Si l'Algérie est aujourd'hui un immense chantier, elle peine à tirer profit des retombées de massifs investissements engagés en matière de modernisation d'infrastructures. Les échéances 2008-2009 seront certainement décisives pour le gouvernement. L'Algérie, qui a tiré profit de la flambée des prix du pétrole sur le marché mondial, a lancé un important programme d'investissement public, le Programme complémentaire de soutien à la croissance (PCSC), estimé à plus de 140 milliards de dollars, pour développer les services publics et faire face aux retards enregistrés dans la réhabilitation de l'infrastructure. Deux ans après que ce programme fut lancé, l'Algérie est en chantier. Autoroute Est-Ouest, modernisation et extension de voies ferrées, métro et tramway, réalisation de grosses usines de dessalement de l'eau de mer, autant de mégaprojets devront donner une autre image de l'Algérie, lesquels devraient, normalement, booster l'économie algérienne. Aucun bilan officiel, n'a été fait, des deux années de mise en œuvre du Programme complémentaire de soutien à la croissance, sauf peut être la revue des dépenses publiques réalisée par la Banque Mondiale, mais qui n'a pas traité des projets précis. Ce qui est certain, en matière d'enveloppe budgétaire le total du PCSC a déjà été autorisé. Grâce aux deux plans lancés par le président de la République, bien qu'étant toujours élevé, le taux de chômage a été réduit de manière drastique au cours de la dernière décennie. Cette réduction s'explique en grande partie par l'augmentation des taux de dépenses publiques. Les taux officiels de pauvreté ont baissé. La croissance de la consommation privée par habitant s'est redressée. Pour autant les emplois nouvellement créés pourraient n'être que des débouchés temporaires et les tensions sociales persistent. Les besoins sociaux de la population ont été en partie satisfaits même si, à l'évidence, les réponses demeurent encore insuffisantes, compte tenu des retards accumulés et des besoins croissants. L'Algérie est dans la bonne voie pour atteindre l'objectif de développement pour le millénaire en matière d'eau et d'assainissement consistant à réduire de moitié le nombre de personnes sans accès durable à une meilleure eau potable et assainissement de base d'ici 2015. Un certain nombre d'ouvrage a été réalisé. Plusieurs usines de dessalement d'eau de mer. La disponibilité de l'eau, du moins dans certaines grandes villes est palpable. Le gouvernement a progressé sur deux fronts. Premièrement, il a modernisé le cadre législatif pour la gestion de l'eau et adopté des changements institutionnels majeurs. Ceci a permis l'introduction d'agences de bassin, la participation privée par le biais de concessions. Il s'est embarqué dans un important programme de mobilisation des eaux de surface (67 barrages d'ici 2009) et de dessalement (12 stations) afin de combler le déficit. Deuxièmement, il a consacré un niveau de plus en plus important de ressources aux investissements hydrauliques. Cependant en matière d'organisation et de gestion beaucoup reste à faire. C'est peut-être au niveau du secteur des travaux publics, que les choses bougent le plus. Des projets d'envergure tels que l'autoroute Est-Ouest, les rocades d'Alger, le métro d'Alger, sont en cours de réalisation. Plusieurs routes et ouvrages d'art ont été réalisés. Pour autant des goulots d'étranglement persistent et constituent une contrainte pour les ports, les routes, et le transport urbain et font obstacle à la croissance économique. Par contre, au niveau de l'habitat, les choses traînent en longueur. Alors que le président de la République s'est engagé à réaliser un million de logements à l'horizon 2009, des programmes AADL lancés en 2001 n'ont pas été encore achevés. La Banque mondiale souligne, dans son rapport sur la revue des dépenses, qu'une faible efficacité de l'investissement public découle principalement d'une qualité de projet inégale. Les projets d'envergure ne sont souvent pas conformes aux standards techniques minimes et peu, voire aucun suivi n'est effectué étant donné qu'aucune base de données centralisée des projets PCSC n'existe. En général, ceci donne lieu à des objectifs de projets seulement partiellement réalisés. Plusieurs projets ne devraient même pas être poursuivis. Ces problèmes sont intensifiés par une allocation de ressources trop grande par rapport à la capacité d'absorption locale. Alors que les coûts initiaux sont pour la plupart sous-estimés, les coûts finaux sont, à l'inverse, très souvent surestimés. L'Algérie se trouve actuellement à un carrefour important. Alors que l'ambitieux PCSC progresse, le pays est confronté à un défi fondamental : le créneau d'opportunités sera-t-il exploité à l'appui d'une croissance à long terme de l'économie et de l'emploi et d'un développement social permanent, —ou sera-t-il perdu pour des raisons d'inefficacité, de gaspillage, et de corruption? Meziane Rabhi