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Turbulences et risque d'amplification de la crise mondiale
Publié dans La Nouvelle République le 22 - 04 - 2012

Panique à nouveau au niveau de la majorité des Bourses mondiales. La crise de l'endettement de la Grèce est un épiphénomène, micro-Etat, avec seulement, selon le FMI, 312 milliards de dollars de PIB en 2.011 sur un PIB mondial de 70 000 milliards de dollars comparé à 17.960 pour l'Union européenne et 15 064 pour les Etats-Unis, soit 47,17 % du PIB mondial pour une population de 880 millions d'habitants sur un total mondial de 7 milliards d'âmes. Le risque d'implosion provient surtout de l'Espagne (1 536 milliards de dollars), de l'Italie(2 245) et de la France ( 2208), cette dernière étant provisoirement mieux sécurisée grâce à l'importance de son épargne intérieure.
Il y a un fort risque d'une dégradation future de la notation de bon nombre de pays. Pourtant, avec mon ami Gilles Bonafi, expert en finances internationales ( Paris, France), lors de la crise d'octobre 2008, qui en réalité a commencé en juillet 2007, nous avons attiré l'attention que les pays émergents sont encore fragiles pour tirer la croissance de l'économie mondiale, les pays du Bric étant encore marginaux, bien qu'en progression substantielle , la Chine avec 6.988 de PIB, devenue deuxième puissance économique mondiale avant le Japon (5.855), l'Allemagne (3.628), le Brésil (2.517), l'Inde (1.833), la Russie (1.884), soit pour ces quatre pays 18,88 % du PIB mondial. Les thérapeutiques passées des différents gouvernements des pays développés sont superficielles, donnant l'illusion de solutions surtout à la veille des élections tant aux Etats-Unis qu'en Europe. Aussi, du fait de l'interdépendance accrue des économies, il y a fort risque d'une crise plus importante que celle de 1929, qui avait commencé à la fin de 1926, début 1927, pour atteindre son point culminant entre 1934 et 1935, si l'on ne repense pas concrètement et fondamentalement toute la régulation de l'économie mondiale. L'objet de cette construction est d'analyser sommairement les critères d'évaluation des agences de notation qui ne donnent qu'une photocopie à l'instant T zéro, face à la crise mondiale qui sera de longue durée parce que structurelle. Agence de notation et critère d'évaluation Une agence de notation opère, contre rémunération, à la demande des entreprises et éventuellement des collectivités publiques désirant être notées et désigne généralement une entreprise ou une institution chargée de la notation financière des collectivités (Etats…) ou des entreprises selon certains critères définis par une réglementation ou par les acteurs du marché. Nous avons trois grandes agences, Fitch Ratings, Moody's et Standard & Poor's. Leur indépendance a toutefois été discutée depuis l'affaire Enron et la crise financière de 2008-2012, les Européens, depuis leur dégradation récente, réclamant la création de leur propre agence de notation. Standard & Poor's a été acquise, en 1966, par le groupe d'édition McGraw-Hill. McGraw-Hill publie le journal Business Week et de nombreux journaux financiers et possède de nombreux réseaux de télévisions. Fitch Ratings est contrôlée à hauteur de 60 % par le groupe Holding Français Fimalac, Moody's, depuis mai 2008, est détenue par Moodys Corporation qui, cotée en Bourse, a parmi ses actionnaires, à hauteur de 13 %, le fonds d'investissement Berkshire Hathaway Inc, lui-même propriété de Warren Buffett. Quels sont les barèmes de notes et les critères d'évaluation ? Elles sont propres à chaque agence. Par exemple pour Standard & Poors, -BB+, BB, BB-: l'investissement est considéré comme spéculatif et donc risqué. On dit aussi que la note AAA est accordée lorsque les investissements sont considérés comme les plus sûrs (risque quasi nul de faillite à 3 ans). La note AA+, AA, AA- est accordée lorsque le pays est du plus sûr au moins sûr, les investissements de bonne qualité. A+, A, A- désigne la qualité moyenne, BBB+, BBB, BBB désigne la qualité moyenne inférieure, junk bonds (obligations pourries). Le risque de faillite estimé est de 23 % à 3 ans. B+, B, B- veut dire hautement spéculatif. CCC+, CCC, CCC est la mauvaise condition, au bord de la faillite et le D est la cessation de paiement. Pour les critères, la notation d'une agence évalue la qualité de crédit (capacité à faire à ses dettes) d'un Etat, d'une institution (entreprise, établissement financier) ou d'une transaction financière comportant un risque de crédit (émission obligataire, opération de titrisation, prêt...). Le conflit d'intérêt réside dans le fait que les institutions paient pour avoir une notation, celle-ci étant un élément décisif dans la décision de l'investisseur. Il s'agit plus d'une opinion qualitative que d'un comité d'analystes interne qui vote. Les pays sont alertés de la décision quelques heures avant qu'elle ne soit rendue publique. Dans le cas d'un Etat, l'environnement politico-institutionnel est clairement l'un de ces facteurs. Les autres facteurs de risques portent essentiellement sur l'économie, la balance des paiements, les marges de manœuvre monétaires et budgétaires, la dette et le hors-bilan. Ainsi, le mode de gouvernance joue un rôle important autant que l'environnement macroéconomique dans l'évaluation. Cela renvoie à la détermination, au sommet de l'Etat, à opérer des réformes à mettre en œuvre et de l'efficacité du processus décisionnel, notamment comment redresser les finances publiques et stimuler la croissance économique. L'histoire des défauts souverains renseigne que, souvent, les choix économiques, monétaires et/ou budgétaires des Etats ont été déterminants dans leur défaillance. Les impacts d'une dégradation par l'illusion monétaire Les recommandations des agences ont gagné en influence du fait que les Etats ont de plus en plus recours aux marchés financiers pour se financer. Ainsi, les gouvernements ont intégré la logique et cherchent à obtenir la meilleure note possible. Dans une étude du Fonds monétaire international portant sur une période allant de 2007 à la mi-2010 et ne concernant que les pays européens, il est calculé que les trois principales agences de notations ont procédé à 28 dégradations de note pour une seule réévaluation. En principe, mais cela n'est pas général, comme en témoigne la dégradation de la note des Etats-unis à AA, qui continue d'emprunter à des taux bas, le niveau de confiance en ce pays puissance économique mondiale n'ayant pas été affecté pour l‘instant. Le taux de financement est élevé en cas de dégradation surtout pour le long terme. Par exemple, au 1er janvier 2012, dans une note reproduite dans le quotidien de L'Economie du monde, l'Allemagne peut lever des financements à 10 ans au taux de 1,759 %, la France au taux de 3,055 %, l'Espagne 5,156 %, l'Italie 6,596 %, l'Irlande 7,465 %,le Portugal 11,385 % et la Grèce au taux de 28,30 %. Ce taux est plus bas à court terme (1 an et à moyen terme moins de 5 ans), l'Italie venant pour moins d'une année de lever 8,5 milliards de dollars au taux de 2,735 % et la France le 19 janvier 2012 à un taux largement inférieur au taux du marché. Mais le problème qui se pose est le suivant : ces différents taux à la hausse ou à la baisse permettent-ils un retour à la croissance ou n'asphyxieraient-ils pas certains pays au profit d'autres comme c'est le cas actuellement en Grèce ? Or, force est de reconnaître que la monnaie traduit le rapport social Etat-citoyens, reposant sur la confiance, étant à l'instar des réserves de change, richesse virtuelle devant se transformer en richesse réelle, un moyen et non une fin à un développement durable. La majorité des Etats commencent à décrier ces agences et pour l'Europe, par exemple, demandent la création d'agences européennes. Or, il s'agit de s'attaquer à l'essence de la crise et non aux phénomènes par des replâtrages conjoncturels. Les écarts entre la sphère réelle et la sphère financière et cette suprématie de la sphère financière — cela relance d'ailleurs l'application de la taxe Tobin sur les transactions financières mondiales mais, pour son efficacité, elle devra concerner tous les pays — expliquent tant la crise mondiale de 1929 que celle de 2008. Avec la crise actuelle, avec cette différence que nous sommes à l'ère de la mondialisation, interdépendance accrue des économies, aucun pays n'est épargné. Les actifs toxiques continuent de produire leurs effets étant passé d'une crise d'endettement des banques à une crise d'endettement des Etats dont les Etats-Unis et l'Europe totalisent plus de 40 % de la dette publique mondiale. Les ondes de choc ne sont pas encore terminées, comme en témoigne la dégradation de la notation de la majorité des pays européens par la Standard & Poor's (S&P), encore qu'elle n'ait pas été suivie intégralement par les deux autres grandes agences comme Moody's et Fichet. Les gouvernants actuellement en Europe sont beaucoup plus préoccupés par la rigueur budgétaire que d'un pacte de croissance qui suppose une coordination des politiques socio-économiques et d'une manière générale une nouvelle gouvernance politique. Par ailleurs, le système bancaire européen devrait être revu dans son fonctionnement impliquant la séparation des fonctions des banques des dépôts et des banques d'investissement à l'instar des Etats-Unis. Face à ces replâtrages, le risque de cette crise est que les pouvoirs publics occidentaux utilisent l'inflation pour alléger l'endettement public, ce qui accroîtrait les tensions sociales renvoyant d'ailleurs à la nécessaire symbiose entre dynamique économique et dynamique sociale et à une plus grande moralité de la gestion de la cité pour un sacrifice partagé. Le dépassement de la crise actuelle passe par la refonte du système économique mondial qui nécessite une nouvelle régulation et une gouvernance mondiale tenant compte du poids croissant des pays émergents préfigurant d'importants bouleversements géostratégiques entre 2015 et 2020, et ce, afin d'atténuer la part des profits spéculatifs qui s'accentuent aux dépens tant des profits des véritables entrepreneurs que des salaires productifs. En fait, les notes des agences de notation ne font que traduire l'état d'une situation donnée, étant surtout préoccupées par la solvabilité financière à court terme d'un pays et ne s'attaquent pas à l'essence de la crise mondiale, qui est structurelle caractérisée par la dominance des activités spéculatives et la faiblesse de la création de la valeur. Et là, nous revenons aux fondamentaux de l'économie qui est avant tout politique, en intégrant en ce XXIe siècle les nouvelles technologies, où toute richesse des nations doit reposer sur le travail et l'intelligence et non sur la spéculation, ce qui renvoie nécessairement à la morale dans la gestion de la Cité. Et pour l'Algérie,
représentant 183 milliards de dollars de PIB en 2011 selon le FMI (2,5 % du PIB mondial) dont 80 % proviennent directement et indirectement des hydrocarbures, soit 0,5 % du PIB mondial sans les hydrocarbures, est posée la transition d'une économie de rente à une économie productive.


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