“Salaires de la honte ; travailleurs en grève.” La mobilisation a été quasi-totale à travers tout le pays. Les établissements sanitaires de la capitale étaient paralysés, hier, en raison de la grève des travailleurs de la santé, doublée de celle des praticiens spécialistes, en débrayage depuis plus de vingt jours. Cette grève, dont le taux de suivi est estimé à près de 100% par la fédération des travailleurs de la santé et de la protection sociale (affiliée à l'UGTA), touche l'ensemble des établissements sanitaires du pays. Dans la capitale, les grands hôpitaux, comme Mustapha-Bacha et Beni-Messous, étaient déserts, assurant juste le service minimum. Les travailleurs revendiquent la révision de leur statut et l'augmentation de leurs salaires, à travers notamment l'institution d'un régime indemnitaire conséquent. Ils veulent ainsi des indemnités de risque de contagion et de travail posté, de travail de nuit, de zone non géographique mais aussi des primes de documentation, de garde cumulable, de panier et de transport. La fédération revendique, également, une augmentation de 100% des salaires, la réservation d'un quota de logements sociaux au profit des travailleurs de la santé, la formation continue, le recyclage de l'ensemble du personnel et la nomination des paramédicaux à la tête des sous-directions de soins. Abdelkader Chouguer, chargé des conflits sociaux et de la législation à la fédération, s'est indigné que le ministère de la Santé tourne le dos à une grève de cette taille. “Nous constatons, avec regret, l'attitude indifférente du ministère à notre égard ; il fait comme s'il n'était pas concerné. Pour nous, cette grève est appelée à être reconduite, dès la semaine prochaine, si la situation reste inchangée d'ici à ce soir”, nous a-t-il affirmé. Aujourd'hui, une conférence de presse est prévue au siège de la FNTS, situé à l'intérieur même de la Maison du peuple (siège de l'UGTA, à Alger). Les collaborateurs de Chouguer étaient au téléphone, recueillant des informations auprès des délégués régionaux pour suivre l'évolution de la grève. Le débrayage concerne les paramédicaux et les ouvriers professionnels (ambulanciers, agents de sécurité, femmes de ménage, hôtesses d'accueil, etc.) À l'hôpital de Beni Messous, près de 2 000 travailleurs ont marché, dans la matinée, à l'intérieur de l'établissement pendant deux heures. Ils ont maintenu des piquets de grève l'après-midi, tout en restant à l'écoute des autres structures sanitaires vers lesquelles ils ont envoyé des émissaires. À l'entrée de l'hôpital, une banderole est accrochée au portail : “Salaires de la honte, travailleurs en grève.” “Ici, le mot d'ordre est respecté à 100%. Evidemment, nous avons assuré le service minimum dans tous les blocs et un service complet aux urgences”, informe un syndicaliste. Rassemblés autour de nous, la mine défaite, les travailleurs s'arrachent la parole. Certains exhibent leurs bulletins de paie, “nous avons honte de nous présenter aux guichets de paiement de la poste, tellement nos salaires sont maigres.” “J'ai 13 ans d'expérience et un salaire de 9 000 DA !”, insiste cet ouvrier. Pour beaucoup d'autres, les salaires ne dépassent pas 6 000 DA , moins que le SNMG. Le syndicaliste exprime son opposition à la réforme hospitalière : “Nous sommes contre et toute la famille de la santé est avec nous. Vous devez savoir que nous avons les plus bas salaires du pays !” Il existe treize établissements hospitaliers à Alger dont quatre centres hospitalo-universitaires. L. B.