Lentement mais sûrement, les forces américaines capturent les chefs du régime de Saddam Hussein, mais la recherche des armes de destruction massive demeure un puzzle géant à peine entamé et un piège pour leur crédibilité, un mois après le début de la guerre. “Mosaïque”, “puzzle”, le terme est revenu régulièrement dans la bouche du général Vincent Brooks, porte-parole du commandement central (Centcom) américain dans sa base avancée d'As-Saliyah, au Qatar, à l'heure de décrire la tâche qui était l'un des buts essentiels de la guerre d'Irak. “C'est un puzzle de 1000 pièces qu'il va falloir reconstituer”, assure un porte-parole britannique au Centcom, “Saddam avait fractionné ses armes pour les dissimuler aux inspecteurs de l'ONU et les avait dispersées à travers l'Irak, mais principalement autour de Bagdad”. Il faudra inspecter “littéralement des centaines de complexes militaires à travers le pays”, et rien qu'à Bagdad “une vingtaine de palais, tous pourvus d'installations souterraines”, souligne ce Britannique sous le couvert de l'anonymat. Les Etats-Unis ont annoncé l'envoi d'un millier d'experts qui appuieront les recherches déjà entamées sur place par quelques centaines de militaires américains et une équipe de spécialistes équipés de laboratoires mobiles. Jusqu'ici, seuls de possibles composants d'armes de destruction massive ont été trouvés, comme des ogives d'artillerie pouvant être chargées d'agents chimiques... retrouvées vides. Ce qui n'entame en rien la conviction des Etats-Unis et de leurs alliés quant au fait que Saddam Hussein possédait ces armes et était prêt à s'en servir, comme il l'avait déjà fait contre son propre peuple : Kurdes et chiites tués par centaines de milliers. L'un des “succès” de la rapide offensive menée par la coalition américano-britannique est précisémment d'avoir “réussi à éviter que (ces armes) soient utilisées contre nos troupes”, selon le général Brooks. Pour le reste, le général américian renvoie aux informations qu'on attend des dignitaires de l'ancien régime “qui savent des choses sur ce programme” d'armes de destruction massive. “Je vous le dis pour l'histoire : nous n'avons rien”, a benoîtement déclaré l'un d'eux, le général Amer al-Saadi, conseiller scientifique de Saddam Hussein, en se rendant chez les militaires américains à Bagdad. Même s'ils exhibent un jour des preuves, les instigateurs de la guerre d'Irak sont bien conscients des soupçons qui pèseront sur eux. “C'est quelque chose qui nous préoccupe”, disait récemment le secrétaire américain à la Défense Donald Rumsfeld, estimant que toutes les précautions prises “n'empêcheront pas des pays, des gens de parler de manipulation”. Le chef des inspecteurs en désarmement de l'Irak, Hans Blix, a proposé les services de son équipe pour apporter un sceau de crédibilité à toute éventuelle trouvaille. Pour l'heure, les Etats-Unis n'ont pas retenu son offre.