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Boumerdès, dans l'enfer des camps
Insécurité, promiscuité, insalubrité
Publié dans Liberté le 28 - 05 - 2003

“Maintenant qu'ils ont commencé à construire des toilettes, c'en est fini pour nous. On y restera durant des mois”, prédit Abdelghani. Le regard rivé sur les briques de parpaing amoncelées dans un coin du camp, le sinistré voit l'avenir en noir. Les cheveux hirsutes, les yeux bouffis et la mine abattue, il laisse errer ses souvenirs dans l'immense solitude du camp. Le brouhaha ambiant ne semble guère le perturber. Abdelghani reste là, uniquement accaparé par les briques de parpaing et un groupe de maçons qui arrivent pour en faire des latrines. “Nous avons tout perdu, nos foyers et notre dignité. Il ne nous reste que ce camp…” Balayant de sa main le triste panorama, le sinistré réprime un sanglot. Devant lui, se dresse un monde surréaliste, un concentré de détresse humaine contenue dans un stade, devenu le cimetière des plus infimes espoirs. Une semaine vient de s'écouler, de couler en sanglots intarissables depuis l'effroyable séisme. Rescapés de l'apocalypse, les miraculés n'ont eu d'autres choix sinon abriter leurs restes de vie sur un bout de trottoir. C'est au bout d'une insoutenable attente, de nuits sombres ponctuées par des répliques affolantes que les plus chanceux ont pu bénéficier de refuges un peu plus confortables. Seulement les plus chanceux sont ceux qui, dans ces circonstances précises, ont pu se dénicher une malheureuse petite tente. Et ce n'est guère la fin de son calvaire.
Mardi, 27 mai. Stade Djillali-Bounaama, centre de Boumerdès. Alignées les unes derrière les autres, les tentes vertes plantées dans le vaste parking rappellent étrangement les camps de réfugiés. Les victimes de la guerre ici sont des familles poussées à l'exode par la véhémence de la nature et l'inqualifiable complicité des hommes. “Souvenez-vous de la fameuse comptine, les maisons en papier et les escaliers en carton. C'est là-bas que nous habitions”, plaisante amèrement Daouiya. De son appartement situé à la cité des 1 200-logements, aucun mur, aucun meuble n'a résisté au massacre. “J'y suis retourné ce matin pour voir si les opérations de déblaiement avaient commencé. Je ne me fais pas d'illusions. J'espère seulement retrouver la paperasse”, confie Daouiya. Dans le tas de papiers qu'elle souhaite récupérer, la jeune femme veut ainsi recouvrer un pan de son identité, celle que les murs effondrés n'ont pas effacée. Au camp des sinistrés, sur une parcelle de gazon asséché au soleil, des vêtements sont jetés pêle-mêle. Des enfants fouillent dans le tas bigarré. Les petites mains retournent la montagne de linge puis s'enfuient à l'arrivée d'un camion benne qui déverse sur le tas une nouvelle quantité de vêtements. “Pour le linge ça va. Mais j'ai besoin de couches bébé. Mes enfants souffrent d'une diarrhée aiguë depuis deux jours”, affirme Farida, une énième sinistrée du camp. Avec d'autres femmes, elle prend d'assaut un dépôt de la protection civile où sont entreposés les vivres. “Je veux aussi du lait et des farines”, demande-t-elle à un pompier. L'embarras se lit dans ses yeux. Ses mains hésitent à prendre les dons. “Nous sommes réduits à la mendicité et à la clochardisation alors que nous étions comme tout le monde”, dit Farida dans un profond soupir. Elle se tait puis reprend, illuminée, par un sourire inattendu. “Je sais que tout le monde est affecté par ce qui vient d'arriver, sinistré ou pas. Regardez !” Farida désigne de la main un camion de dons qui arrive. “Des gens que nous ne connaissons pas nous ont ramené à manger. Ils nous ont distribué des plats chauds. Ce peuple est formidable”, reconnaît la jeune femme. Ammi Ali est tout aussi réconforté par l'élan de solidarité populaire. En revanche, il est outré par la démission des autorités. “Vous voyez mes voisins là-bas, ils dorment encore à la belle étoile car les tentes ne sont pas suffisantes”, dénonce le vieillard. Lui-même n'est guère mieux loti. Afin de prémunir les femmes et les enfants, lui et quelques-uns de ses voisins n'ont eu d'autres choix que de passer leurs nuits dehors. Résultat, plusieurs familles sont contraintes à une éprouvante promiscuité. Sous la bâche, la vie s'organise. Se laissant aller à une coquetterie affligeante, Nacéra balaye l'entrée de sa tente. Du linge est tendu sur un fil attaché aux extrémités du refuge. Des jerricans d'eau sont posés dans un coin. Dans un désir inavouable de se reconstruire, Nacéra a installé un réchaud et fait la cuisine. “ça m'occupe. Et puis. C'est tout ce que j'ai fait toute ma vie”, confie-t-elle. La jeune femme est dynamique. Elle saute d'une corvée à une autre et n'entend point se laisser gagner par le désespoir. A quelques mètres pourtant, sous un abri de fortune, une autre femme a cessé de vivre. Son souffle, son lait servent uniquement à tenir en vie sa petite Manel. Le bébé a deux ans. “Elle avait sa propre chambre avec plusieurs images collées sur les murs. Maintenant, on est là sous une couverture”, raconte la maman triste. A la place des murs qui se sont effondrés, la mère et ses enfants ont trouvé comme seul rempart la carrosserie de la voiture familiale. “Il fallait faire des coudes hier pour pouvoir se procurer une tente. Les gens se sont bagarrés comme des chiffonniers. Certains ont pu se les procurer alors que beaucoup doivent patienter”, se plaint Rabha. Recroquevillée dans un coin à l'ombre, elle attend. A Arayguiya, où son gourbi est totalement détruit, point de secours. “Personne n'est venu nous voir alors on est venu ici”, explique-t-elle. En vain, la seule aide dont cette femme a bénéficié se limite à un fardeau d'eau minérale. Un homme vient vers elle et lui tend des billets. Rabha les refuse d'abord puis finit par les accepter. “Nous sommes comme des mendiants”, dit-elle à son tour. Dans le vaste parking du stade jonché d'immondices, Rabha a trouvé un autre bidonville à la place de celui où elle habitait à Arayguiya. En dépit de la présence en force de la police et de l'armée, les sinistrés se sentent dans l'insécurité. “Il y a des voleurs, des drogués. On a peur pour nos familles”, se lamente un enseignant universitaire. Il a fait des économies toute sa vie pour se payer un logement au sein d'une coopérative. C'est dans un bout de tissu qu'il sèche ses larmes. Pour sa part, Hamid n'a plus de larmes. C'est avec des psychotropes
qu'il continue à survivre en errant dans le camp. Toute sa famille est morte, aspirée par le séisme.
S. L.
Les fouilles sont quasiment finies
Place aux pelleteuses
Les deux sites les plus sinistrés de la ville de Boumerdès, à savoir la cité des 1 200-Logements et la cité des coopératives sont entourées par un périmètre de sécurité. A l'intérieur, les pelleteuses et les bulldozers ont entamé les opérations de déblaiement alors que les recherches sont quasiment terminées. Menaçant ruine, les immeubles qui ne sont pas entièrement effondrés constituent un réel danger. Hier, l'un d'eux s'est écroulé causant une grande panique.
S. L.


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