De l'avis d'un constitutionnaliste, le président de la République a toute latitude de temporiser la réalisation de la révision constitutionnelle jusqu'au début de l'année prochaine, s'il ne la soumet pas au référendum. Eu égard aux dernières déclarations du Chef du gouvernement, à l'occasion de la tenue d'une session ordinaire du conseil national de son parti le RND, la révision constitutionnelle n'est plus une vue de l'esprit, mais bel et bien une démarche qui sera menée à aboutissement. Il reste alors à savoir quelle voie légale empruntera le projet pour prendre forme et acquérir force de loi. De facto, l'option d'organisation d'un référendum sur la révision de la loi fondamentale est écartée — mais pas totalement exclue — par un ancien membre du Conseil constitutionnel, qui avance l'argument du temps. La procédure est trop longue, alors qu'uniquement cinq à six mois nous séparent du prochain scrutin présidentiel (selon la loi organique portant régime électoral, la présidentielle a lieu dans le mois qui précède la date du dernier scrutin, elle aura donc lieu dans l'intervalle allant du 8 mars au 8 avril 2009). Sans compter le risque de provoquer la démobilisation des électeurs en organisant deux rendez-vous électoraux à des dates proches. Au-delà, notre interlocuteur affirme que la modification de la Constitution ne portera certainement que sur l'alinéa 2 de l'article 74, afin de ne plus limiter à deux le nombre de mandats remplis par une seule personne. Un amendement qui s'avère politiquement significatif, mais techniquement simple. Le constitutionnaliste explique que le projet de révision constitutionnelle, qui sera immanquablement initié par le premier magistrat du pays, pourra être soumis directement au Conseil constitutionnel sans devoir être examiné par le Conseil de gouvernement et le Conseil des ministres. “Le passage au Conseil constitutionnel est l'étape la plus importante. L'institution donne un avis motivé qui dira si le projet porte atteinte aux grands équilibres de l'Etat ou pas.” À partir de là, le président de la République convoque une réunion du Parlement avec ses deux Chambres, par décret. “Ce texte de loi détermine l'ordre du jour de la session ainsi que le lieu et la date de sa tenue. La session du Parlement est déclarée fermée dès l'épuisement de son ordre du jour.” L'ancien membre de l'institution, présidée actuellement par Boualem Bessaïeh, soutient que les membres des deux Chambres parlementaires se réuniront, sans doute, au Palais des nations du Club-des-Pins, “car il n'existe pas d'autres édifices de l'Etat qui peuvent contenir l'ensemble des parlementaires”, soit 389 députés et 144 sénateurs. Les parlementaires devront voter, probablement sans débat, ledit amendement, qui sera présenté soit par le Chef du gouvernement, soit par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales ou de son collègue de la Justice. Il précise, par ailleurs, que la procédure est rapide. Il cite pour exemple la constitutionnalisation de tamazight, langue nationale, en 2001. “Le chef de l'Etat peut attendre janvier ou février pour l'entamer. Il lui suffit de le faire avant la convocation du corps électoral pour la présidentielle”, lequel interviendra 30 jours avant la date fixée pour le scrutin, conformément aux dispositions de la loi organique portant régime électoral. Dès lors que le chef de l'Etat n'est guère astreint à des délais courts pour amender la disposition qui freine ses ambitions de briguer un autre mandat, il est loisible de penser qu'il attendra encore un peu avant de confirmer ses intentions et rendre publique, par là même, sa troisième candidature à la présidentielle. L'on se rappelle qu'en 2004, il avait attendu le 22 février – soit après la convocation du corps électoral — pour annoncer en grande pompe à l'hôtel El-Aurassi sa candidature au scrutin du 8 avril. Il est à se demander alors qui l'inciterait à se priver d'une si belle messe, en levant rapidement le suspense sur le 3e mandat. Souhila H.