L'Egypte vit depuis deux jours dans la confusion totale : incertitude politique entretenue, avec des annonces contradictoires sur le nom du vainqueur de la présidentielle, et incertitude concernant l'état de santé de l'ex-président Hosni Moubarak. L'ancien raïs a été victime d'une attaque cérébrale dans la nuit du mardi 19 au mercredi 20 juin et transféré de la prison de Tora, où il purge une peine de prison à perpétuité, vers un hôpital du sud du Caire. Donné à un moment comme «mort cliniquement», par l'agence officielle Mena, les autorités militaires ont vite démenti l'information en annonçant que son état de santé était dans un état stationnaire. Cette nouvelle polémique se greffe à un climat de tension arrivé à son paroxysme, à la veille de l'annonce des résultats officiels des élections présidentielles qui tient toute l'Egypte en haleine, et va déterminer l'avenir immédiat de ce pays en proie à l'instabilité depuis plus d'une année. Il faudrait certainement s'attendre à de nouveaux affrontement à l'annonce de ces résultats, car chacun des deux camps – celui du candidat des Frères musulmans, Mohamed Morsy, et celui de l'ancien Premier ministre sous Moubarak, Ahmed Chafiq - revendiquent la victoire, avec plus de bruit chez les islamistes. D'ailleurs, ceux-là ont commencé à fêter leur victoire ; le candidat a même prononcé un discours annonçant sa victoire et reçu les félicitations de ses «confrères». C'est aussi une manière, pour la confrérie, d'influer sur le processus électoral et d'influencer ainsi indirectement la commission de supervision des élections. C'est dire que les islamistes ne pourront accepter une éventuelle défaite ; déjà que la dissolution du Parlement, à majorité islamiste, par une décision de la Cour suprême, deux jours plutôt, a fait sortir des milliers de partisans et de sympathisants des Frères musulmans dans la rue pour s'opposer à ce qu'ils qualifient de «détournement de la volonté populaire» ou de «coup d'Etat constitutionnel», accusant le Conseil supérieur de l'armée des vouloir s'accaparer tous les leviers du pouvoir. Au-delà des tensions politiques qui règnent depuis trois derniers jours, c'est en effet l'avenir du pays tout entier qui se joue actuellement au Caire. Si aucun retour en arrière n'est possible – même dans le cas d'une victoire d'Ahmed Chafik -, le climat qui règne actuellement augure d'une régression plus profonde, avec le risque de nouvelles flambées de violence et d'une paralysie de l'économie. Les prochaines heures s'annoncent cruciales pour l'avenir du pays qui est toujours sans Constitution, sans chef d'Etat et dont l'ancien président est désormais entre la vie et la mort.