La décision courageuse de nationaliser les hydrocarbures annoncée par l'Algérie le 24 février 1971 est historique au plan national, mais aussi dans sa dimension internationale dans la mesure où comme l'a rappelé l'ex-secrétaire général de la Fédération nationale des travailleurs du pétrole, du gaz et de la chimie (FNTPGC), Mohamed Lakhdar Badreddine, elle a inspiré de nombreux pays pétroliers en imposant sa domination sur ses richesses naturelles. Elle impliquait une énorme responsabilité car il s'agissait de se libérer de l'emprise des compagnies pétrolières françaises qui exploitaient les premiers gisements d'hydrocarbures découverts dans le Sahara, mais les cadres algériens ont été à la hauteur, comme l'a souligné Mohamed Lakhdar Badreddine qui fait remarquer que la Confédération générale du travail (CGT, française) avait soutenu la mesure de nationalisation prise par l'Algérie. Cette décision souveraine de l'Algérie avait fait suite au refus de la France de procéder à une hausse de la fiscalité pétrolière telle qu'exigée par notre pays. L'histoire retient qu'à la demande de l'Algérie, la négociation sur la révision du prix fiscal retenu pour le calcul du revenu imposable des sociétés pétrolières françaises, avait commencé quelques mois plus tôt, le 24 novembre 1969 à Alger. L'Algérie s'est appuyée sur l'accord pétrolier signé le 29 juillet 1965 plus précisément son article 27 qui stipulait une révision du prix fiscal par les deux gouvernements au cours de l'année 1969. Il n'y avait pas que le prix fiscal (qui devait passer à 2,85 dollars par baril) en litige, les statuts des sociétés françaises devaient être transformés pour permettre à notre pays de détenir la majorité du capital afin d'en contrôler le fonctionnement. Les négociateurs français n'étaient pas disposés à répondre favorablement aux demandes de l'Algérie. Le contexte alors était marqué, dans ce domaine, par la victoire de la Libye qui avait obtenu la hausse de la fiscalité imposée aux compagnies internationales opérant sur son sol et aussi par les décisions de l'Opep prises à Caracas exigeant cette augmentation. Cela a permis aux négociateurs algériens de bénéficier de ces facteurs favorables et de prendre, face à l'intransigeance des Français, la décision unilatérale d'imposer le nouveau prix fiscal aux sociétés françaises. La négociation a ensuite repris le 28 septembre 1970 mais elle s'est heurtée encore une fois au refus de la France d'accorder à l'Algérie une majorité dans le capital des sociétés concessionnaires françaises et d'opérer une révision à la hausse du prix fiscal. Puis les négociateurs français ont carrément refusé de continuer à discuter avec leurs homologues algériens. Le 24 février 1971, c'est à la Maison du peuple, siège de l'UGTA, que le défunt président Houari Boumediene annonça la prise par l'Algérie de la majorité du capital des sociétés concessionnaires françaises, complétant la mesure déjà prise en 1969 de nationalisations des compagnies américaines. L'Algérie prenait ainsi possession de 51% dans le capital des sociétés françaises dont la part est alors passé à 49%, et le nouveau prix fiscal déterminé par un décret, signé par le président Boumediène passait à 3,60 dollars le baril. Le jour-même, les cadres algériens prenaient en mains la principale richesse de l'Algérie, les hydrocarbures, pour les mettre au service du développement de notre pays. Quarante-quatre ans après, les choses ont évolué et le signe qui le prouve est dans les manifestations autour de la célébration de cette date historique partagées entre côté officiel et opposition. On sait que des partis d'opposition ont appelé à faire de la célébration du 24 février, une journée d'actions contre le gaz de schiste. De son côté, le gouvernement prévoit de marquer la même date par des meetings à Arzew et à Hassi Messaoud, villes symboles de cette bataille des hydrocarbures menée et gagnée par l'Algérie dans la première décennie de l'indépendance.