrébine et la question du Sahara occidental. Il s'agit là d'une question de décolonisation à parachever nécessairement au moyen du libre exercice par le peuple sahraoui de son droit à l'autodétermination conformément au plan Baker, ainsi qu'aux résolutions du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale des Nations unies”, avait souligné le chef de l'Etat. Faisant le parallèle entre le conflit du Timor Leste, qui a amené l'indépendance de ce territoire sous l'égide de l'Onu, et celui du Sahara occidental, Bouteflika a soutenu, dans ce contexte, que le Portugal s'était distingué par “une mobilisation remarquable” en faveur du droit à l'autodétermination et à l'indépendance du peuple du Timor Leste, ajoutant qu'“il est particulièrement bien préparé pour percevoir l'importance d'un règlement juste et définitif de la question similaire du Sahara occidental”. Le président Bouteflika a indiqué qu'il perçoit, au sujet du Maghreb, “tous les questionnements” que les amis de l'Algérie et ses partenaires européens “se posent avec une certaine préoccupation”, soulignant, à cet égard, “l'attachement indéfectible de l'Algérie à l'idéal maghrébin en tant que choix stratégique incontournable, conforme à la fois aux profondes aspirations de tous les peuples maghrébins et à leurs intérêts les mieux compris”. H. Saïdani