Les audiences se suivent et se ressemblent cependant avec une variante. Les derniers inculpés, appelés à la barre, se rétractent par rapport à leurs déclarations premières faites lors de l'instruction. Après Ouala Abderrezak, c'est au tour de Chibane Bouziane, hier, de ne pas reconnaître ses déclarations précédentes lorsqu'il avait clairement avoué avoir signé des traites en blanc contre des sommes d'argent remises à chaque paraphe. L'accusé a répondu aux questions du juge sur ses transactions commerciales passées avec Sotrapla par le biais des traites avalisées par la BCIA. Il déclarera avoir signé deux traites de 13,1 et 13,5 milliards de centimes pour l'achat de sucre, mais qu'il n'a jamais réceptionné la marchandise. Il répondra, à l'instar des autres inculpés auditionnés dans la matinée, Mimouni Sid-Ahmed, Benjouka Djillali et Saïm Badreddine, tous commerçants de leur état, avoir voulu investir le créneau du sucre et qu'il avait entendu parler de la BCIA et des avantages qu'elle accordait, à travers la publicité faite autour de la banque privée. Le contact pris, Kharroubi Mohamed-Ali, le directeur régional, leur parlait des possibilités de crédit en recommandant, toutefois, Sotrapla comme fournisseur. La connexion établie entre le triptyque, les accusés ont connu pratiquement le même processus qui les conduira à répondre aux chefs d'inculpation de complicité de dilapidation de deniers publics. Les crédits accordés par la BCIA, pour Chibane, Mimouni, Benjouka et Saïm, ne sont garantis par aucune hypothèque, et les obligations d'assurer ces mêmes crédits, estimés à 160 millions de centimes, sont prélevées directement du compte du client pour régler la société d'assurances Star Hana, dirigée par l'un des frères de Mohamed Ali. À la question du président du tribunal sur la faisabilité de la chose, les inculpés répondront qu'“ils pensaient que c'était la procédure à suivre”. À chaque signature d'une traite au profit de Sotrapla pour l'acquisition de sucre, le directeur régional de la BCIA demandait aux clients d'en signer une deuxième, en blanc. Et cette pratique se répétait à chaque nouvelle traite. Mimouni Sid-Ahmed reconnaîtra, pour sa part, qu'il a été contacté par un certain Senssaoui Abdelghani, dit Selka Djawad, qui se faisait passer pour un représentant de la sarl Fouatih et Nebia. Il lui promet des marchandises à crédit à condition d'ouvrir un compte à la BCIA. Mimouni signera, plus tard, une trentaine de traites en blanc dont une partie à la BCIA et une autre à Tlemcen. À chaque signature, il se verra remettre 2 à 3 millions de centimes qu'il justifiera comme étant des avances que lui faisait Djawad. Benjouka Djillali dira qu'il travaillait déjà avec Sotrapla bien avant d'ouvrir un compte à la BCIA et que cette dernière lui a accordé un crédit sans aucune garantie de sa part. Il signera deux traites de 12,5 et 16 milliards de centimes pour l'acquisition de sucre et de café. Lorsque l'affaire éclate et que les clients, aux abois, “investissent” les locaux de la BCIA pour réclamer, Mohamed Ali leur fait signer des oppositions en affirmant que leur fournisseur est en fuite à l'étranger. Le représentant du ministère public reviendra sur les signatures des traites en montrant le paraphe aux inculpés. “C'est votre signature ?” Les accusés ont nié la paternité de la signature en déclarant que des traites étaient avalisées au profit d'accusés qu'ils n'ont jamais vus si ce n'est derrière les barreaux. Quant à Addou Samir, le gérant de Sotrapla, les accusés nieront l'avoir déjà rencontré auparavant. Alors que le procès bouclera, aujourd'hui, sa deuxième semaine, près de la moitié des inculpés a déjà été auditionnée. SAID OUSSAD