Dans l'entretien qu'il a accordé à la Chaîne III de la Radio nationale dont il était l'invité de la rédaction, Kamel Rezzag Bara, conseiller du président de la République, a commenté les événements liés au 10e anniversaire de la Charte nationale pour la paix et la réconciliation nationale. Il a commencé par rappeler le contexte de la charnière entre les années 1980 et 1990, les unes marquées par le soulèvement d'octobre 1988 et la décennie suivante, appelée « décennie noire », par le terrorisme instrumentalisant la religion à des fins de prise de pouvoir «et qui aurait pu jeter l'Algérie dans un puits sans fond», a souligné Kamel Rezzag Bara. Au passage, il relève qu'à son avis, on n'aurait pas dû aller aux élections législatives de 1991 dans les conditions politiques, économiques et sociales qui prévalaient à l'époque, avec, de surcroît, un mode de scrutin qui a favorisé les islamistes du parti dissous. Une spirale meurtrière s'en est suivie qui est allée crescendo en dépit des efforts du pouvoir pour arrêter l'effusion de sang. Kamel Rezzag Bara a rappelé également les tentatives successives à travers des formules de dialogue et autres initiatives prises par les dirigeants du pays vers les dirigeants de l'ex-parti dissous, le Front islamique du salut (FIS), pour mettre fin à l'action criminelle des groupes terroristes dont le but était de faire sombrer le pays dans le chaos. Ces efforts, qui ont été engagés d'abord en 1993, puis en 1994 et 1995, ont échoué. Pour Kamel Rezzag Bara, la seule possibilité de s'en extraire était d'instituer une concorde civile suivie d'une Charte pour la paix et la réconciliation. Il explique que cette décision a été arrêtée afin d'éviter une internationalisation du conflit et la problématique de «vainqueur, vaincu». Selon lui, durant la décennie noire, entre 40 000 à 50 000 personnes ont été tuées ou blessées, 17 969 terroristes abattus et 8 023 sont portées disparues. Rezzag Bara refuse de qualifier la décennie noire «de guerre civileé, il y avait eu une situation de «très profonde antagonisation» entre les Algériens qu'il fallait dépasser par la voie politique, d'après lui. Il réfute le chiffre de 300 000 à 500 000 victimes de la tragédie nationale, avancé par certains médias et organisations internationales, comme «catégoriquement fantaisiste». «Les (vrais) chiffres sont à la disposition de la Commission nationale de mise en œuvre de la charte pour la paix et la réconciliation nationale, présidée par le Premier ministre (...), je pense qu'il faut attendre le rapport global de cette commission», a-t-il relevé. Il rejette la démarche «vérité et réconciliation », car elle aurait, après la fin du conflit armé, entretenu encore les antagonismes qui ont conduit au terrorisme. Il rejette l'idée de chercher la vérité, c'est-à-dire savoir qui a fait quoi et qui est responsable de quoi. Ce que l'Algérie a fait en la matière est pris en exemple par d'autres pays. Concernant les déclarations de l'ancien chef de l'Armée islamique du salut (dissoute), Madani Mezrag, sur la création d'un parti politique, M. Rezzag Bara a rappelé les dispositions explicites contenues dans la Charte pour la paix et la réconciliation. Cette Charte stipule «très explicitement que le peuple algérien affirme son droit de se protéger de toute répétition de telle dérive et décide souverainement d'interdire aux responsables de cette instrumentalisation de la religion toute possibilité d'une activité politique, et sous quelque couverture politique que ce soit», a-t-il expliqué. Ce n'est pas une décision du président de la République mais plutôt une décision du peuple algérien», a-t-il tranché. Il insiste sur le fait que ce que dit l'ex-chef de l'AIS concernant les «garanties» est faux. Signalant que la Charte avait mandaté le chef de l'Etat à demander pardon aux Algériens pour les violences endurées durant la décennie sanglante, il dit toujours attendre que «l'autre partie» se décide à en faire de même pour ses nombreux «meurtres, viols et destructions». Il annonce que le projet de révision de la Constitution inclurait les dispositions de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, fondement sur lequel le pays «pourra parvenir à prévenir les risques éventuels de confrontation». S'agissant des dispositions à prendre pour éviter l'enrôlement des jeunes dans le terrrisme, il a affirmé qu'il fallait continuer à lutter contre toutes les formes de radicalisation, d'intégrisme et d'extrémisme et en étant conforme aux attentes de la société.