Le 12 juin dernier, CJ. Chivers du New York Times était en Syrie pour un reportage dans lequel il parlait d'ateliers qui fabriquent quelques munitions pour l'insurrection en Syrie qui est soutenue par l'étranger. L'article, à commencer par le titre, était une longue complainte sur la prétendue insuffisance d'armement pour ces pauvres tueurs. L'article était illustré par des photos des ateliers prises par son complice Tyler Hicks. «Privés d'armes, les rebelles syriens les fabriquent eux-mêmes.» «Tout le monde sait que nous n'avons pas les armes dont nous avons besoin pour nous défendre», déclare Abou Trad, un commandant du Front des rebelles de Saraqib, peu de temps avant de permettre aux visiteurs d'entrer dans cet atelier de fabrication d'obus de mortier. «Mais nous avons la volonté, et nous avons de modestes moyens, et nous avons des outils.» Les ateliers d'armement restent un élément important de la logistique de l'opposition car le flux des armes en provenance du monde arabe ne parvient pas à suivre la demande. «Tout ce dont nous avons besoin, c'est d'armes efficaces», dit Khaled Muhammed Addibis, un commandant rebelle. «Des armes efficaces, rien d'autre.» Quand Chivers a écrit ce qui précède, la ligne officielle de la propagande disait que les Etats-Unis n'armaient pas activement les «rebelles» mais qu'Obama «résistait aux pressions pour ce faire» [armer les opposants]. C'était absurde et Chivers le savait. Alors même qu'il racontait son histoire sur ces pauvres «rebelles» qui devaient fabriquer des armes eux-mêmes parce qu'ils n'en recevaient pas par ailleurs, Chivers avait pu voir de nombreuses armes modernes venues de Libye et d'ailleurs et il savait que la CIA participait à leur distribution. Il n'en a jamais parlé, mais il a au contraire raconté les mensonges ci-dessus. Comment savons-nous qu'il a menti ? Eh bien, jetez juste un œil sur ce que Chivers écrit aujourd'hui : «Les informations recueillies en Syrie ainsi que les données du contrôle aérien et des entretiens avec des membres des milices, des contrebandiers, des rebelles, des analystes et des officiels dans plusieurs pays, dressent l'image d'un effort multinational complexe et actif, financé en grande partie par le Qatar, pour transporter des armes en provenance de Libye aux combattants de l'opposition syrienne. Si ce système semble réussir à acheminer des armes à travers de multiples frontières et à faire un tri parmi les organisations rebelles, une fois en Syrie, le flux d'armement se ramifie. Les combattants islamistes, dont certains sont alignés sur Al-Qaïda, ont l'argent pour acheter les stocks qui viennent d'arriver, et beaucoup de rebelles sont prêts à les vendre. Mais les apports venus de Libye semblent représenter au moins une partie des armes antichars que nous avons vues dans le conflit ce printemps, dont des projectiles de fabrication belge pour des canons sans recul M40 et certains des missiles guidés Konkurs-M de fabrication russe qui ont détruit des blindés syriens ces derniers mois. La présence de munitions venant de l'ancien arsenal de Kadhafi est aisément visible.» Fin mai dernier, le New York Times a trouvé des caisses, des gaines de stockage et des douilles de munitions antichars en provenance de Libye et en possession d'Ahfad al-Rasul, une importante organisation combattante affiliée au Conseil suprême militaire. Alors qu'ils écrivaient sur des insurgés «privés d'armes», Chivers et son photographe Hicks avaient en réalité vu les canons sans recul, les missiles guides et quantités de caisses de munitions venues de Libye. Mais à ce moment là, le thème officiel de la propagande était ces «pauvres rebelles sous-armés » et Chivers avait obligeamment suivi cette ligne. Ce thème de la propagande avait pour but de créer un certain soutien dans l'opinion à une escalade de la guerre en mettant encore plus d'armes entre les mains des rebelles. L'histoire des «rebelles privés d'armes» était fausse et Chivers le savait depuis la «fin du mois de mai» lors de son séjour en Syrie. Comme souvent, ainsi qu'on le constate ici, les journalistes sont incités, ou obligés silencieusement, à coller à la ligne officielle livrée par la Maison Blanche. Les rares fois où le New York Times va contre la propagande américaine officielle sont juste un moyen de diversion pour entretenir l'image d'une presse libre. Les onze pays qui forment le groupe des amis pour la destruction de la Syrie se sont réunis aujourd'hui au Qatar. Avant le commencement de la réunion, le secrétaire d'Etat Kerry avait prévu d'unifier la distribution des armes via le général Idriss, le chef de l'Armée syrienne libre contrôlée par la CIA pour mettre un tant soit peu les djihadistes à l'écart du flot d'armement : Les opposants arabes et occidentaux à Bachar al-Assad se sont réunis au Qatar ce samedi pour renforcer la coordination de leur soutien aux rebelles qui luttent pour renverser le président syrien. Les ministres de onze pays, dont les Etats-Unis, des puissances européennes et régionales musulmanes sunnites, ont tenu des discussions qui, selon les Etats-Unis, devraient engager les participants à acheminer toute l'aide via le Conseil militaire suprême soutenu par l'Occident, dont Washington espère qu'il pourra compenser la rapide montée en puissance des forces rebelles djihadistes. Cette démarche a été jugée nécessaire parce que l'Arabie Saoudite tout comme le Qatar distribuaient librement des armes aux différentes organisations terroristes takfiristes : Deux sources du Golfe ont indiqué à Reuters que l'Arabie Saoudite, qui a joué un rôle de chef de file parmi les opposants arabes à Assad, a aussi accéléré la livraison d'armes sophistiquées aux rebelles. «Il y a eu ces dernières semaines des arrivages supplémentaires d'armes sophistiquées. Ils en reçoivent plus fréquemment», déclare une source sans donner de détails. Une autre source du Golfe parle de ces armes comme de fournitures de nature à «potentiellement faire pencher la balance.» Avant la réunion d'aujourd'hui, le Qatar a essayé de placer les takfiristes qu'il soutient sous l'égide nominale de l'Armée syrienne libre. L'Armée syrienne libre a proposé aux puissantes organisations rebelles islamistes une part des nouvelles armes sophistiquées si elles s'unifient sous la bannière de l'ASL. «Idriss a proposé de soutenir les factions islamistes en partageant les armes qu'il s'attend à recevoir si elles rejoignent une alliance avec l'ASL et accepte certaines conditions», a déclaré hier le rebelle basé à Damas. Il a également déclaré qu'une délégation du Qatar était présente – la seule présence non syrienne à cette réunion [à Ankara jeudi dernier]. Cela a surpris les participants mais était sans doute en lien avec la réunion des soutiens de l'opposition, connus sous l'appellation d'«Amis de la Syrie» qui doit se tenir à Doha aujourd'hui. La conférence de Doha est maintenant terminée et Kerry a [encore] échoué : les ministres des onze principaux pays qui forment le groupe des Amis de la Syrie se sont mis d'accord «pour fournir urgemment tout le matériel et l'équipement nécessaires pour l'opposition sur le terrain, chaque pays le faisant à sa propre manière, afin de la mettre en capacité de contrer les brutales attaques du régime et de ses alliés.» «Chaque pays a sa propre manière» signifie que Kerry a échoué – complètement – à unifier le flux d'armement. Il semble alors que le Qatar et l'Arabie Saoudite continueront à livrer des armes au Jabhat al-Nosra et aux autres organisations terroristes takfiristes en Syrie. Cette désunion devrait amener l'administration Obama à admettre que ses arguments pour donner des armes aux «bons rebelles» pour en priver les takfiristes ne marchera pas. Le Qatar et l'Arabie Saoudite continuant à fournir ces armes «à leur propre manière», les takfiristes resteront la plus forte composante de l'insurrection. Compte tenu de l'afflux de nouvelles armes, l'armée syrienne devrait probablement stopper son offensive en cours et rester sur la défensive en attendant de définir de nouvelles tactiques contre ces armes. Des chars avançant à découvert ou restant immobiles à des checkpoints sont des cibles faciles et ne pourront pas échapper à des attaques menées avec des Konkurs-M, des Kornets [le Kornet un missile russe] ou d'autres armes antichars modernes. Il est possible de les contrer mais cela nécessite du temps pour se préparer et se former. Entre-temps, les importants transports d'armes peuvent être surveillés et attaqués par surprise et détruits dans des raids éclair. «La gêne n'est pas un bon subterfuge pour leurrer simba »dixit mon clébard princesse Saskia