La Cour suprême du Pakistan, complètement remaniée sous l'état d'urgence, a proclamé officiellement le deuxième mandat du général Musharraf en tant que président en civil cette fois. La cérémonie de son investiture pourra avoir lieu, aujourd'hui ou demain car, il lui reste à démissionner de son poste de chef des armées, ce qu'il a promis de faire dès qu'il sera officiellement réélu. Il aura cédé en cela aux intenses pressions de la communauté internationale, en particulier de Washington, qui souhaitait un retour à la démocratie avec un président en civil, mais pas complètement à celles de l'opposition, qui réclame toujours la levée de l'état d'urgence afin de garantir que les législatives annoncées pour le 8 janvier seront réellement libres et équitables. Cependant, toujours divisée, l'opposition ne parvient pas à se fédérer derrière la menace d'un boycott du scrutin, en particulier l'ex-Premier Benazir Bhutto, qui hésite après avoir longtemps tenté de négocier un accord de partage du pouvoir avec Musharraf. Musharraf, qui a cédé sous la pression essentiellement de Washington, dont il est l'allié clé dans sa guerre contre le terrorisme et qui est son principal pourvoyeur de fonds, en annonçant une date ferme pour les législatives, promettant de quitter l'uniforme et faisant libérer plus de 5 000 avocats, magistrats, membres d'organisation de défense des droits de l'homme et de partis d'opposition arrêtés ou assignés à résidence en vertu de l'état d'urgence, n'a pas cédé sur la levée de la loi d'exception, toujours réclamée par la Maison-Blanche, même si c'est de manière moins insistante depuis qu'elle loue ses derniers assouplissements. Le Commonwealth, qui regroupe le Royaume-Uni et ses anciennes colonies, a pris le relais des Etats-Unis en suspendant le Pakistan jusqu'au retour de la démocratie. Musharraf, qui n'a pas répondu à la demande du Commonwealth de lever l'état d'urgence, sait que la mesure n'est que symbolique. En 1999, il avait fait l'objet d'une mesure identique pour avoir fait un coup d'Etat. Islamabad devait rejoindre l'association à sa session de Malte en 1995 avec la promesse de mettre fin à son régime militaire. Musharraf ne se soucie que de l'attitude des Etats-Unis. Il reste que tous les yeux sont tournés vers Mme Bhutto, dont le Parti du peuple pakistanais, le principal mouvement de l'opposition, a autorisé ses membres à déposer leurs candidatures aux législatives mais promis de les retirer s'il décidait finalement de bouder le scrutin. Washington exerce sur elle des pressions pour reprendre ses négociations avec Musharraf. Mme Bhutto n'a, apparemment, pas d'autre choix. D. B.