Sur une liste de 600 djihadistes découverte par l'US Army, les Algériens ne représentent que 7,2%, loin derrière les Saoudiens et les Libyens. Les fiches sommaires des 36 djihadistes algériens en Irak trouvées par l'armée américaine à Sinjar, et les rares détails qu'elles contiennent, notamment ceux liés aux contacts et coordinateurs, prouvent qu'il y a une filière algérienne de recrutement pour Al-Qaïda Irak. Le document, en effet, fait référence aux nom, prénom, parfois l'un ou l'autre, le pseudo djihadiste du candidat, ses coordonnées, son adresse et numéros de téléphone, mais surtout un détail important, le coordinateur ou celui qui l'a recruté et lui a établi le lien avec un contact en Syrie, la destination finale et, bien entendu, pour une majorité d'entre eux, les objectifs. Les 36 candidats algériens ont rencontré pas plus de trois personnes en Syrie, des personnes ayant des liens avec les recruteurs algériens. Sur le total des 600 djihadistes de la liste découverte par l'armée US, les Algériens représentent 7,2% derrière, en tête du peloton les Saoudiens avec 244 soit 41%, que les autorités avaient refusé par le passé de reconnaître, les Libyens 112, soit 18,8%, les Syriens 8,2% représentant 49 et les Yéménites avec 48, soit 8,1%. Une bonne partie de ces terroristes qui se flanquent du titre de djihadistes pour l'instauration de la ouma islamia se classe dans la catégorie extrême de kamikazes. Cette mention a été retrouvée également sur leurs fiches. La catégorie représente 56,3% de l'ensemble de la liste. Les Algériens sont 5, soit 13,9%, alors que les combattants sont plus nombreux (30). Un seul a un autre objectif, mais qui n'est pas précisé. Même si les fiches ne regorgent pas d'informations, il n'en reste pas moins que le peu de détails qu'elles recèlent permettent de se faire une idée sur ces terroristes. La wilaya d'El-Oued a fourni le plus gros du contingent (36,4%). Ce qui peut s'expliquer par le fait que cette ville s'est déjà fait connaître dans ce domaine avec les premiers Algériens partis combattre aux côtés des Afghans contre l'occupation russe. Nombre d'entre eux sont rentrés au pays ou ont été expulsés après la chute du régime des talibans qu'ils ont continué à soutenir jusqu'à l'intervention des USA. Repliés au Pakistan, ils ont été arrêtés par le régime d'Islamabad, l'allié qui décida de renvoyer les combattants arabes dans leur pays d'origine. C'est ainsi qu'on vit ces “combattants” d'un autre genre pour la première fois dans les rues d'El-Oued. Pas étonnant que ces derniers aient donné la leçon, encouragé, ou influé sur les candidats pour aller “libérer” l'Irak de l'occupation des apostats et impies occidentaux. Et sous la bannière d'Al-Qaïda. Un seul candidat pourtant mentionne qu'il a établi le contact grâce à un élément du GSPC aujourd'hui devenu Al-Qaïda Maghreb. Les autres ont été recrutés ; sept noms sont régulièrement revenus sur les fiches ; par un contact direct noué dans les quartiers, par le biais de connaissances, dans les mosquées. L'un d'entre eux a été recruté directement lors du pèlerinage. Hormis Samir, Jamel, Abdelhadi et Haïder, les autres membres recruteurs de ce groupe, qui semblent opérer en réseau, sont désignés par des pseudos, “les Abou…”, les mêmes noms sous lesquels ils désignent les recrues une fois engagées. Une fois dans le filet, les recrues font le voyage en Syrie par avion où elles sont attendues, là aussi, par une poignée de contacts cités dans les documents, chargés de les “convoyer” vers l'Irak par un point de passage à la frontière. La plupart de ces Algériens ont emprunté le même chemin. Ils portent des passeports, des objets, montre, bague, MP3, et de l'argent. Lorsqu'ils arrivent en Syrie, ils sont à la merci de leurs contacts qui les délestent de tous leurs biens, y compris l'argent. C'est à leur demande qu'ils donnent tout ce qu'ils ont. Obéissants, ils acceptent toutes les exigences de ces contacts. Exigences désignées par la case “contribution”. Droits de passage ? Contribution à la caisse d'Al-Qaïda ? Ou est-ce un simple business de contrebandiers convertis en passeurs ? Ces djihadistes semblent avoir un point commun, aller combattre en Irak, mais il est difficile de leur trouver d'autres points communs. Ils sont issus de différentes régions, de différentes catégories sociales, chômeur, employé, fonctionnaire, agent de sécurité, étudiant… Et le plus surprenant demeure ces numéros de téléphone, fixe et mobile, personnels et d'amis ou de parents qu'ils ont laissés qui, en toute circonstance, peuvent mener à des pistes d'identification, perspective préjudiciable tout au moins aux parents en cas d'enquête. À moins que se cachent derrière ce recrutement des motivations financières, des promesses de rémunération que pourrait, au pire des cas, en cas de décès, encaisser le titulaire du numéro de téléphone laissé sur la fiche. Sinon à quelles fins laissent-ils ces précieuses coordonnées ? Yacine S.