L'Algérie demeure un pays de transit et non un marché important de consommation pour le cannabis marocain. Sur les 13 tonnes de kif saisies par les services de la Sûreté nationale au cours des cinq premiers mois de l'année, seuls 550 kg ont été saisis sur le marché de la consommation. Il est vrai que la consommation de drogues en milieu juvénile a pris des proportions inquiétantes mais ce marché demeure insignifiant par rapport aux quantités destinées à l'Europe et au Moyen-Orient. A l'occasion de la Journée internationale de lutte contre la drogue, la direction générale de la Sûreté nationale a consacré son forum hier à ce sujet, expliquant que d'une part l'Algérie est un passage obligatoire pour les réseaux de narcotrafic de provenance du Maroc et remettant en cause, d'autre part, des constats faisant état d'un énorme marché de consommation. Intervenant dans ce sillage, le commissaire Azzeddine Merazka, chef du service centrale de lutte antidrogue à la DGSN, a assuré que les plus grandes quantités de cannabis saisies étaient destinées à transiter vers d'autres pays. Chiffres à l'appui, le représentant de la DGSN indique que sur les 13 tonnes saisies, 550kg l'ont été dans des affaires de commercialisation et de consommation, ce qui est insignifiant par rapport la quantité globale saisie. Malgré ce constat plus ou moins rassurant, le représentant de la DGSN a affirmé que le fléau prend des proportions nécessitant une prise en charge adéquate et immédiate. Pour ce faire, services de sécurité, société civile, famille, école et médias sont sollicités pour la conjugaison des efforts afin de freiner la machine de la toxicomanie et éviter qu'un plus grand nombre de la population soit affecté. Pour sa part, le professeur Mustapha Khiati, président de la Forem, a tiré la sonnette d'alarme quant à la propagation de la drogue dans la société. Sans donner de détails, l'intervenant a indiqué, en se basant sur une étude réalisée par Interpol, que les quantités de drogues saisies par les différents services de sécurité, soit 157 tonnes en 2012, «ne représentent que 10% à 15% des quantités ayant franchi le territoire national», ce qui indique, selon lui «qu'environ 1 000 à 1 500 tonnes se trouvent sur le marché», a-t-il dit sans argumenter davantage. Pour rappel, lors de son passage, le 16 juin dernier, à l'émission «Invité de la rédaction de la Chaîne III sur les ondes de la Radio national, le colonel Mohamed Tahar, directeur de la sécurité publique et de l'emploi au commandement de la Gendarmerie nationale, avait expliqué que les quantités de drogue saisies dans différentes régions du pays, notamment à l'ouest, étaient destinées à transiter afin de gagner le marché de l'Europe et du Moyen-Orient via la Tunisie, la Libye ou le Niger. En effet, l'Algérie demeure un pays de transit et non une destination finale du kif marocain. Ce n'est pas aussi l'unique itinéraire emprunté par les réseaux de narcotrafiquants mais le plus important, notamment au cours des dernières années. Le directeur de la sécurité publique avait noté que la crise au Mali a perturbé l'axe Maroc-Mauritanie-Mali pour l'acheminement de la drogue et a rendu le passage du cannabis par l'Algérie plus intense. Il avait de même souligné que face au dispositif de sécurité renforcé sur tout le territoire national, notamment au niveau des zones frontalières, les narcotrafiquants sont devenus plus agressifs et tentent de faire passer leurs marchandises par la force en utilisant les armes de guerre. «La grande mobilisation des services de sécurité algériens contre ce trafic transfrontalier et l'instabilité du climat sécuritaire dans les pays du Sahel ont poussé les narcotrafiquants qui, autrefois, utilisaient le territoire du Mali comme passage privilégié, à affronter directement les services de sécurité algériens, ce qui explique en grande partie les grandes quantités qui sont saisies sur le territoire algérien», avait affirmé le colonel Bennaâmane, citant, à titre indicatif, les tentatives menées par les narcotrafiquants, en 2011, pour l'introduction de la drogue à partir de Béchar et Tindouf, avec usage d'armes lourdes contre les unités de la Gendarmerie nationale qui les ont interceptés ainsi qu'un cas similaire enregistré en 2012 à Adrar. L'invité de la rédaction avait, par ailleurs, récusé la thèse selon laquelle les services de sécurité algériens ne mettaient la main que sur 10% des quantités traversant les frontières algéro-marocaines. «L'étude selon laquelle seuls 10% des quantités de drogue transitant par l'Algérie sont saisies est aléatoire, sachant que l'Algérie n'est pas l'unique filière du narcotrafic marocain», a-t-il soutenu, rappelant que la frontière algéro-marocaine sont de 1 600 km pour lesquelles des moyens humains et matériels importants sont mobilisés afin d'assurer la surveillance du territoire et la lutte contre le crime organisé transfrontalier.