La Maison-Blanche se démène à nouveau pour défendre le président George W. Bush soupçonné d'avoir exagéré la menace d'armes de destruction massive, non plus celles de l'Irak de Saddam Hussein, mais celles dont il accuse l'Iran de vouloir se doter. La Maison-Blanche tâche depuis lundi de se dépêtrer des retombées non seulement diplomatiques, mais aussi politiques d'un rapport du renseignement remettant en question le discours sur l'Iran d'un président au crédit déjà passablement entamé. Le rapport dit que l'Iran aurait arrêté en 2003 un programme secret pour fabriquer l'arme nucléaire et serait moins déterminé aujourd'hui à posséder la bombe atomique. Même s'il juge que le régime islamique se réserverait l'option nucléaire militaire en poursuivant des activités pouvant être détournées de leur application civile, le renseignement risque de compliquer considérablement les efforts de M. Bush pour obtenir de nouvelles sanctions internationales contre Téhéran. Mais il a aussi brutalement réveillé de vieux démons intérieurs : le renseignement, dont les informations erronées sur la menace représentée par Saddam Hussein ont servi à justifier la guerre en Irak, a-t-il retenu la leçon ? Comment le président et son gouvernement ont-ils pu sonner l'alarme contre l'Iran avec une ardeur telle qu'ils ont fait craindre une nouvelle guerre ? À ces questions, les approximations du président et de son administration en ont ajouté une autre : le 28 août, quand il mettait en garde contre le péril d'un “holocauste” nucléaire si l'Iran avait la bombe, ou le 17 octobre, quand il brandissait le spectre d'une troisième guerre mondiale, M. Bush savait-il que le régime islamique aurait arrêté son programme secret d'armes nucléaires ? Non, a paru répondre M. Bush mardi, au lendemain de la publication du rapport du renseignement. Or, de l'aveu même de la Maison- Blanche, le numéro un du renseignement, Mike McConnell, a informé M. Bush dès le mois d'août. Si M. McConnell lui a dit : “Nous avons de nouvelles informations, il ne m'a pas dit quelles étaient ces informations”, a rapporté M. Bush. Depuis mercredi, l'administration, confrontée aux incohérences de sa défense, a précisé sa version. Selon la porte-parole de la Maison-Blanche Dana Perino, M. McConnell a révélé deux choses à M. Bush : premièrement, que le renseignement avait établi que l'Iran avait bel et bien eu un programme nucléaire secret ; deuxièmement, qu'il “se pourrait qu'il ait été suspendu”. Et il lui a dit que le renseignement avait besoin de davantage de temps pour consolider ses informations. “Je vous accorde que (M. Bush) aurait pu être plus précis dans ses propos",a dit la porte-parole du président. Mais il "disait la vérité.” Et ce n'est que le 28 novembre, cinq jours avant la publication du rapport, que M. Bush a été informé dans le détail de son contenu. Pour l'administration Bush, cela ne change rien : l'Iran reste un “danger”. Beaucoup s'étonnent que M. Bush n'ait pas été avisé plus tôt de baisser le ton. Selon le New York Times, le rapport du renseignement a donné lieu il y a deux semaines à une réunion de l'équipe de M. Bush pour la sécurité nationale, avec le vice-président Dick Cheney, mais sans le président. Joseph Biden, sénateur de la majorité parlementaire démocrate hostile à M. Bush, et candidat à la succession de M. Bush, “refuse de croire” que le président n'ait pas été mis en garde par son entourage. “Si c'est vrai, il a l'équipe la plus incompétente dans l'histoire (...) moderne de l'Amérique, et il est l'un des présidents les plus incompétents dans l'histoire moderne de l'Amérique.” R. I./Agences