Le régime syrien, confronté à une révolte réprimée dans le sang, a accusé les Etats-Unis d'œuvrer à sa chute en utilisant comme prétexte le dossier des armes chimiques comme ils l'ont fait en Irak. Sur le terrain, l'horreur a encore frappé avec la mort d'au moins 17 civils, dont cinq enfants, tués lundi dans un raid aérien mené par les troupes du régime de Bachar al-Assad sur une localité de la région d'Idleb (Nord-Ouest), selon une ONG et des militants. A Alep, deuxième ville du pays et enjeu majeur du conflit qui dure depuis plus de 18 mois, l'armée a repris ses bombardements dans plusieurs secteurs après la destruction de nombreuses échoppes du célèbre vieux souk dans les combats, selon des habitants. Le régime, qui affirme combattre des «terroristes à la solde de l'étranger» et refuse de reconnaître l'ampleur de la contestation, a affirmé, par la voix de son chef de la diplomatie Walid Mouallem, que des pays comme le Qatar «dépensaient des milliards de dollars pour faire assassiner le peuple syrien». M. Mouallem, dans une interview à la chaîne arabe Al-Mayadeen à New York en marge des réunions de l'Assemblée générale de l'ONU, a aussi accusé Washington de vouloir répéter le scénario qui a mené à la chute du dictateur irakien Saddam Hussein, en prétextant la présence d'armes chimiques dans le pays. L'argument des Etats-Unis de la présence d'armes de destruction massive en Irak avait servi à justifier l'invasion de ce pays en mars 2003. Cet argument s'était ensuite avéré faux. Une «chimère» des Etats-Unis «Cette question [des armes chimiques, ndlr] est une invention de l'Administration américaine», a indiqué M. Mouallem, selon des extraits de l'interview diffusés dimanche soir. Il a toutefois gardé le flou sur la détention d'un tel arsenal par le régime, deux mois après que Damas a reconnu pour la première fois posséder des armes chimiques et menacé de les utiliser en cas d'intervention militaire occidentale, mais jamais contre sa population. «Ces armes chimiques en Syrie, si elles existent, et je dis bien si elles existent, comment est-il possible que nous les utilisions contre notre propre peuple ? C'est du n'importe quoi», a-t-il dit. «Mais, selon lui, cela ne veut absolument pas dire que la Syrie détient un stock d'armes chimiques ou qu'elle a l'intention de les utiliser contre son peuple [...] C'est une chimère qu'ils [les Etats-Unis, ndlr] ont inventée pour lancer une campagne contre la Syrie, comme ils l'ont fait en Irak.» La semaine dernière, le secrétaire américain à la Défense Leon Panetta, dont le pays est réticent à l'idée d'une intervention militaire en Syrie, a affirmé que le gouvernement syrien avait déplacé des armes chimiques pour les sécuriser, alors qu'il mène une guerre dévastatrice contre les rebelles. Cette guerre devient de plus en plus sanglante, les avions militaires du régime n'hésitant pas à bombarder des immeubles résidentiels, comme à Salqine dans la province d'Idleb. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), parmi les 17 morts figurent cinq enfants dont trois d'une même famille. Ce bilan risque de s'alourdir, car il reste des personnes sous les décombres des immeubles visés, a précisé cette ONG qui se base sur un large réseau de militants et de médecins. Une vidéo montre les corps inertes de trois enfants au visage ensanglanté. La mort a frappé ailleurs dans le pays, dans les régions défendues farouchement par les rebelles comme à Deraa, berceau de la contestation, où au moins cinq personnes, dont une femme et son père et un rebelle, ont péri dans le pilonnage de Tafas par l'armée, selon l'OSDH. «Malgré tout ce sang, malgré toutes nos blessures, nous ne reculerons pas, nous continuerons d'offrir nos martyrs, hommes, femmes, enfants, pour cette révolution», crie un homme dans une vidéo postée par les militants anti-régime, en montrant des corps présentés comme les victimes à Tafas. «Que Dieu te maudisse Bachar, toi, tes soldats et ta famille, nous nous vengerons», clame-t-il encore, en allusion à Bachar al-Assad qui reste déterminé à en finir avec la rébellion malgré plus de 30 000 morts depuis le début du conflit en mars 2011 selon l'OSDH. A Alep, une partie du souk classé au patrimoine de l'humanité par l'Unesco a été détruite par les flammes samedi, quand les rebelles ont tenté de s'infiltrer dans cette zone tenue par l'armée, provoquant des affrontements à la mitrailleuse lourde. Les boutiques aux portes de bois, remplies d'étoffes et de broderies, se sont rapidement consumées. Cinq de la vingtaine de marchés ont été détruits.