Sous la médiation du Qatar, la majorité et l'opposition libanaises sont parvenues, hier à Doha, à un accord mettant fin à 18 mois d'une crise qui a failli dégénérer en guerre civile. Le général Michel Sleimane devrait être élu rapidement président de la République. Alors que tout semblait compromis mardi après-midi en raison du blocage persistant dû au refus de faire des concessions de la part des différentes parties, un accord est finalement intervenu tôt hier matin entre l'opposition et la majorité libanaises. Apparemment, l'ultimatum fixé par le comité arabe conduit par le Qatar aux opposants libanais, qui ont déjà rejeté l'une de ses propositions, a fini par porter ses fruits. Ainsi, la majorité libanaise et l'opposition, appuyée par l'Iran et la Syrie, sont parvenues à un accord de sortie de crise, repoussant ainsi le spectre d'une nouvelle guerre civile. Il a été convenu qu'un nouveau président libanais sera élu “dans les 24 heures”, selon le Premier ministre qatari, cheikh Hamad ben Jassem Al-Thani, qui a fait l'annonce de la conclusion de l'accord, lors d'une cérémonie officielle réunissant l'ensemble des dirigeants des deux camps, qui participaient depuis vendredi soir à ces négociations. Le point le plus important de cet accord semble être ce consensus sur une clause interdisant à l'avenir tout recours aux armes à des fins politiques. Il est stipulé clairement que le texte “interdit le recours aux armes et à la violence dans tout conflit, quels que soient les conflits ou les circonstances”, a souligné le Premier ministre qatari dans son intervention. Il a ajouté que “les parties sont convenues que le président du Parlement convoquerait une session de la Chambre dans les 24 heures pour élire le candidat du consensus, le général Michel Sleimane, à la présidence de la République”. Pour confirmer la solidité de l'accord, le président du parlement libanais, Nabih Berri, a évoqué le sit-in organisé depuis fin 2006 dans le centre-ville de Beyrouth par l'opposition. Le démantèlement du campement a effectivement immédiatement commencé. Pour rappel, en signe de protestation contre le gouvernement, l'opposition avait dressé fin 2006 des tentes tout au long des routes menant au bâtiment abritant le gouvernement, transformant le centre de Beyrouth en une ville fantôme et provoquant la fermeture de près de 200 commerces, ainsi que la suppression de milliers d'emplois. Le 7 mai dernier, la crise politique libanaise avait dégénéré en affrontements sanglants entre factions rivales qui avaient fait 65 morts en une semaine. Cet accord, qui désamorce la crise, tout en laissant en suspens des questions de fond comme l'armement du Hezbollah et les clivages confessionnels, a été accueilli avec un grand soulagement par plusieurs capitales, notamment Damas, Riadh, Téhéran et Paris. Ainsi, la Syrie s'est félicitée de l'accord conclu à Doha, a indiqué à Manama le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Al-Mouallem. Il a souligné “l'importance de l'entente à laquelle sont parvenus les frères au Liban” et “espéré que cette entente soit un prélude à un règlement de la crise politique au Liban”. L'ambassadeur d'Arabie saoudite au Liban, dont le pays est un allié de la majorité parlementaire libanaise, a affirmé le soutien de son pays à l'accord sur une sortie de crise au Liban. Le président français Nicolas Sarkozy a jugé que l'accord sur une sortie de crise au Liban conclu mercredi au Qatar est “un grand succès pour le Liban”, et qu'il doit être “mis en œuvre dans son intégralité”, selon un communiqué de l'Elysée. Le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Mohammad Ali Hosseini, a affirmé que l'Iran accueillait favorablement l'accord sur une sortie de crise au Liban conclu à Doha, a rapporté l'agence Isna. Principaux points de l'accord sur une sortie de crise au Liban - Le président du Parlement convoquera une séance de la Chambre dans les 24 heures pour élire le chef de l'armée Michel Sleimane à la présidence de la République. - Un gouvernement d'union nationale de 30 membres sera formé : 16 ministres pour la majorité, 11 pour l'opposition, les 3 autres à nommer par le président élu. - Toutes les parties s'engagent à ne pas démissionner du gouvernement ou obstruer l'action du gouvernement. - La loi électorale de 1960 est adoptée pour les élections législatives de l'an prochain, avec des amendements concernant les trois circonscriptions électorales de la capitale, Beyrouth. - Le recours aux armes ou à la violence à des fins politiques est interdit. - Le dialogue reprendra pour étendre l'autorité de l'Etat sur toutes les régions du pays. Ce dialogue sera conduit par le nouveau président. - L'autorité sur les forces de sécurité et militaires sera concentrée dans les mains de l'Etat. - L'autorité de l'Etat s'étendra sur toutes les régions du pays de manière à ce que les hors-la-loi n'échappent pas à la justice. - Les dirigeants politiques libanais réitèrent leur engagement à s'abstenir immédiatement d'user d'un langage qui exacerbe les tensions politiques ou confessionnelles, ou de s'accuser mutuellement de trahison. K. ABDELKAMEL